14 avril 2020

L'actualité sous le filtre de ma (presque) mauvaise foi. 14 avril 2020

C'est une date qui va faire des vagues

Il a dit ... vague. Un siphon, phon, phon ... 

Attention, mesdames et messieurs
Dans un instant on va commencer
Installez-vous dans votre fauteuil bien gentiment

En avant-propos, ce journal est un numéro spécial bistouquet-a-causé-IV. Il a parlé, et ça fait beaucoup parler. Comme l'écho sur les rochers. Sinon, une fois lu le journal, l'actualité continue, mais à une vitesse ... le ciel est plus clair par temps de pandémie, mais là c'est couvert d'escadrilles qui tournent, tournent, comme des moulins à vent.

Donc je commente pas tout ce qui va être dit dans les jours qui viennent, mais ça va être du gâteau pour chansonniers et pamphlétaires.

C'est bien simple, l'organisation à la Macron, ça confine à l'anarchie. Et là, vous pouvez me demander, je me ferai un plaisir de vous renseigner.


Aller, on commence par le bout du début.

A la clôture du 11 avril, la France annonce officiellement 353 décès liés à covid-19 en milieu hospitalier et un décompte de 290 décès dans les Ehpad.

Aujourd'hui 13 avril nous en sommes à 335 décès à l'hôpital et 239 en Ehpad, selon BFM vers 19 heures.

Ces données sont ce qu'elles sont, froides, indigestes, incomplètes également. Il est de plus en plus évident que des personnes ne sont pas décomptées victimes de cette pathologie simplement parce qu'elles ne sont pas diagnostiquées, formellement, et dans les lieux encadrés pour être décomptées. Les témoignages commencent à se faire entendre de personnes malades et maintenues, confinées à domicile, simplement parce qu'elles n'ont pas été considérées comme prioritaires, selon les procédures du moment, et que le désengorgement des hôpitaux étant devenu une priorité pour les gestionnaires de la santé publique, les règles de répartition ont pu, dans certains cas, maintenir des personnes dont le pronostic vital était éventuellement très pessimiste.

On observe dans pratiquement tous les pays du Monde des approximations dans la gestion de la crise, et surtout dans la prise en charge des personnes. Au-delà des aspects techniques, des succès ou des difficultés, pour les professionnels de santé, de prendre en charge et de soigner les patients, la seule détection et mise en évidence de la maladie patient après patient sont devenues une difficulté majeure. L'humanité que les soignants voudraient pouvoir dispenser aux patients ... elle attendra, à leur corps défendant, ils n'ont pas le choix.

A l'indigence des systèmes de santé qui trouve sa cause dans la volonté de rationnaliser des coûts, particulièrement dans les pays qui ont les moyens de s'équiper d'un grand nombre de choses, s'ajoute l'inhumanité globale de nos sociétés. Inhumanité à laquelle personne ne veut se savoir associé, bien entendu, et l'un dans l'autre on ne souhaite à personne d'être individuellement responsable de ce que l'on pourrait, dans d'autres circonstances, ranger dans le casier hideux des pratiques génocidaires.

Ce sont des temps insupportables. On pourrait dire aussi qu'ils sont très difficiles, mais non, il ne faut pas chercher à décrire les choses autrement que pour ce qu'elles sont. Ne pas accepter le principe que nous pratiquons l'eugénisme conduit à des euphémismes.

L'information, statistique, du jour, semble donner une idée sérieuse de ce que, en France, l'épidémie commence à prendre le pas. Trois, quatre, cinq jours de statistiques baissières représentent déjà un résultat plus probant. Il reste que ce sont des résultats obtenus dans le cadre d'un confinement strict mal maîtrisé, et pour lequel aucun changement de situation ne peut avoir lieu tant que les moyens de mise en place de barrières différentes ne sont pas regroupés au sein d'une population. A cela s'ajoute donc des données chiffrées tronquées, espérons qu'elles ne sont pas délibérément faussées, sur le nombre de cas de personnes malades, et bien pire encore sur le nombre de décès.

Le déconfinement, qui interviendra plus tard, par groupes de population, il n'y a plus de doute, et par secteurs géographiques assurément, ne se fera qu'au prix d'une obligation probable du port d'un masque, et surtout d'une mise en place de tests assez systématiques, ils devraient l'être totalement pour bien faire, ce ne sera pas le cas. Aux mesures de confinement, de barrières, de distanciation, la "traçabilité" en temps réel des personnes pourrait être d'un secours utile, si elle était techniquement gérée et maîtrisée sans entrer en conflit avec les règles européennes de protection sur les données personnelles. Est-on prêts pour cela ? Certainement pas au niveau du pays, il faudra être très modeste et ne pas commettre de faux pas.

Il ne doit pas y avoir de défaillance sur l'adhésion de la population pour que la traçabilité soit efficace, car dans le cas contraire la même population tentera de trouver tous les biais pour y déroger. La santé d'une nation, comme tout système de sécurité, ne se décrète pas sur un coin de table, chaque personne est partie prenante du système, faute  de quoi on sait qu'il finira par être défaillant.

Pour l'heure, nous sommes loins du compte sur les moyens nécessaires au déconfinement, et la patience est la seule ressource secourable avant de pouvoir retrouver massivement une capacité de fonctionnement et des libertés d'agir, d'aller et venir, suffisantes pour parler d'un redémarrage économique et social.

Tout autre discours serait pure fantaisie. Qu'il survienne un remède miracle à l'instant, il n'aurait pas plus d'utilité que ça s'il ne s'intègre pas en appoint d'une campagne de dépistage, combinée à une politique de pistage, les deux étant objectivement les meilleurs outils possibles pour gagner définitivement du terrain sur l'épidémie.

Et qu'il ne soit jamais oublié que toute mesure qui a pu être prise pour permettre de passer les moments les plus difficiles était provisoire, et uniquement destinée à servir la santé collective et individuelle. Aucune autre justification de mesures d'exception ne saurait être une excuse pour les personnes qui les auront imposées.

Nous avons l'infime honneur d'entendre le président de toutes les françaises et de tous les français, de tous âges, de toutes origines, venir nous dire pour la quatrième fois sa vision des choses. Il doit porter des lentilles car nous ne le voyons jamais avec des lunettes. On suppose qu'il en aura chaussées pour tenir son discours.

Et nous l'avons donc entendu. Un discours assez concis, articulé en trois parties, la première exposant la longue liste des remerciements policés pour faire passer les comportements d'un État policier et comptable, la seconde pour décliner quelques principes d'ordre plutôt général, qu'il va falloir analyser pour comprendre ce qui s'emboite bien et ce qui ne le fait pas, et nue troisième partie dont la visée est de tenter de réitérer l'offre présidentielle d'une union et d'une cohésion dont la plupart des gens pensent qu'elle dépend surtout de lui.

Le journal que je vous propose aujourd'hui est délibérément long, complet pour parler principalement de covid-19. Il devrait vous permettre de vous faire votre propre opinion sur la pandémie, en l'état actuel des connaissances diverses et variées de pas mal de monde, mais surtout de la gestion de cette pandémie, parce qu'il y a d'un côté une maladie qui se répand comme une traînée de poudre, et de l'autre une humanité menacée dont le destin est différent, à terme, selon qu'on réagit mal ou bien collectivement.

Cette pandémie n'est pas une guerre. Le président allemand le rappelait, peut-être bien pour se montrer très clair avec son alter-ego français. Nous ne sommes pas en guerre, mais la pandémie interroge notre humanité.

Quelques points dont on peut dire qu'ils sont indiscutables sur le plan technique, c'est que nous faisons face à un virus contagieux, plus contagieux qu'une simple grippe saisonnière, tout confirme que le modèle pandémique qui nous est infligé ressemble à la grippe espagnole de 1918. Pas d'immunité pour les humains face à un virus nouveau.

Si la question reste posée de savoir quand le virus sera vaincu, quand il disparaîtra, la réponse est jamais. Par contre, et c'est aussi une certitude, assez rapidement l'humanité toute entière, ou presque, va apprendre à vivre avec, s'immuniser, peut-être à l'aide d'un vaccin, mais même sans.

Le principe d'un tel virus est de coloniser les organismes, qui développent une immunité, le virus se transforme par petites étapes, d'une année sur l'autre, par exemple, et passée la phase pandémique, la maladie devient moins grave le plus souvent. Ainsi en a t-il été de la grippe espagnole, qui est devenue avec le temps grippe saisonnière. Celle-ci fait toujours des dégâts, beaucoup même, mais ses effets sont "digérés" par les populations qui s'habituent à voir venir le temps des symptômes grippaux qui n'affectent gravement que les personnes les plus fragiles.

On trouvera sûrement un vaccin d'ici quelques mois pour permettre à nos organismes de préparer leur immunité bien plus facilement.

Existe t-il des traitements qui peuvent permettre de soigner covid-19 ? De s'en débarrasser ? D'éviter les symptômes aggravés dont nous entendons beaucoup parler ?

Pour l'instant la réponse n'est pas tranchée. Il semble qu'il existe deux pistes intéressantes de traitements dont l'efficacité est controversée, ou pas encore confirmée. Il s'agit des traitements basés sur la chloroquine et les antipaludéens, d'une part, et d'une autre approche au sujet de laquelle vous trouverez dans le journal quelques explications, basée sur l'azithromycine.

Sans prendre parti à la place des experts, ou, et surtout des médecins, ces traitements existent, sont dispensés à certains endroits, donnent des résultats probants sur une prise en charge précoce de covid-19. Ils ne soignent pas les effets induits par la maladie, et qui conduisent les patients les plus atteints à la mort assurée. Le problème de la maladie covid-19 est qu'on la connaît encore assez mal pour ne pas voir le collège médical d'accord sur son fonctionnement.

Au point de voir émerger depuis quelques semaines des interrogations sur l'ancrage pulmonaire de la maladie. S'agit-il de la pneumonie observée chez les patients en fin de parcours ? De toute évidence pas vraiment.

Il est probable que les pneumonies aggravées et fulgurantes observées soient une conséquence de la maladie, un effet collatéral et pas le point central de l'affection. Les pistes thérapeutiques visent ce constat. On peut donc imaginer que pour au moins une partie des personnes malades on soit à court ou moyen terme en mesure de traiter les patients. Ce qui changera sans doute beaucoup de choses. Mais ça ne veut pas dire que covid-19 deviendra anodine.

L'un des aspects critiquables des dernières semaines a été le jugement médiatique et le débat soutenu au niveau du grand public, porté sur le travail de l'IHU de Marseille. Didier Raoult, qui parle parfois trop, ou parfois pas assez, avait expliqué il y a quelques temps, qu'en sa qualité de médecin il souhaitait pouvoir soigner des patients. Il lui est souvent opposé, généralement par certains experts ou spécialistes, de ne pas suivre un certain protocole, des méthodes éprouvées de "construction de la preuve", or lui répond qu'il fait de la médecine et pas de la recherche.

Toute chose étant posée, il est médecin, il souhaite appliquer la médecine pour, en priorité, soulager le patient, et il est dommageable que son travail ait pu être stigmatisé comme on l'a observé. De ce point de vue, il faut rendre un hommage à Macron d'avoir été à la rencontre de Raoult, pour montrer l'intérêt ... de la France ... pour un travail médical dont les chercheurs devraient s'emparer avidement pour en démontrer les qualités et les défauts.

D'autres traitements sont testés, pour lesquels des médecins praticiens tentent d'améliorer la vie de leurs patients Qu'on les laisse faire de la médecine, que les chercheurs les accompagnent dans le silence et le sérieux de la science, nous aurons toutes et tous à nous y retrouver.

Là où le bât blesse un peu, c'est dans la confusion des rôles, lorsque le politique se mèle de la science, que la science se mêle de la médecine, où il en va de même pour la pharmacie, et il ne m'échappe pas que je peux moi-même paraître me mêler de ce qui ne me regarde pas, j'ai toutefois envie de croire qu'en bout de chaîne j'ai le droit d'observer et de demander des comptes sur tout ce que je peux comprendre, ce qui s'applique à tout le monde et pas seulement à moi.

Et le bât étant blessant, j'observe, par exemple, une chose qui m'a particulièrement choqué, même si elle est presque passée sous silence.

Le président s'est déplacé à Marseille pour rencontrer le professeur Raoult, il était accompagné de son conseiller scientifique en chef Jean-François Delfraissy. Ce dernier, pendant l'exposé de Raoult devant le président a été, de manière remarquée, plutôt agité et disent certains furibard d'entendre un médecin expliquer son approche face à la maladie. Jean-François Delfraissy était à un autre moment clef des évènements récents, le même sur lequel Macron s'est appuyé pour acter le maintien du premier tour des élections municipales.

Loin de moi l'idée de porter un jugement sur les qualités scientifiques de Delfraissy, lui-même professeur en médecine, infectiologue, mais au niveau des qualités humaines je lui connais désormais deux travers : il n'aime pas avoir à supporter le travail des autres, et il ne parvient pas à imposer le point de vue de la science à un pouvoir politique qui ne connaît rien aux sciences.

Le conseil scientifique qui est devenu une sorte de super-ministère pandémie paraît, sur deux exemple précis, non seulement fragile, mais probablement perturbant pour la bonne conduite des affaires du pays. Et ce n'est pas des qualités techniques des conseillers dont on parle ici, mais bien des qualités humaines qui empêchent de reveler l'utilité d'un tel système. Les affaires du pays sont conduites de manière perturbée, c'est un fait.

Est-ce parce qu'une fois encore, une fois de plus, ce qui devrait être "la science" se confond avec la médecine, qui interfère aussi avec la politique ... qui peut le dire, je ne le sais. Mais tout ceci est confusant, et préjudiciable.

Savoir que les décisions qui sont prises au sommet de l'Etat, ou à son chevet, est susceptible de souffrir d'impatience, d'intolérance au travail des autres, ou d'incapacité à expliquer la nature des choses à un président dont le jugement est de toute évidence plutôt limité, tout ceci pose problème, et si nous voulons mesurer la dimension du problème, je crains assez fort que cela puisse l'être à l'aune des statistiques que j'évoquais en ouverture de ce journal.

Devant la confusion que pouvons-nous faire ? Tenter d'être conscients, nous informer, si besoin, et si possible dénoncer, trouver les failles, les travers, interroger jusqu'à obtenir les réponses. Et faisant le tri de ce que l'on peut comprendre, se protéger comme on le peut.

Ce qu'il est devenu difficile de comprendre, maintenant qu'on a eu quelques précisions de la pensée macronienne, avant c'était flou et on pouvait imaginer des choses qui pouvaient nous paraître logiques, c'est qu'à partir du 11 mai, les gens qui ont un boulot devront y retourner, que les enfants devront se retrouver à l'école, qu'une partie de la population va donc pouvoir s'échanger gaz et fluides dans les bus et les métros, mais à condition de bien vite s'enfermer sur les lieux de travail, dans les maisons, avec éventuellement des masques, peut-être, avec des tests, s'ils ont l'impression d'être tombés malades ... jusque-là on comprend bien que ça ne fonctionne pas exactement comme il faudrait, mais admettons.

Pourquoi, à ce stade et dans ce cas vouloir absolument relancer une activité économique, de cette façon, en ne rouvrant pas les bars, les discothèques, les cinémas, les hôtels et restaurants comme avant ?

Le conseil scientifique a t-il vraiment validé l'option que l'on ne teste que les personnes qui sont, ou pensent être malades ?

J'ai le sentiment que cette question recèle une réalité qui n'apparaît pas dans la logique du président. En effet, on teste en gros les personnes dont on n'a pas besoin de savoir si jamais elles seraient malades, puisqu'elles disent qu'elles le sont, ou pensent l'être.

Du coup, à chaque fois qu'une personne va avoir un symptôme, ou un autre, elle va demander à être testée. Soit. On va, si on reconnaît par la preuve qu'elle est contaminée, devoir tester les 50 ou 100 personnes identifiées qu'elle aura pu "contacter", à commencer par l'entourage au foyer, les camarades de classe des enfants, les parents de camarades de classe et les enseignants, et les enfants de ces derniers ...

A la première alerte portant sur une personne, si on veut bien faire les choses, il faudra consommer un bon millier de tests, sinon c'est la passoire assurée. En trois jours, j'imagine que la France entière aura dû être testée.

Ca doit être la logique de la méthode, que Macron n'a pas développé.

Y a t-il quelqu'un dans son entourage, parmi ses conseillers les plus éminents, qui lui a expliqué que son plan est torchonné ?

Ne pas tester au maximum revient à ne pas tester du tout. Et c'est tout le problème, mais partant de là, il était plus plausible de poser le problème du déconfinement autrement, pour éviter une fois de plus de faire une communication forte pour rien.

Nos voisins suisses ne s'y sont pas trompé dans le fond. Quand ils expliquent faire à peu près les mêmes choses qu'en France, plus ou moins, mais sans la politique spectacle, ils nous indiquent le chemin à suivre.

Il y a un autre point qui me semble être une lacune, qui reste à démontrer d'ailleurs, mais on a certains indicateurs intéressants.

Depuis deux jours, nous avons quelques informations plus exhaustives sur ce qu'on appelle la prévalence de covid-19, c'est à dire, en quelque sorte la proportion de personnes atteintes par la maladie dans un périmètre de population.

En Islande, environ 10% de la population a été testée, sur une population qui n'est pas des plus importante puisqu'on compte environ 350.000 islandais, mais c'est une numération significative au regard des autres données disponibles.

Les islandais qui ont mis en place un confinement comme tous les pays ou à peu près, semblent être ou avoir été porteurs du virus à hauteur de 50% de la population. C'est un niveau qui est encore insuffisant pour considérer que la maladie est gérable comme une grippe saisonnière, on admet qu'il faut atteindre un taux de 60 à 80% pour dire que le risque pandémique est écarté. En effet les personnes contaminées, celles qui survivent en tout cas, vont développer une immunité, immunité qui devient la barrière naturelle à la propagation du virus. De ce fait un nouveau cas de contamination n'entraîne plus de propagation épidémique, et la situation est contrôlable par un système de santé organisé.

Compte tenu de la prévalence mesurée en Islande et des méthodes employées dans ce pays, on peut admettre que la prévalence en France soit au moins au même niveau que l'Islande. L'Islande n'a pas mis en place un confinement strict, et il est possible que de ce fait la prévalence y soit plus importante que dans un pays comme la France, c'est à vérifier ... en faisant de larges périmètres de tests.

En Italie, le village de Vo, près de Venise, ayant été mis en confinement strict, comme on le sait pour une bonne partie de toute l'Italie, village qui compte un peu plus de 3.000 habitants, a fait l'objet d'un test systématique. 100% de la population a été testée. La prévalence y est de 90% de personnes ayant été atteintes par le virus SARS-Cov2.

Or le président semblait, dans son dicours, intégrer le fait que la prévalence, en France, n'était que de quelques pourcents. Donnée imprécise, mais dont on serait heureux d'avoir la source, et la valeur précise.

L'argument de la prévalence trop faible pour envisager une approche qui renvoie à un déconfinement plus ouvert est un argument solide, mais dispose t-on d'une valeur précise ? Qui la connaît, et qui décide en fonction de cette connaissance d'orienter les décisions politiques dans un sens ou l'autre ?

Tout porte à croire, et c'est ce que retiennent pas mal de gens qui peuvent lire des données tangibles, que la prévalence pour la France est nettement supérieure à "quelques pourcents". On parlait il y probablement deux semaines, au regard des tests réalisés dans les hôpitaux et des résultats obtenus, qui ne portent pas sur des populations générales, sauf à l'IHU de Marseille semble t-il, d'une prévalence supérieure à 15%. Et celle-ci n'a sûrement pas chuté. La progression des données de cas et de décès permet d'imaginer que deux semaines plus tard, la prévalence en France peut avoir atteint 40% peut-être, malgré les mesures de confinement, qui sont des mesures de confinement au foyer, dans les établissement de santé ... dont on sait que dans un cas comme dans l'autre il s'agit de confinements n'évitant pas la dispersion du virus. Même dans un foyer familial bien confiné, si un virus rentre, il ne faut pas rêver, toute la famille recevra le virus. On ne parle pas des Ehpad ... on sait.

Or la logique présentée par Macron dans son discours semble s'appuyer sur le fait qu'on ne connaît pas une prévalence élevée, ni même significative.

Est-ce un oubli, une erreur de transmission entre le conseil scientifique et le président ? C'est en tout cas difficile à comprendre.

Et la différence que cela fait, c'est qu'une prévalence de moins de 10% impose de ne surtout pas remettre en cause le confinement, on risquerait l'hécatombe. Tandis que si on observe, par exemple dans une région, un département, une agglomération, une prévalence importante, on peut déconfiner. Normalement on doit le faire en utilisant deux choses : des tests et des masques, ainsi que les procédures de distanciation et les mesures barrières déjà connues. De ce fait, on peut, par exemple, dans le Grand Est, envisager un déconfinement plus rapide, puisqu'on est certain, dans la région de Mulhouse en particulier, que la prévalence est bien supérieure à quelques pourcents.

Il convient de procéder à des tests élargis, par secteurs géographiques,  en ouvrant ces tests à des échantillons significatifs de la population, en maintenant les mesures de confinement au foyer pour les personnes fragilisées éventuellement.

Pourquoi ceci n'a pas été explicitement mentionné dans le discours de Macron ? Son Conseil scientifique est-il utile, et présent dans les conclusions que le président propose lors de ses interventions ? Est-ce Macron qui n'entend pas, ou ne sait pas traduire les choses ? On aimerait bien des réponses plus précises.

Et à l'inverse, on ne peut que comprendre la réouverture à marche forcée prévue pour le 11 mai que comme une annonce qui a vocation, soit à ne pas être suivie d'effets, soit à conduire à de nouveaux problèmes qui retarderont la sortie de crise.

Reste que Macron a bien précisé qu'il appartient au gouvernement de définir la mise en application des orientations qu'il a donné. Soit.

Au bilan des dernières semaines et jusqu'au discours que nous avons reçu, il reste que ce qui semble être un des plus grands freins à une politique plus réussie dans la gestion de crise repose sur la main mise du politique sur les questions liées à la santé publique.

Les médecins sont empêchés de traiter l'épidémie avec les moyens qui peuvent leur sembler les plus appropriés en médecine de ville, l'ensemble des soignants ont été placés devant des difficultés insurmontables pour exécuter sainement une médecine hospitalière adaptée, en raison du délitement du réseau hospitalier public et de l'incompréhensible réquisition du système hospitalier privé qui a été suivie de peu de mise en utilisation de ses moyens réquisitionnés. L'appropriation de la gestion du médicament par le politique, est également pointée autant par le corps médical que par le corps pharmancien, empêchant la mise en place de stratégies locales répondant aux réalités du terrain.

On ne comprend pas, au fur et à mesure qu'on rentre dans tous les aspects du problème, la raison pour laquelle un pouvoir politique s'empare d'une question de santé publique, sans se donner d'autre part les moyens de répondre aux besoins. Les masques sont là, enfin justement non, ils ne sont pas assez présents, pour nous rappeler que nous en avions, nous n'en n'avions plus, nous en aurons, quand les avions voleront en escadrilles avec des lots à bord ...

Il est ainsi très difficile de trouver une cohérence entre le discours Macron-covid-19 IV et les besoins réels du pays en matière de gestion de crise sanitaire.

On comprend, sans que les choses ne soient ouvertement dites, que l'urgence présidentielle est de proposer une réponse visant à relancer la machine économique, ce à quoi nous ne pouvons qu'adhérer, mais il est évident que si les boeufs doivent tirer la charrue, il faut les placer devant.

Et je sais pas vous, mais ce matin le vent souffle ...

Et je suis Vent debout. Et je ne suis pas seul.



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Bruno-Pascal Chevalier lors d'une manifestation
contre les franchises médicales devant le ministère
de la Santé en avril 2008. Photo François Guillot. AFP
Liberation (11/04/2020) : «Appelez-moi Ishmael»

Christian Lehmann, médecin et écrivain

Christian Lehmann est écrivain et médecin dans les Yvelines. Pour «Libération», il tient la chronique quotidienne d'une société sous cloche à l'heure du coronavirus.

«Call me Ishmael.» C’est la première phrase de Moby Dick, le roman d’Herman Meville. Le Pequod a coulé. Tout son équipage a disparu sous les flots quand la mythique Baleine Blanche que poursuivait le capitaine Achab a enfoncé sa coque. Seul un homme a survécu. Et quand on lui demande son nom, il répond «Appelez moi Ishmael».

Ce qui signifie que son nom n’a aucun intérêt, aucune importance. La justification de son existence, dorénavant, est seulement d’inscrire le nom des morts dans la mémoire collective.

J’adore ces quelques mots. Ils me mettent les poils. «Call me Ishmael», mon nom importe peu. Je suis celui qui a survécu, pour parler de ceux qui eux n’ont pas survécu.

Je me suis réveillé ce matin et comme dans la baignoire je tentais de sortir du brouillard du Covid, qui m’obsède H24 (je m’endors en lisant des articles sur ses effets sur la microcirculation, je me réveille en lisant les messages des collègues travaillant dans les ehpad du coin…), Facebook m’a rappelé de souhaiter l’anniversaire d’un ami, Bruno-Pascal Chevalier.

Bruno-Pascal Chevalier aurait eu 57 ans. S’il n’était pas mort en décembre 2012, au lendemain d’une marche contre l’homophobie. Bruno-Pascal était ce militant homosexuel, travailleur social et activiste, atteint du sida, qui en janvier 2008 avait entamé une grève des soins pour combattre et dénoncer les franchises sur les soins de Nicolas Sarkozy, défendues avec zèle par Roselyne Bachelot. L’année précédente, j’avais mené la pétition contre ces franchises, sans succès. Les médias n’avaient d’yeux que pour la lutte entre Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal, et le thème principal choisi par la candidate censée porter les valeurs de la gauche n’était pas le social, mais… l’identité nationale et le drapeau. Avec le succès qu’on sait.

Il avait donc fallu la mise en danger de mort d’un homme pour que les caméras se tournent vers lui, que le sujet fasse l’ouverture des journaux télévisés. Nous nous sommes battus côte à côte, un temps, et les médias nous ont adorés. Le militant homosexuel revendiqué, avec sa coupe de cheveux très particulière de Riquet à la houppe, sa voix à la fois précieuse et extrêmement grave de fumeur de Gitanes, ses fringues badass. Et, à ses côtés, le médecin généraliste propre sur lui dans son loden, égrenant les chiffres, démontrant que derrière un discours de maîtrise économique de bon père de famille, porté par Sarkozy, Fillon et la clique, nous assistions au démantèlement d’une sécurité sociale solidaire, pièce par pièce.

Plutôt que de taxer les stock-options à l’égal des salaires, comme l’avait proposé le président de la Cour des comptes d’alors, (Philippe Séguin, pas vraiment un dangereux bolchévique), Sarkozy avait décidé de taxer les malades, de piocher des pièces jaunes dans les poches des sidéens, des cancéreux, des accidentés de la vie et du travail. Ces sommes cumulées, qui semblaient ridicules aux puissants, pouvaient représenter pour les faibles la différence entre la vie et la survie. Qu’importe, la machine néolibérale était en route, comme s’en réjouissait en 2007 Denis Kessler, ancien vice-président du Medef, ancien directeur général d’AXA : «Les annonces successives des différentes réformes par le gouvernement Sarkozy peuvent donner une impression de patchwork… A y regarder de plus près, on constate qu’il y a une profonde unité à ce programme ambitieux… Il s’agit aujourd’hui de sortir de 1945, et de défaire méthodiquement le programme du Conseil national de la Résistance.»

Ne jamais croire – je parle pour les jeunes générations – qu’Emmanuel Macron représente un «Nouveau Monde». Son projet n’est que la continuité sous un vernis de com assez médiocre d’un projet très ancien, celui de remettre les gueux à leur place, de leur reprendre tout ce qui fut conquis de haute lutte. Un pays qui stocke des lacrymogènes et des LBD pour tirer sur le peuple, plutôt que des protections pour les soignants, n’a aucune leçon de maintien à donner à personne.

On se dira, me lisant, que je dévie beaucoup, dans cette chronique, de la crise actuelle. Pas du tout. Si Bruno-Pascal était là, son rire ferait tomber tous les masques, celui de Roselyne Bachelot relookée en sainte, Roselyne Bachelot qu’il avait poursuivi dans les allées de Solidays et qui avait dû fuir avec son escorte devant un seul homme, malade, chétif, à la voix éraillée, qui à lui seul incarnait la honte de sa position. Ceux de tous ces pantins grisâtres pour qui vos vies de rien ne sont qu’une ligne sur un bilan comptable. Celui de tous ces représentants de la gauche qui te firent la cour. De François Hollande, qui promit d’abolir les franchises, de Marisol Touraine, qui décida de laisser disparaître le stock de protection contre une pandémie, de Catherine Lemorton, qui brandit dans l’hémicycle les centaines de milliers de signatures que nous avions patiemment recueillies, et une fois aux affaires s’assit sur les espoirs des petites gens, et dirige aujourd’hui la réserve sanitaire…

Si nous nous sommes trouvé l’un l’autre, si nous avons fait chemin ensemble un temps, c’est probablement que nous avions pressenti, comme quelques autres, où ce rouleau compresseur nous mènerait.

Hier donc, Facebook, qui ne connaît pas la mort, m’a rappelé de te souhaiter bon anniversaire, Bruno-Pascal. Ironie du sort, l’excellent Daniel Schneidermann m’avait invité ce jour-là pour parler de la pandémie, des mensonges et des injonctions contradictoires du gouvernement, dans son émission Arrêt sur Images. Douze ans après nous avoir invités tous les deux pour expliquer notre lutte contre les franchises. Nous t’avons dédié l’émission. Je ne sais pas ce que tu penserais de ce moment si particulier.

«Call me Ishmael.» Je suis là aujourd’hui pour rappeler à ceux qui t’ont probablement oublié que des hommes se sont levés, et ont payé le prix, pour tenter d’éviter le désastre que nous affrontons aujourd’hui.

J'ai choisi, et avec une émotion vraie, cet article témoignage pour ce qu'il recèle. Je donne la parole à un recéleur ! Christian Lehmann, nous dit quelque chose de fabuleux dans ce qu'il narre de la période 2007-2008. Il dit tellement de choses, et en si peu de mots.

Ma sensibilité particulière à la campagne 2007 a fait tilt en lisant l'article, et on trouve un tel écho plus de dix ans après.



5, 4, 3, 2, 1, 0, partez, tous les projecteurs vont s'allumer
Et tous les acteurs vont s'animer en même temps



LUDOVIC MARIN via Getty Images
Le Huff (12/04/2020) : Avant le discours de Macron, ce que prône le Conseil scientifique

Par Anthony Berthelier

Ce lundi 13 avril, le président doit aborder les questions brûlantes autour de l'épidémie de coronavirus. Le Conseil scientifique a lui déjà tranché.
Confinement prolongé d’un mois? Reprise progressive de l’activité? Changement de stratégie sur les masques? Emmanuel Macron est attendu au tournant, ce lundi 13 avril, pour son allocution depuis l’Élysée alors que les Français entreront, le lendemain, dans la cinquième semaine de confinement mis en place pour freiner l’épidémie de coronavirus.

Pour son quatrième discours du genre depuis le début de la “guerre sanitaire”, le chef de l’État devrait s’attacher à rassurer les soignants tout en dessinant dans le même temps les contours d’un retour à la vie normale. Selon BFMTV, Emmanuel Macron souhaite se montrer aux affaires, dans la gestion de la crise, sans trop entrer ni dans le bilan, ni dans les perspectives pour ne pas laisser penser que le pire est passé.

Le JDD lui, croit savoir que le président de la République pourrait notamment repousser le confinement “jusqu’à la fin mai, au moins jusqu’au 15”, et annoncer une reprise de l’école en septembre. Les hypothèses et rumeurs se multiplient dans la presse à mesure que le discours approche et que l’Élysée ne souhaite pas commenter.

Une chose est sûre: le chef de l’État a passé ces derniers jours à consulter. Et comme depuis le début de la crise, ses annonces devraient être guidées par les recommandations du Conseil scientifique sur le Covid-19. Ce qu’il prône, notamment par la voix de son président l’immunologue Jean-François Delfraissy, est assez limpide: pas de déconfinement pour le moment, mais des tests en masse et des habitudes sociales à changer.

    Plusieurs semaines de confinement

Pour l’immense majorité des médecins et scientifiques, repousser le confinement de plusieurs semaines est une impérieuse nécessité. ″Dans l’état actuel des connaissances, on peut discuter de ce qui se passera dans le post-confinement, mais l’élément essentiel et capital est la poursuite d’un confinement strict sur plusieurs semaines”, estimait le professeur Delfraissy à franceinfo au cours de la semaine.

Un discours qui rejoint celui de l’OMS notamment, qui depuis plusieurs jours met en garde les gouvernants sur les dangers d’un retour à la normale trop précoce.

Selon des proches du président, le chef de l’Etat “devrait évoquer une date de fin de confinement courant mai, au moins après le pont du 8-10 mai. Une date suffisamment lointaine pour qu’on comprenne qu’on pourra alors commencer un début de déconfinement partiel, mais extrêmement progressif”. Il devrait ainsi opter pour une échéance “assez lointaine pour faire comprendre l’effort qui reste à faire, mais suffisamment proche pour esquisser la France d’après”.

    Sortie de crise progressive

Pour l’après, la dizaine de scientifiques que compose le Conseil prône un déconfinement progressif, notamment par tranche d’âge. “On ne va pas passer du noir au blanc, mais du noir au gris avec une poursuite du confinement en particulier pour certaines populations”, anticipe Jean-François Delfraissy,

    Confinement renforcé pour les populations à risque

Dans son avis du 2 avril, le Conseil scientifique estime que le durcissement du confinement pour les populations à risque est “nécessaire.” “Le Conseil scientifique considère qu’il est impératif que les personnes à risque adoptent un confinement strict les protégeant d’un risque de contamination”, explique le texte qui comptabilise “près de 17 millions de personnes” risquant d’être touchées par une forme grave de la maladie.

    Davantage de masques

La France doit absolument se doter de davantage de masques pour réussir son déconfinement. C’est en tout cas ce qu’indique le Conseil scientifique dans son dernier avis, qui fait de ces éléments de protection un préalable impératif à un semblant de retour à la normale.

“Le gouvernement devra s’assurer que les éléments d’une stratégie postconfinement seront opérationnels, incluant notamment (...) la disponibilité des protections matérielles comme les gels hydro-alcooliques et les masques à l’usage des personnels soignants, des personnes en situation d’exposition au virus en priorité, puis à l’ensemble de la population, comme en Asie.”

    Dépistage massif de la population

C’est l’autre condition demandée par les scientifiques pour envisager une sortie du confinement: la possibilité de tester massivement la population. Alors que le gouvernement amorce un changement de doctrine sur le sujet, promettant notamment de tester les personnels et résidents des Ephad, le Conseil appelle à une “prise en charge significativement élargie du diagnostic.”

En d’autres termes: encore plus de dépistage.

    Distanciation sociale prolongée

Les scientifiques estiment qu’un véritable retour à la normale n’est pas envisageable pour le moment. Après le confinement, ils plaident pour la prolongation des mesures de distanciation sociale.

“Quelle que soit la date de sortie de confinement, le virus circulera toujours. Nous devons apprendre à vivre avec pendant plusieurs mois. Pour ça, il nous faut prendre des mesures de distanciation sociale sur le long terme”, explique au Figaro Pierre-Louis Druais, un médecin généraliste membre du conseil scientifique.

Quant à la question polémique de la géolocalisation des malades du coronavirus... les médecins éludent. Ils plaident, dans leur avis du 2 avril pour “de nouveaux outils numériques permettant de renforcer l’efficacité du contrôle sanitaire de l’épidémie.” Sans entrer dans le détail de ces dispositifs.

Donc, ceci représente les éléments disponibles pour Macron, avant son discours. Cet article est là pour témoigner et permettre d'analyser ce qu'en retire le président. Ce qu'il en retire, on en parle un peu après !
  
 

L'histoire de la vie et de la mort
Mais nous allons changer le décor
Espérons qu'on la jouera encore dans deux mille ans



MaPomme (13/04/2020) : Les bribes du discours d'un soir

Donc le discours appartient au passé, déjà. Déjà ? Oui bon il vient juste de le faire, et on en a pour un bon mois pour se le manger vu ce qu'il contenait.

Pour essayer de croquer à peu près bien les choses, le président s'est exprimé de manière plutôt bien préparée. Il a fait acte de contrition, rapide, mais audible, sur l'impréparation du pays, et a longuement énuméré tous les métiers, groupes de personnes qui ont permis de passer le premier mois de confinement, et, surtout, de tenir à bout de bras une population atteinte dans sa chair.

L'impression générale qu'il tient à faire passer est que la France pouvait paraître habitée par un peuple indiscipliné, et il affirme que l'image que nous avons montré est bien plus forte et structurée.

Il dit avec insistance ne pas avoir toutes les connaissances pour faire mieux que ce qui est fait, confirme une levée progressive du confinement dont la date de référence pour marquer les esprits est fixée au 11 mai.

Les entreprises qui le peuvent et y sont préparées tournent, et peuvent continuer, d'autres de les rejoindre sous réserve de respecter la protection des personnes.

A partir du 11 mai, si tout va bien, les activités pourront reprendre, en donnant la priorité aux activités de travail, à la scolarité de premier et second cycle, l'enseignement supérieur ne devant pas prévoir de reprise jusqu'à l'été.

Le déconfinement sera organisé par groupes, territoires, selon la fragilité éventuellement des gens, sur la base de tests qui permettront de savoir qui est contaminé ou non. Les personnes détectées porteuses pourront être confinées et prises en charge selon cas.

Il appartient au gouvernement s'appuyant sur les experts de fixer les modalités précises de ces étapes.

Macron a tenu un discours franc, sans concession sur la dureté des évènements, mais un discours également volontaire pour expliquer que nous devons nous montrer unis pour atteindre le retour à une vie heureuse. Mais il a renouvelé son idée de redémarrer sur des bases différentes, dont les modes d'action restent à déterminer.

On peut dire qu'il s'agissait d'un discours rassembleur et plutôt bien tourné.

Ce que l'on remarque bien aussi, c'est les explications données qui font preuve à la fois de fermeté sur les grands principes, et d'humilité sur la connaissance que nous avons, que lui même possède, sur les problèmes que nous vivons.

Et ces limites à la capacité de donner des éléments plus précis, pour le président, lui permettent de rebondir sur l'articulation politique de l'exécutif et des institutions. Macron en appelle au devoir de gouvernance, et indique qu'il attend sous quinzaine un plan d'action de la part du gouvernement.

Après quatre semaines de passage de témoin entre premier ministre et président, il semble que Macron désormais se positionnera comme président, attendant d'un gouvernement qu'il trouve les solutions pour appliquer des décisions destinées à bien gérer la crise, dans un premier temps, et l'après crise.

On pourra penser qu'il reprend le costume qui est normalement le sien, qu'il veut présider sans s'exposer personnellement, ou bein se laisser aller à dire qu'il tente de sauver son quinquennat ...

Peu de promesses, donc, sauf effectivement de remédier aux défauts les plus évidents révélés par les semaines que nous venons de passer, mais bien des objectifs, avec des ajustements possibles.

Reste, maintenant, des interrogations sur ce qui peut être ajusté : en termes de calendrier, à priori assez peu de choses, la date du 11 mai étant donnée avec insistance, mais peut-être que le redémarrage économique, ou la reprise des écoles, collèges et lycées peuvent être adaptés en fonction de la réalité de la santé publique.

Il appartiendra au gouvernement de faire en sorte que l'activité économique reprenne totalement dès que ce sera possible. Macron n'est pas visiblement habité par la pression ou la compétition devant les succès ou les déboires des autres pays, mais on l'imagine à la fois attentif à ne pas se retrouver en deçà des performances des autres pays, d'une part, et probablement très affecté par l'équation économique. Ce qui revient pour lui à trouver la meilleure solution pour permettre à l'économie de tourner malgré tout. La perspective d'une prise en charge économique de la crise selon les principes d'un revenu universel, par exemple, n'ont pas l'air d'avoir atteint son raisonnement, et certainement moins encore celui d’Édouard Philippe. Barre à droite a été donnée, barre à droite la pensée présidentielle doit rester.

Parmi les interrogations qui sont sorties immédiatement, pendant le discours de Macron, le sujet de la réouverture des écoles fait trembler pas mal de gens. Ce que Macron n'a pas dit plus ouvertement que ça, c'est que l'idée de réouvrir les classes était dans l'air du temps, mais qu'il appartient au gouvernement et aux experts d'en décider. A l'autre bout de la chaîne de décision, il est évident que des millions de parents vont avoir du mal à considérer que la confiance est rétablie d'un coup, après tant d'approximations et d'erreurs depuis deux mois.

Il est donc probable de constater d'une part une forte opposition des parents à renvoyer pour quelques semaines des enfants à l'école, de voir monter un vent fort d'opinion pour annuler les examens, les notations continues, et il ne serait pas étonnant que le ministre de l'éducation passe en burn-out avant l'été.

Et .. problème de logique : pourquoi renvoyer les enfants à l'école si le risque de contamination n'est pas écarté suffisament, et que les enfants, moins affectés par covid-19 le ramènent à la maison ? Il y a une raison à ça : il faut que les parents retournent bosser ! Mais justement, les parents vont traîner des pieds pour envoyer les enfants, et donc ils seront à la peine pour aller bosser. Ce qui ne va pas faire plaisir, c'est sûr, à Bout de Rézieux, ce con voudrait que les parents repartent hier bosser 60 heures par semaines pour compenser les pertes des entreprises.

L'un des objectifs de Macron est probablement de tenter un retour à une économie active pour l'été, sans certitude de ce qui pourrait se pratiquer en matière de libre circulation : objectif vacances et les à côtés, le tourisme est durement touché, évidemment, tous ces gens qui pourraient être empêchés de partir dépenser un peu de monnaie sur les plages ou dans les montagnes, ça doit vraiment l'ennuyer.

Le hic, c'est que même si la liberté de circuler était donnée à une grande partie de la population, sans nouveauté concernant les capacités du système de santé de proposer des traitements valables, les mesures de distanciation, les mesures barrières, les contraintes applicables sur la voie et dans les espaces publics risquent bien d'empêcher sérieusement toute activité significative de tourisme.

Ambiance ! On va tenter de déconfiner, un peu vite au regard d'une partie de la communauté scientifique en désaccord avec une autre ... les conseillers scientifiques du président et du premier ministre pensaient pour les uns à un début de déconfinement vers le 5 mai, d'autres exigeaient ouvertement début juin. Arbitrage incroyable ... Macron a choisi le 11 mai en confiant la mission indigeste de mettre au point les détails à son premier ministre.

Edouard Philippe est promis à un mois de mai ou rien de ce qui lui plaît ne sera possible.

Et le discours 4 de Macron va rapidement sembler bien mal adapté à la situation du moment.

Le discours n'était pas très long, les commentaires deviennent interminables ! QUelques réactions de la "classe politique" :

- Julien Bayou (EELV) interroge : pourquoi prendre seul une décision si lourde de reprise le 11 mai sans passer par l'Assemblée ?

- Olivier Faure (PS) : "Le PR semble avoir pris une leçon bienvenue d’humilité et entendu certaines de nos alertes sur l’urgence sociale. Le 11 mai est ambitieux pour rattraper des retards incompréhensibles et la pénurie actuelle. La santé ne doit pas être bradée au profit des enjeux économiques."

- Manon Aubry (LFI) : "Le gouvernement a tellement bien géré la crise jusqu'à présent qu'il garde la même stratégie : adapter les consignes sanitaires à la pénurie.

Résultat : pas de dépistage massif & 5 mois pour tester uniquement les malades. On continuera donc de naviguer à l'aveugle."

Bon, on voit que les réactions sont précoces, et ne manqueront pas de se multiplier, et ce qui pouvait, au moment du discours ressembler un exercice de synthèse et de rassemblement va partir en ...couille, mais si j'ose le dire, et comme elles vont généralement par paires, il y aura du monde au balcon.

Un petit cadeau, de votre journal préféré : le discours complet du président offert par le service de communication du château ! On est bien renseignés, on a nos entrées, et on vous donne un journal parfait :




Ca va être sa fête !


Le Huff (13/04/2020) : Discours de Macron: l'erreur de sous-titre qui résume cruellement la situation

Par Matthieu Balu




Rien de mieux parfois qu’un néologisme pour résumer un état d’esprit partagé. Alors qu’Emmanuel Macron livrait un discours très attendu dans la soirée du 13 avril, annonçant notamment le report de la fin du confinement au 11 mai, des sous-titres s’affichaient également en direct. À l’image de la fois précédente, ils n’ont pas manqué de passionner les réseaux sociaux, comme vous pouvez le découvrir dans la vidéo en tête de cet article.

Même si cette fois il y a eu globalement bien moins de coquilles, et ces dernières furent plus rapidement corrigées par le vélotypiste, au tiers du discours, un mot nouveau était né. Alors qu’Emmanuel Macron évoquait les solutions trouvées face au coronavirus comme des “forces pour le futur”, le sous-titre a affiché le mot ... “foutur”.

Un néologisme dans lequel les internautes hilares se sont empressés de voir un lapsus. Il s’agirait de la fusion des mots “futur” et “foutu”, terrible image d’une époque marquée par les incertitudes. La coquille fut corrigée en une seconde, mais le mal était fait...ou plutôt, l’expression “No foutur” était née.

Voilà. Ca c'est fait. Fus-tu foutu bistouquet ? C'est pas toi qui l'a voulue celle-là, mais tu va la porter longtemps !

Si vous avez envie de vous faire plaisir, c'est à 6'25 sur la vidéo ;)

Et pour la prestation du président, il est facile de noter quelques points précis concernant la qualité du discours et de l'orateur, ben ... le texte est pas mal, le jeu d'acteur pas convaincant. On détecte, peut-être, un discours terminé sous la pression, dans l'urgence ? Et un récitant pas tout à fait à l'aise avec le prompteur. D'où un débit qui ne prend pas bien, et une sorte de danse syncopée dans une posture assise. Ben on le trouve pas bien dans le costume, et on le plaint parce qu'on est bienveillants. Un travailleur qui bloque à ce point devant son poste de travail, faut voir avec le chef d'équipe pour le faire remplacer.



En mars 2020, Philippe Gabriel Steg a été nommé
coprésident du Comité de pilotage recherche Covid-19
de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris
(AP-HP). (DR)
Les Echos (11/04/2020) : Coronavirus : trois premières leçons sur l'épidémie

POINT DE VUE - Le Pr Philippe Gabriel Steg, chef du service de cardiologie à l'hôpital Bichat à Paris et coprésident du Comité de pilotage recherche Covid-19 de l'AP-HP, est en première ligne dans la lutte contre le coronavirus. Quatre semaines après le début du confinement, il dresse un premier bilan de l'épidémie et de son impact sur le système de santé français.
Au terme de quatre semaines de confinement, il est possible de tirer un premier bilan de l'épidémie de Covid-19 et de son impact sur un système de santé qui, malgré ses qualités indéniables, était en difficulté depuis quelques années.

Bien que l'épidémie soit loin d'être terminée, l'hôpital « a tenu », sans être débordé. Il a réussi à se mobiliser et se réorganiser à une vitesse incroyable, triplant, quadruplant, quintuplant parfois les capacités de réanimation, mettant en oeuvre en temps réel une réallocation complète des moyens, où des chirurgiens orthopédistes ont accepté de devenir aides-soignants, des spécialistes de se transformer en urgentistes ou infectiologues, des services entiers de changer d'affectation.

« Bienveillance mutuelle »

De nombreux services ont purement et simplement cessé d'exister et ont réalloué leur personnel médical et paramédical aux unités « COVID » créées rapidement. Chaque soir, le bilan faisait apparaître des réanimations remplies sans lit disponible, et chaque matin, grâce aux équipes de gestion de crise, de nouvelles solutions étaient trouvées pour en créer de nouveaux. Faire face sans céder, c'est aussi gérer les personnels, les volontaires, les locaux, mais surtout les stocks et les approvisionnements en ventilateurs, pyjamas, médicaments, consommables ; prévus pour une activité normale mais pas pour une activité multipliée par quatre ou cinq en deux semaines, avec chaque jour la menace d'une nouvelle pénurie.

Cela n'a été possible que grâce à un engagement incroyable de l'ensemble des personnels qui font l'hôpital, une solidarité entre professionnels, l'investissement des équipes administratives, et aussi la solidarité entre régions, permettant l'exploit technique de transférer des centaines de patients de réanimation des régions les plus affectées vers celles moins touchées, libérant par là même de précieux lits. Dans cette crise, plus de temps pour les divisions et les obstacles entre les différents acteurs de l'hôpital. L'urgence a prévalu. Cette solidarité a d'ailleurs fait resurgir au sein de l'hôpital un climat étrange de « bienveillance mutuelle », où ce qui était compliqué et bureaucratique quelques jours plus tôt devenait subitement plus fluide et simple.

Héroïsme

On parle volontiers de l'héroïsme des soignants. On doit se méfier du lyrisme. D'abord, l'héroïsme est celui de tous les acteurs de l'hôpital, celui des vigiles qui accueillent le public, celui des personnels de ménage qui se chargent de la gestion des déchets contagieux, au risque de leur propre contamination, en passant par les secrétaires, les ouvriers, les administratifs et, bien sûr, les soignants.

Et puis, malheureusement, s'il y a eu héroïsme, c'est que tous les acteurs de la chaîne de soins n'ont pas toujours eu les équipements de protection qu'ils auraient dû avoir. Le manque de masques, en particulier au début de l'épidémie, et tout particulièrement pour les personnels de santé et du secteur médico-social exerçant en ville, restera un défaut majeur dont les causes devront être analysées. La responsabilité d'avoir « désarmé » à tort un système de prévention et lutte contre les épidémies, à, la suite des campagnes de presse dirigées contre Roselyne Bachelot à l'issue de la grippe H1N1, devra être éclaircie. Il reste aussi à connaître l'impact probablement douloureux de l'épidémie sur les personnes âgées , qu'elles soient en Ehpad ou non, et celui sur les patients souffrant d'autres maladies graves qui n'ont pu être prises en charge ou ont évité l'hôpital et retardé les soins.

Rémunération, champ d'action des soignants… des réformes nécessaires

Un second constat est que ceux à qui on demande beaucoup en temps normal ont donné encore plus face à la crise. C'est particulièrement éclatant dans le cas des personnels des urgences, en grande difficulté depuis des années et qui ont démultiplié leur activité dans le contexte de la crise. Il faut bien sûr se méfier des raisonnements simplistes : on ne dimensionne pas des services hospitaliers en fonction du pic d'une épidémie centennale, mais il est clair que la variable d'ajustement qui a permis à l'hôpital public de tenir face à la vague de malades, c'est, outre la solidarité du privé et des autres régions, l'engagement nuit et jour des professionnels à tous les échelons et dans tous les services.

Force est de reconnaître qu'il est peu de domaines de l'activité humaine où on demande tant à des personnels habituellement aussi mal payés, au regard de leurs compétences et de leurs responsabilités. A cet égard, les réformes récentes visant à étendre les compétences des professions paramédicales apparaissent incroyablement timorées, imposant un parcours administratif complexe, et avec une gratification financière qu'il faut bien qualifier de symbolique. Il est temps que, dans leur champ d'action et leur rémunération, les professions de santé, et en particulier les paramédicaux, rejoignent leurs pairs d'autres pays et d'autres champs professionnels.

Interrogations sur certaines recherches

Un troisième champ de réflexion est celui de la recherche : nous ne savons pas encore s'il y aura un ou plusieurs traitements ayant une efficacité sur l'infection à coronavirus et ses conséquences. Malgré le contexte épidémique, il a été possible de mettre sur pied, en quelques semaines voire parfois en quelques jours, des dizaines d'études en France (et des centaines dans le monde), avec des procédures d'évaluation accélérées, qui ont permis d'obtenir en 48 heures les autorisations habituellement obtenues en trois mois.

Mais on ne peut passer sous silence la défaite mémorable pour la santé publique et la culture scientifique du grand public qu'aura été la présentation sur les réseaux sociaux, puis dans une revue scientifique de complaisance, d'études cliniques qui, malgré une présentation tapageuse, ne permettent pas de conclure à une efficacité ou absence d'efficacité. Ce qui est proprement sidérant, c'est que la préférence donnée au jugement des médias, du public et des politiques sur l'évaluation rigoureuse par les pairs et la nécessité d'une réplication expérimentale, a été accompagnée de la théorisation de la supériorité de l'empirisme sur la méthode expérimentale, de critiques contre les essais randomisés, jugés non éthiques, et finalement de la préférence donnée à l'argument d'autorité (« Eminence-based medicine ») par rapport à la médecine fondée sur les preuves (« Evidence-based medicine »).

« Refuser la méthode expérimentale, la vérification, la réplication, c'est revenir dans le passé »

Ce qui est présenté comme le combat du « franc-tireur » contre les « mandarins » est en réalité exactement l'inverse : refuser la méthode expérimentale, la vérification, la réplication, c'est revenir dans le passé à l'époque des certitudes mandarinales, où l'autorité et l'intuition du patron valaient preuves. A l'inverse, la médecine par les preuves, dérivées des essais cliniques randomisés, c'est la possibilité donnée à chaque chercheur, chaque médecin, quel que soit son rang, son pays, sa spécialité, de tester expérimentalement une hypothèse, de la vérifier ou l'infirmer, de répliquer les résultats, et, via la revue par les pairs, de critiquer ou modérer les conclusions qui en sont tirées ; processus de confrontation des doutes, des opinions, processus de vérification.

L'avenir dira si la chloroquine et ses dérivés ont une efficacité, même partielle, contre l'infection à coronavirus et ses conséquences chez l'homme. Ce qui est malheureusement déjà établi, c'est qu'il sera durablement plus difficile de réaliser des essais randomisés en France et dans le monde et, par là même, de tester les nouveaux traitements.

Voilà un article qui me tient à coeur. Pour une raison : il re-pose une question égotique, à mon sens. Sous couvert de rigueur scientifique, ce qui est une chose souvent hermétique au médecin, Philippe Gabriel Steg dont on ne peut nier les qualités et les compétences, fait un raccourci qui pourrait être honteux s'il était prononcé par un débutant :

"Ce qui est présenté comme le combat du « franc-tireur » contre les « mandarins » est en réalité exactement l'inverse" dit-il, ce qui n'est pas un procès fait par Raoult à ses collègues, ni même pour la plupart de ses collègues un procès qu'ils feraient à Raoult. Enfin tant qu'ils s'occupent de médecine. L'opposition qui est énoncée entre la médecine par l'autorité, qui s'opposerait à la médecine par la preuve n'a explicitement rien à voir avec la chloroquine, il se trompe de sujet. Le "dossier Raoult" n'est pas un procès de la méthode, Raoult propose un protocole expérimental, parce que ce protocole n'a pas encore été prouvé. Il le propose en application de son serment de médecin, c'est en tout cas ce qu'il expose, en précisant qu'il appartient aux scientifiques d'amener la preuve dès qu'ils le peuvent.

C'est dommage de constater, là encore les problématiques d'egos venant de personnes dont la seule passion devrait être de s'appliquer à soulager des maux et à soigner des gens, ou le contraire, mais ça revient au même. Le fond du problème, et Steg le mentionne, n'est pas un problème médical, mais un problème médiatique.

Et pour le reste Steg a raison de dire et décrire ce qui est mentionné dans son point de vue. L'admirable réponse, du corps médical en particulier, et de tous les contributeurs à la mission de santé publique actuellement menée dans les pires conditions et par des personnels qui connaissaient depuis des années un déficit de reconnaissance ... c'est admirable, oui, mais il faudra que cela fasse l'objet d'un aménagement sérieux une fois la crise passée. Point sur lequel le sommet de l'Etat s'est engagé !



En mars, sur 57 440 décès au total, toutes causes
confondues, environ 13 000 personnes sont mortes
chez elles. Soit une hausse de près de 10% par
rapport à 2019. © Crédit photo : Illustration AFP
Sud-Ouest (12/04/2020) : Morts à domicile en France : les victimes invisibles du covid-19

Officiellement, 13 832 personnes sont mortes du covid-19 en France : 8 943 à l’hôpital et 4 889 dans les Ehpad et établissements médico-sociaux. Mais le bilan pourrait être beaucoup plus lourd, en prenant en compte les victimes mortes à leur domicile.
Le dernier patient qu’il a perdu est mort, à 85 ans, dans son lit : insuffisance respiratoire. Le Dr Philippe Doll, généraliste à Wittenheim, dans le Haut-Rhin, suspecte un cas de covid-19 mais, sans test et hors hôpital, ce décès n’entrera pas dans le bilan officiel des victimes du coronavirus.

Le médecin glissera ce mot sur le certificat de décès : "suspicion de covid". Sans savoir si cela aura un effet sur les statistiques.

Depuis plus d’un mois, le directeur général de la Santé Jérôme Salomon fait chaque soir un point sur la mortalité. Officiellement, 13 832 personnes sont mortes du covid-19 en France : 8 943 à l’hôpital et 4 889 dans les Ehpad et établissements médico-sociaux. Ces derniers sont comptabilisés depuis une dizaine de jours.

Le bilan pourrait être beaucoup plus lourd

Mais le bilan pourrait en réalité être beaucoup plus lourd, ces chiffres ne prenant pas en compte les victimes mortes à leur domicile.

Chaque année, la majorité des décès (59%) surviennent en hôpital ou clinique, 14% en maisons de retraite, selon l’Insee. Mais plus d’un quart surviennent aussi à domicile (26%). En mars, sur 57 440 décès au total, toutes causes confondues, environ 13 000 personnes sont mortes chez elles. Soit une hausse de près de 10% par rapport à 2019.

L’Insee ne précise pas les causes des décès, et au vu de la faible quantité de tests réalisés en médecine de ville, il est difficile d’établir le nombre exact de morts liées à l’épidémie.

Des tests pas automatiques

"Mon beau-frère est décédé hier. Ils ont dit arrêt cardiaque, on veut bien y croire mais bon", dit une habitante de Wittenheim, jointe au téléphone. L’histoire, elle la connaît bien : il y a quelques semaines, cette femme a déjà perdu son mari, du coronavirus.

 "On sait bien que c’est le covid"

Dans cette ex-cité minière de 15 000 habitants, proche de Mulhouse, l’un des foyers majeurs de l’épidémie en France, 20 personnes sont mortes au cours du seul mois de mars. Et depuis le début de l’épidémie, près d’un tiers des 69 résidents de l’Ehpad de la ville sont décédés.

Des tests n’ont pas été réalisés à chacun de ces décès. "Nous avons tellement de cas en même temps. Quand les gens sont en détresse respiratoire, vu ce qu’il se passe, on ne fait pas non plus une enquête : on sait bien que c’est le covid", dit le maire Antoine Homé.

+ 50% de décès à domicile

Pour SOS Médecins, spécialisé dans les consultations à domicile et surtout présent en zone urbaine, "le cap des 50% d’augmentation des décès à domicile en France est passé" : en deux semaines, entre le 22 mars et le 5 avril, la fédération de médecins a enregistré 253 décès à domicile, soit 54% de plus que l’an dernier sur la même période.

"On peut raisonnablement penser qu’une majeure partie est liée à l’épidémie de covid-19", estime le président de SOS Médecins Pierre-Henry Juan.

"Il faudrait une autopsie, mais on n’en fait pas, sauf quand il y a un problème médico-légal. Et comme la cause du décès à domicile est difficile à établir scientifiquement parce qu’on ne teste pas le patient, on ne mesure pas cette surmortalité".

En mars, les 1 300 médecins du réseau ont réalisé plus de 34 000 actes en lien avec le covid-19, sur observation des symptômes. Pour les médecins généralistes, le nombre général de cas de covid-19 est lui aussi largement sous-évalué. Selon le syndicat MG France, au cours des deux dernières semaines de mars, 56 154 cas de covid-19 ont été recensés sur tout le territoire, sur diagnostic clinique.

"Extrapolé au nombre total de médecins généralistes en activité en France (55 000, ndlr), on peut estimer le nombre total de cas autour de 1,5 million en ville", calcule le Dr Jacques Battistoni, président du syndicat. Soit l’équivalent du nombre de cas officiels actuellement recensés dans le monde …

Les décès oubliés inhérents à toute épidémie

"Dans les départements fortement touchés par l’épidémie, on observe un nombre de décès en nette progression par rapport à 2019", jusqu’à deux fois supérieur en mars, explique Sylvie Le Minez, cheffe des études démographiques et sociales de l’Insee.

À Wittenheim, "la mortalité a augmenté de deux fois et demi par rapport aux autres années", selon le maire Antoine Homé. "Depuis quatre semaines, on vit un cauchemar", lâche-t-il. "L’épidémie, c’est pas de la théorie, ici, on la voit", résume-t-il. Chaque matin, les avis mortuaires tapissent 7 ou 8 pages du quotidien régional L’Alsace.

"L’épidémie, c’est pas de la théorie, ici, on la voit"

"Dans quelques semaines, on va ouvrir des portes et on pourrait bien découvrir que des gens qui ne répondaient plus sont morts chez eux", craint l’épidémiologiste Emmanuel Baron, directeur d’Épicentre, centre de recherche de Médecins sans frontières. Selon le spécialiste, les "décès oubliés" sont inhérents à toute épidémie.

"Le fait de ne pas confirmer tous les cas est classique dans les épidémies à large échelle. En cas d’épidémie de choléra, rougeole ou méningite, on ne fait pas systématiquement de test diagnostic car ça alourdirait la prise en charge et ça ne changerait pas le traitement".

Il faudra attendre pour les vrais chiffres

Il faudra attendre une étude scientifique et démographique complète, qui prendra sans doute de longs mois, avant d’avoir des chiffres se rapprochant de la réalité, sur les décès imputables à l’épidémie de covid-19.

Après l’épisode meurtrier de canicule en 2003, il a fallu attendre plusieurs années avant d’avoir un nombre définitif des décès. En 2007, l’Inserm avait officiellement arrêté à 19 490 le nombre de morts dues à la canicule, quatre ans après la catastrophe sanitaire.

On peut pas en dire grand chose de plus, à chaud c'est pas raisonnable. Pas raisonnable non plus de fermer les yeux et de ne rien dire.

Il y a une information à retenir, pour après, c'est qu'on observe à certains endroits un accroissement de 50% des décès, à domicile.

En fait, il y a un point de comparaison, ce qui sera l'objet d'autres articles dans le futur proche, avec l'Italie et l'Espagne. Dans ces deux pays, le système de santé a été débordé à un point tel qu'on y a vu beaucoup de personnes mourir tout simplement chez elles. Sans soin, et souvent sans personne autour.



Le trio de médecins parle de résultats encourageants
pour leur traitement, mais est conscient des
limites de leur approche.
(Illustration) Reuters/Craig Lassig
Le Parisien (13/04/2020) : Coronavirus : trois médecins généralistes pensent avoir trouvé un possible remède

Yves Leroy

Deux médecins du Grand Est et une du Nord ont mis en place un protocole de soin à base d’azithromycine. Avec, disent-ils, des résultats sur leurs patients touchés par le Covid-19.

Trois médecins généralistes qui échangeaient sur un groupe Facebook ont-ils trouvé une parade au Covid-19 utilisable à très grande échelle? Denis Gastaldi, Jean-Jacques Erbstein et Olivia Vansteenberghe, respectivement médecins à Morhange, Créhange (Moselle) et Wormhout (Nord) préfèrent rester très prudents, tout en faisant part de leurs grands espoirs. Le Dr Gastaldi assure au Parisien-Aujourd'hui en France que le trio a testé un traitement sur plusieurs centaines de patients de manière redoutablement efficace. Son confrère le Dr Erbstein s'était exprimé samedi à l'Est Républicain, en avançant des données chiffrées moins étendues.

Leur combinaison de médicaments s'appuie sur les recherches du professeur Raoult, sur leurs connaissances d'autres traitements et sur une bonne dose de pragmatisme. « C'est très empirique, nous explique le Dr Gastaldi. On a échangé tous les trois sur les traitements possibles. Comme on ne pouvait pas utiliser l' hydroxychloroquine dans le protocole du Pr Didier Raoult (NDLR : les généralistes ne sont pas autorisés à prescrire cette molécule), on s'est demandé si l'azithromycine ne pourrait pas être la base du traitement. D'autant qu'on s'aperçoit que l'hydroxychloroquine n'est pas si miraculeuse que ça. L'azithromycine a l'avantage d'être un antibiotique, mais d'avoir aussi une action sur les virus et une activité anti-inflammatoire sur le parenchyme pulmonaire (NDLR : le tissu fonctionnel des poumons). »

Et de poursuivre : « On a réfléchi sur ce qui pouvait augmenter l'effet de ce médicament. Le zinc est très efficace pour cela. On ajoute deux gélules d'Effizinc dans le protocole. Toujours de manière empirique, on a ajouté du Singulair, utilisé chez les personnes asthmatiques, pour son rôle d'anti-inflammatoire sur les tissus interstitiels pulmonaires. Chez les formes sévères, on ajoute de l'héparine à faible dose, pour prévenir les thromboses, les phlébites et les embolies pulmonaires, fréquentes avec le coronavirus. Une des conditions sine qua non, c'est de démarrer ce traitement dès les premiers symptômes, pas d'attendre d'être en réanimation. »

Des résultats encourageants

Si le cocktail né de conversations sur le groupe Facebook « le Divan des Médecins », qui recense 13 600 praticiens, peut paraître difficile à comprendre pour les non-initiés, les résultats présentés par le trio semblent encourageants.

« Depuis quelques semaines, nous avons tous les trois prescrit ce traitement à tous nos patients atteints du coronavirus, explique Denis Gastaldi. Pour ma part, cela représente plus de 200 patients. J'ai eu seulement deux cas graves nécessitant une hospitalisation et qui sont sortis depuis. Évidemment, ce n'est pas une étude multicentrique et randomisée, mais ce sont des résultats très intéressants. Si on se fie aux données connues sur la maladie, sur, au minimum, 200 cas, on aurait dû avoir au moins deux décès et une quarantaine d'hospitalisations. »

Le docteur Gastaldi assure que sa patientèle se compose de malades de tous âges, pour certains avec des facteurs à risque supplémentaires (des comorbidités). Le docteur Erbstein, qui a dû déplorer six décès depuis le début de l'épidémie dans sa patientèle notamment composée d'anciens mineurs, expliquait dans l'Est Républicain : « Depuis quinze jours que j'expérimente cette formule, je n'ai plus ni décès ni hospitalisation ».

Conscients des limites de leur approche

En plus de l'absence d'étude évoquée par le praticien, le trio est parfaitement conscient des limites en termes de recherche de son approche. Les cas traités n'ont pas été testés positifs au Covid-19, contrairement à ce que met par exemple en place le professeur Raoult, et pour cause, les patients des cabinets de ville n'entrent pas dans les bénéficiaires des tests définis par la stratégie des autorités de santé.

Le Dr Gastaldi a lui-même été touché par le Covid-19, comme l'a confirmé un test sérologique qu'il a effectué depuis. Il s'est autoprescrit son protocole. « Je n'étais pas bien le vendredi et le lundi, je travaillais. Ce n'est peut-être pas dû au traitement, mais c'est le retour que me font presque tous les patients à qui je l'applique : au bout de trois jours, ils me disent qu'ils sont bien. »

Contrairement à l'hydroxychloroquine, dont des effets cardiaques sont rapportés, le médecin se montre rassurant sur le protocole expérimenté et espère qu'il se développera dans la communauté médicale : « L'azithromycine est largement prescrite tous les hivers chez les enfants et les adultes, sans effets secondaires. Il n'y a aucune raison de s'en priver dès les premiers symptômes. Ce serait formidable de sauver des vies! »

Un message plutôt adressé à ses confrères généralistes qu'une candidature pour un prix Nobel de médecine. « Ce n'est pas du tout notre rôle d'entrer dans un protocole de validation par les autorités, estime le médecin mosellan. Je vais vous dire, les études qui vont nous donner des résultats dans six mois, quand l'épidémie sera terminée, je m'en moque. Ce qui m'intéresse, ce sont mes patients. Forcément, cela rentrera dans un protocole à un moment donné, en revenant aux oreilles de spécialistes, mais il faut qu'on soit humbles. On est en Lorraine, en Moselle, dans le Nord, on essaie de faire notre boulot le mieux possible, pour qu'il y ait le moins de morts possible. »

Il y a deux messages importants dans cet article : le premier c'est que les pistes de traitement de covid-19 sont multiples, et en voici une qui est intéressante en termes de résultats, d'une part, et peut-être plus facilement personnalisable que l'approche chloroquine. Ce qui n'est pas rien. Les risques secondaires du traitement azithromycine associée sont faibles, et il est probable que ce traitement connaisse au moins son quart d'heure de célébrité. Et le second message, important, c'est que la liberté d'action des médecins est sans aucun doute possible le meilleur moyen d'accélérer la mise au point de méthodes favorisant une meilleure prise en charge de la santé. A l'abri du politique, et des medias, les professionnels peuvent exprimer la qualité de leurs savoirs au bénéfice de la collectivités et des individus.


Quand deux comploteurs se rencontrent ... ils se racontent des histoires de comploteurs. Et quand ils complotent l'un contre l'autre le comploteur devient le complotiste de l'autre. L'avantage pour les uns, et l'inconvénient pour nous, c'est que ça se mord la queue, et que le complot confine au mouvement perpétuel.


La crise due au nouveau coronavirus a été polluée
par de nombreuses infox s’appuyant sur des études
scientifiques incomplètes, bancales ou tronquées.
STR / AFP
Le Monde (08/04/2020) : Coronavirus : comment la rhétorique complotiste détourne la science en période d’épidémie

William Audureau

« Citoyens enquêteurs », militants extrémistes ou politiciens populistes citent des études scientifiques à l’appui de leurs propos parfois conspirationnistes.

Des références à une étude prépubliée puis retirée, un brevet biologique interprété de travers, ou encore des liens vers de pseudo-portails scientifiques au contenu orienté… Depuis le début de la crise sanitaire, d’innombrables faux articles et vidéos complotistes citent des études savantes à l’appui de leur démonstration. Et avec succès.
Très populaires sur les réseaux sociaux, ces messages ont rallié 26 % des Français à la thèse conspirationniste du virus créé en laboratoire, selon un sondage IFOP/Conspiracy Watch. « On est dans la pantomime de discours scientifiques sérieux. Et, pour beaucoup de gens, cela fait illusion », déplore Rudy Reichstadt, directeur de Conspiracy Watch, site d’information spécialisé dans la lutte contre le complotisme.

Prenons un exemple qui a largement circulé sur les réseaux sociaux et ailleurs : un vrai-faux journal télévisé, qui explique que le virus responsable du Covid-19 n’aurait rien de naturel, mais aurait été créé par un laboratoire financé par le milliardaire George Soros afin d’anéantir les populations chinoise et japonaise. Il convoque deux experts médicaux, une liste de brevets en génie biologique, et une étude pointue de 2007 sur l’enzyme humain auquelle s’accrochent les coronavirus.

Et si cette théorie fumeuse était accréditée par la science ? Il faut prendre le temps de creuser pour s’apercevoir que non : les spécialistes n’en sont pas ; les brevets montrés n’ont aucun rapport ; l’étude pointue a été lue de travers. Qu’importe, ce montage vidéo, mis en ligne par le site conspirationniste suisse d’extrême droite Kla.tv, a figuré, au début de mars, parmi les liens les plus partagés en France sur Facebook.

Un classique du complotisme…

La référence aux études scientifiques est une figure rhétorique classique des théories conspirationnistes, explique Marie Peltier, historienne et autrice d’Obsessions : dans les coulisses du récit complotiste (Inculte, 2018).

« Il s’agit pour les idéologues du complot à la fois de critiquer tous les discours d’autorité, notamment scientifiques, et en même temps de s’en servir pour discréditer les discours qui sont hostiles à leurs thèses. Le tout entraînant le lecteur dans un très grand nombre de références, souvent contradictoires, qui entretiennent un véritable doute paradigmatique. »

Julien Giry, docteur en science politique de l’université Rennes-I, fait remonter cette stratégie aux thèses complotistes apparues dans les années 1960, après l’assassinat de John Fitzgerald Kennedy, « avec des citations, des titres universitaires, des notes de bas de page »…

… revitalisé par l’explosion des prépublications

La grande nouveauté, c’est l’évolution récente de la pratique universitaire, avec sa course au nombre de publications et surtout l’explosion dans les années 2010 des plates-formes ouvertes, comme BioRxiv, où sont envoyés d’innombrables articles qui n’ont pas été validés par des pairs, comme l’exigent les revues à comité de lecture.

« On peut y mettre des études beaucoup moins solides et n’importe qui peut aller les chercher et les interpréter à sa manière, sans avoir la rigueur ou la compétence nécessaire pour distinguer une simple étude de quatre pages d’une analyse scientifique d’ampleur revue par les pairs », s’inquiète Alexandre Moatti, historien des sciences à l’université Paris-Diderot, auteur d’Alterscience : postures, dogmes, idéologies (Odile Jacob, 2013).

C’est ainsi qu’à la fin de janvier, sur le site BioRxiv, une préétude indienne sur des « insertions à la similitude étrange » entre le SARS-CoV-2 et le VIH (virus de l’immunodéficience humaine) a été repérée et mondialement reprise par la complosphère afin de promouvoir la thèse d’un virus créé en laboratoire. Elle a depuis été déjugée par les spécialistes et ses propres auteurs, mais continue d’être citée comme référence par les partisans de la thèse d’un virus de laboratoire.

Des experts qui gonflent leurs titres

Cette mobilisation de la science est en effet à sens unique. « Le savoir est exclusivement mis en avant quand il va dans le sens de la thèse voulue, constate Julien Giry. Le reste est écarté au prétexte que ce seraient des agents ou des idiots utiles du complot. Un tri est opéré. »

Les sites Internet et les chaînes YouTube conspirationnistes ont même leur propre carnet d’adresses d’experts qui pourraient approuver leurs thèses, dont la légitimité est volontiers exagérée. « Ces scientifiques hétérodoxes s’expriment en dehors de leur sphère d’expertise ou gonflent leurs titres. Ils sont présentés comme des génies visionnaires, alors que leurs positions sont souvent ultramarginales, voire inexistantes, dans le monde scientifique », précise M. Giry. C’est le cas d’Andrew Wakefield, figure antivaccin, qui est en réalité gastro-entérologue.

A contrario, un ennemi d’un jour peut se transformer en allié de circonstance. Ainsi, alors que les sphères conspirationnistes jettent habituellement l’anathème contre les médias télévisés mainstream, elles ont récemment repris un reportage de 2015 de la télévision italienne RAI sur des expériences de virologues chinois sur des chauves-souris.

« Comme toujours dans le complotisme, ce qu’on discrédite peut par ailleurs devenir un argument quand cela sert notre propre posture, résume Marie Peltier. C’est dans ce rapport d’ambivalence aux discours d’autorité que se niche l’un des nœuds des problèmes de désinformation actuels. »

Les bons scientifiques et les mauvais scientifiques

Cette rhétorique est d’autant plus sournoise que, au contraire d’une approche scientifique, elle laisse peu de place à la contradiction et au débat. Comme le formule avec humour Stephan Lewandowsky, professeur à l’université de Bristol :

« Un théoricien du complot reçoit [les preuves allant contre ses idées] comme les preuves d’une conspiration plus large (pour créer un gouvernement mondial ou que sais-je) qui implique le gouvernement, la justice, Soros, et toute personne qui a un jour été dans la même queue de supermarché qu’Al Gore dans les années 1970. »

Ces lectures orientées des travaux scientifiques s’adossent en effet souvent à une vision manichéenne du monde. « Il y a les bons scientifiques et les mauvais », ironise Rudy Reichstadt, qui s’étonne de la violence avec laquelle sont traitées sur les réseaux sociaux les personnes qui critiquent le professeur Didier Raoult, infectiologue décrié par ses pairs pour sa méthodologie, mais très populaire notamment chez certains théoriciens du complot. Ils sont accusés de faire partie d’un grand complot pharmaceutique, voire qualifiés de « scientifiques collabos », s’étrangle M. Reichstadt.

« Raoult est devenu l’homme providentiel pour beaucoup de personnes. Les gens disent qu’il a une solution, point. Il y a là une tentation antiscientifique. »

Des experts victimes de harcèlement en ligne

La rhétorique complotiste, revendicative, imperméable à la critique, semble avoir définitivement gangrené le débat public. Au point de donner lieu à des vagues d’intimidations décomplexées. En février, le compte Twitter du site conspirationniste d’extrême droite Zero Hedge avait été suspendu pour harcèlement. Il avait accusé un chercheur chinois de l’Institut de virologie de Wuhan d’avoir créé le virus responsable du Covid-19, publié ses informations personnelles et invité sa communauté à « lui rendre visite ».

En France, Karine Lacombe, une des multiples scientifiques ayant mis en garde contre le manque de preuves scientifiques de l’efficacité de l’hydroxychloroquine contre le Covid-19, a fait l’objet d’une campagne de harcèlement en ligne liée à ses liens d’intérêts avec des laboratoires pharmaceutiques. Elle a fini par fermer son compte Twitter.

Aux Etats-Unis, le docteur Anthony Fauci, directeur de l’Institut national des allergies et maladies infectieuses, est l’un des premiers à avoir sonné l’alarme et demandé des mesures de confinement d’urgence pour lutter contre le coronavirus – en dépit de la posture rassurante de Donald Trump. M. Fauci, qui est le principal conseiller sanitaire de l’administration américaine, a fait l’objet de multiples accusations à caractère complotiste sur les réseaux sociaux, rapporte le New York Times, et vit désormais sous protection.

« La science est dévoyée tous azimuts »

Derrière ces dérives, une réalité : l’activité complotiste est souvent portée par des objectifs politiques. Mi-mars, le porte-parole du ministère des affaires étrangères chinois, Zhao Lijian, partageait ainsi un lien vers Global Research, faux portail scientifique connu pour diffuser des théories du complot, parce qu’il servait la rhétorique antiaméricaine de la Chine. Pour Marie Peltier, « le complotisme est devenu une véritable arme politique et certains l’utilisent tout simplement à des fins mercantiles ou encore électoralistes ».

Certaines sphères sont spécialistes en la matière. Selon les chercheurs américains en biologie Jedidiah Carlson et Kelley Harris, l’extrême droite est la communauté non universitaire la plus active sur BioRxiv, et la plus influente dans la médiatisation et la décontextualisation d’études scientifiques. En France, les électeurs du Rassemblement national (RN, ex-Front national) sont les plus perméables aux théories du complot, et Marine Le Pen a récemment jugé « de bon sens » de questionner l’origine du virus.

Pour autant, le profil des conspirationnistes ne se réduit pas à un camp politique. « Les antivaccins, on en trouve aussi beaucoup à gauche », rappelle Alexandre Moatti à titre d’exemple. Il importe de distinguer deux types de démarche très différents, estime Julien Giry :

« Les groupes organisés d’extrême droite ont un savoir-faire et une expertise, presque une légitimité à diffuser des thèses complotistes. Mais il ne faut pas les mettre sur le même plan que ceux que j’appelle les “citoyens enquêteurs”, qui partent d’un événement donné, se posent des questions, ce qui est sain, et aboutissent à des hypothèses parfois complotistes. »

Le défi de la médiation scientifique

Entre les deux, un continuum existe, nourri en France d’un an et demi de tensions sociales, de « balkanisation » de l’information et de parole publique contestable. « On ne peut pas dire que le gouvernement est complotiste, mais lui aussi affirme des contre-vérités sous forme scientifique pour masquer une forme d’impéritie, quand il prétend qu’on n’a pas besoin de masques », rappelle Alexandre Moatti, désolé de constater qu’« en ce moment la science est dévoyée tous azimuts ».

Dès lors, quelle médiation scientifique opposer à ce détournement quasi généralisé de la science ? C’est toute la question, alors que l’ère du « tout vidéo » et les algorithmes sensationnalistes de YouTube sont un terreau propice aux montages racoleurs et mensongers. « Ces discours entrent en concurrence avec une vulgarisation scientifique de qualité. Mais il nous appartient à nous tous d’éduquer les gens à faire la différence entre les deux. Et des vidéos de vulgarisation scientifique très bien sur YouTube, cela existe aussi ! », rappelle M. Moatti. Et de citer l’intervention sur France Culture de l’infectiologue Didier Sicard à propos des origines animales du virus comme exemple de pédagogie.

« Les cas les plus extrêmes et caricaturaux ne sont personnellement pas ceux qui m’inquiètent le plus, car on peut relativement facilement les contredire par l’argumentation, estime Marie Peltier. La défiance, elle, ne se contredit pas aussi aisément. »

En appendice de ce qui figure dans cet article, il y a un chapitre qui me tarabuste : sans que ce ne soit forcément dit comme cela, ces jours-ci nous sommes remis devant une bataille rangée entre les médecins expérimentateurs et les médecins attachés à la médecine de la preuve.

Pour bien dire et simplement les choses, on voit une bataille rangée entre des experts, les médecins, éventuellement des chercheurs, qui ne sont pas nécessairement des docteurs en médecine, il y a également des politiques qui s'emparent du sujet, donc des médias, et du coup c'est l'ensemble du pays ou à peu près,
qui s'écharpe pour savoir s'il est normal ou pas de proposer un traitement qui serait bénéfique, mais comme on n'en a pas une preuve selon un protocole, sur lequel tout le monde n'est pas vraiment d'accord, etc etc etc.

Il me semble que dans un pays dont la culture est élevée, nous formons des docteurs en médecine, en pharmacologie, des chercheurs qui sont eux-mêmes des docteurs ou doctorants en quelque chose, il existe une bataille de chapelle qui trouve ses racines dans une rhétorique indigeste. Rhétorique semble t-il basée sur des prérogatives stériles.

Dans le cadre d'une maladie nouvelle, pour laquelle les patients n'ont pas d'immunité, les médecins n'ont pas de traitement existant, les chercheurs n'ont pas de piste de solution ... le pouvoir politique devrait être dans une maîtrise de la communication, les médias à l'unisson, pour permettre aux experts, les vrais, d'en découdre entre expérimentation et recherche de la preuve.

Là où les rhétoriques apparaissent, c'est à mon sens lorsque les experts se bouffent le nez entre eux pour dire que tel médecin, Raoult par exemple, ne peut pas prétendre exposer une approche expérimentale puisqu'il n'a pas la preuve de son expérimentation. Lui explique qu'il est en train de la construire cette preuve, et que ses premiers résultats montrent une bonne récupération, mesurée en charge virale, de patients dont les symptômes ne sont pas les plus graves.

Du coup il lui est renvoyé que tant que sa méthode ne montrera pas des résultats pour les patients les plus abimés, il ne sera pas crédible.

On n'en sort pas, puisqu'entre un médecin et d'autres, il se tient une querelle au travers de laquelle on demande que la preuve soit faite pour être en droit de la construire.

C'est à peu près mon analyse, et mon sentiment sur tout ça.

Et ce qui me chiffonne, c'est qu'en France on en soit seulement là, à ne pas être en mesure de permettre aux experts, aux spécialistes de faire sereinement leur boulot sans être éventuellement emmerdés par la presse et la classe politique, et qu'aucune autorité suffisante ne se fasse entendre pour ramener les brebis dans la bergerie. La presse et la classe politique faisant un certain bruit, les papillons, fussent-ils experts et voyant de la lumière viennent alors taper sur le carreau pour voir si l'herbe est verte. Il faudrait parvenir à retrouver très vite le calme et la sérénité.

Parce qu'au milieu de tout ça, il y a des patients qui crèvent, on l'aurait presqu'oublié. Le malade cramé, qui décède, lui il se fout pas mal de savoir la différence entre l'expérimentation et la preuve, juste que si on lui avait donné un traitement à temps, serait-il sauvé ou pas ?

Or la polémique dure depuis des semaines, et on trouve finalement après des semaines des médecins et chercheurs qui se renvoient la question de la médecine par la preuve, ou de la médecine par l'expérimentation ... là où personne n'a de proposition sérieuse pour éviter les morts, sauf peut-être l'expérimentateur, ce qui reste à prouver ... je ne prends pas parti ni pour ni contre. Ni pour ni contre sauf sur un point, la balle est forcément dans le camp de l'expérimentateur à défaut de disposer de savants. Les savants étant ceux qui connaissent des choses prouvées.

Mais je suis outré de constater que politiques, scientifiques et médecins soient à ce point incapables de respecter les humains au seul bénéfice des chiffres et de leur réputation pour bon nombre d'entre eux.

Et, parce que c'est là que je voulais en venir, qui doit-on considérer pour sérieux, nous les "gens", puisqu'on nous met devant des murs, qui jouent entre eux à se reconnaître comme des cuistres, des charlatans, des incompétents, des générateurs de rhétoriques mortifères ?

A cet instant, et à ce jour, j'en suis à me dire qu'il faut laisser le Pr Raoult faire ce qu'il fait, et faire bénéficier les gens qui peuvent de son traitement, ce qui n'est pas une pensée exotique, une bonne partie du corps médical le pense aussi. Qu'il avance jusqu'à ce qu'il soit montré que de meilleures pratiques peuvent avoir du succès, et si tant est que les siennes ne sont pas mortifères elles-mêmes (ce qui semble être montré par les résultats qu'il affiche dans ces statistiques les plus récentes, il n'y a pas de décès qui seraient dus à la chloroquine dans les patients traité,s, et suivis à l'IHU de Marseille ...).

Si j'ai ce point de vue, que je veux objectif, je suis bien emmerdé parce qu'il m'est important d'avoir une pensée rationnelle.

Quand des médecins, chercheurs, renvoient dans les gencives que Raoult ne fait qu'une médecine expérimentale, sous-entendu détestable, et que cela devrait être proscrit de nos jours ... à quoi ces gens font-ils référence en matière de nouvelles maladies ? Ont-ils compétence, mettons à un niveau philosophique, c'est à dire au-dessus de leur propre science, à nous imposer de ne pas tenter une médecine expérimentale là où une médecine de la preuve n'existe pas encore ?

Et pour finir, existe-il une décision, un cadre légal, ou un corpus reconnu qui ferait que la médecine expérimentale soit :

- pire qu'une autre si elle est respectueuse de protocoles intelligents ?
- interdite parce qu'on aurait démontré que les résultats n'étaient jamais avantageux lorsqu'on s'appuie sur l'expérimentation ?
- ....

N'y a t-il pas un complotisme à dire que la médecine expérimentale est par principe une hérésie, et que les résultats obtenus à l'IHU de Marseille ne prouvent rien puisqu'ils ne ramènent pas à la vie des patients en train de mourir ?

N'est-ce pas une technique complotiste ?



France 24 (10/04/2020) : Eurogroupe : accord des 27 sur une réponse économique commune face au coronavirus



Les pays de l'Union européenne sont finalement parvenus, jeudi, à un accord sur une réponse économique commune face au coronavirus. Le ministre français de l'Économie et des Finances, Bruno Le Maire, a salué un "excellent accord", qui comprend un plan de soutien d'environ 500 milliards d'euros. Le texte ne mentionne toutefois pas la création de "corona bonds".
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Les ministres européens des Finances sont parvenus, jeudi 9 avril, à un accord sur une réponse économique commune face à la pandémie de coronavirus. Un terrain d'entente a été trouvé avec les Pays-Bas, qui bloquaient les discussions depuis mardi.

Ce vaste plan porterait l'ensemble des mesures adoptées par l'Union européenne pour lutter contre les effets de la pandémie à 3 200 milliards d'euros, soit le plus important dans le monde. "La réunion s'est achevée sous les applaudissements des ministres", a annoncé sur Twitter le porte-parole du président de l'Eurogroupe, Mario Centeno. "Aujourd'hui, nous avons répondu à l'appel de nos citoyens en faveur d'une Europe qui protège" avec "des propositions audacieuses qui semblaient impossibles il y a à peine quelques semaines", a-t-il souligné.



FR NW SOT EUROGROUPE 1 00H

Le ministre français de l'Économie et des Finances, Bruno Le Maire, a salué un "excellent accord" incluant "500 milliards d'euros disponibles immédiatement" et "un fonds de relance à venir".
https://twitter.com/BrunoLeMaire/status/1248342002464428033?ref_src=twsrc%5Etfw%7Ctwcamp%5Etweetembed%7Ctwterm%5E1248342002464428033&ref_url=https%3A%2F%2Fwww.france24.com%2Ffr%2F20200409-eurogroupe-accord-des-27-sur-une-r%25C3%25A9ponse-%25C3%25A9conomique-commune-face-au-coronavirus
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Bruno Le Maire a déclaré un peu plus tard aux journalistes que l'Europe avait conclu le plus important plan économique de son histoire. "Tout le monde avait en tête que c'était soit un accord, soit le risque d'une dislocation européenne", a-t-il dit. "C'est un plan efficace, c'est un plan massif", a-t-il poursuivi.

Le ministre allemand des Finances, Olaf Scholz, a lui salué "un grand jour pour la solidarité européenne". "Il est important que nous tous apportions une réponse commune qui permette à nos États de surmonter les défis sanitaires mais aussi les défis économiques" suscités par la pandémie de Covid-19, a indiqué le ministre.

L'Italie, pays européen le plus touché par la pandémie avec plus de 18 000 morts, s'est aussi félicité de l'accord par la voix de son ministre de l'Économie, Roberto Gualtieri. Il a salué dans un tweet "une proposition ambitieuse", ajoutant que son pays "se battrait pour qu'elle se concrétise".

Trois axes principaux

Face à la pandémie, la réponse européenne doit s'orienter sur trois axes principaux : jusqu'à 240 milliards d'euros de prêts du Mécanisme européen de stabilité (MES, le fonds de secours de la zone euro), un fonds de garantie de 200 milliards d'euros pour les entreprises et jusqu'à 100 milliards pour soutenir le chômage partiel.

Les chefs d'État et de gouvernement, qui n'étaient eux-mêmes pas parvenus à s'entendre lors d'un sommet le 26 mars, devront encore valider ces propositions.

La question des "corona bonds" non tranchée

La brûlante question des "corona bonds", destinés à soutenir l'économie à plus long terme après la crise, considérée comme moins urgente, n'a pas été tranchée jeudi.

Les pays les plus affectés par le virus, en particulier l'Italie, réclament la création d'un "fonds" de relance qui puisse être financé par de la dette commune, sous la forme d'euro-obligations parfois appelées "corona bonds" ou "eurobonds". Or, la mutualisation des dettes constitue une ligne rouge pour Berlin et La Haye, qui refusent de s'inscrire dans une démarche commune avec les États très endettés du Sud, jugés laxistes dans leur gestion.

Tandis que Bruno Le Maire a dit jeudi que l'accord ouvrait la voie à de la dette commune, son homologue néerlandais Wopke Hoekstra a souligné le contraire. "Nous sommes et resteront opposés aux 'corona bonds'. Ce concept n'aidera ni l'Europe ni les Pays-Bas sur le long-terme", a dit le ministre néerlandais de l'Économie à l'issue des pourparlers.

Le texte final évoque un "fonds de relance" dont "les aspects juridiques et pratiques", notamment le "financement", devront encore être définis.

Soulagement

Ce consensus constitue un soulagement pour les Européens qui parviennent à afficher une unité face aux conséquences économiques désastreuses du virus, après des semaines d'atermoiements mettant en évidence une fracture entre les pays du Nord et ceux du Sud.

Une réponse unitaire était d'autant plus indispensable que l'économie européenne se dirige en 2020 vers une profonde récession, le Fonds monétaire international estimant même que le coronavirus pourrait engendrer au niveau mondial "les pires conséquences économiques depuis la Grande Dépression" de 1929.

Mercredi matin, après seize heures d'échanges stériles, La Haye avait été unanimement critiquée pour son inflexibilité, un blocage qualifié de "contreproductif" et "incompréhensible" par Paris. Les États membres reprochaient aux Pays-Bas (soutenus, selon une source européenne, par l'Autriche, la Suède et le Danemark) de bloquer l'activation du Mécanisme européen de stabilité (MES), en conditionnant strictement les prêts que pourrait octroyer ce fonds de secours de la zone euro à des réformes économiques.

Une telle "conditionnalité", qui renverrait à l'époque où la Grèce avait été contrainte de mettre en œuvre des réformes parfois douloureuses en échange d'argent frais, aurait été vécue comme une humiliation par l'Italie et l'Espagne, les deux pays européens pour l'instant les plus touchés par l'épidémie.

Créé en 2012 lors de la crise de la dette et financé par les États membres, le MES pourrait prêter aux États jusqu'à 2 % de leur PIB, soit jusqu'à 240 milliards d'euros pour l'ensemble de la zone euro.

En ce qui concerne la France, Bruno Le Maire a déclaré vendredi matin sur Europe 1 que l'État était prêt à consacrer 20 milliards d’euros pour recapitaliser les entreprises publiques ou privées mises en difficulté par la crise, comme la compagnie Air France-KLM.

Beaucoup, beaucoup d'argent, sans garantie sérieuse qu'une partie précise soit attribuée à la crise covid-19 elle-même. Cette crise renvoie à des ressources financières nécessaires à la recherche, aux soins, à la mise à disposition de fournitures, d'équipements, à la prise en charge si besoin des traitements pharmaceutiques, mais surtout hospitaliers, lourds ...

Le plan s'ajoute aux autres accords, portant l'ensemble des mesures validées dans le cadre covid-19 à 3.200 milliards d'euros d'engagements. C'est considérable. Un montant supérieur au PIB de la France. La France est d'ailleurs contributrice à hauteur d'un quart de son PIB dans cette enveloppe globale. Ce qui était prévisible. Mais là où on se pose des questions, c'est sur les affectations qui sont floues, et ce sont des engagements financiers qui n'ont pas été, dans le cas de la France, portés par des débats parlementaires. Il est possible qu'une telle situation ne soit jamais arrivée depuis Louis XIV ! Et encore ça reste à vérifier.


 

Le patron du Medef exige que nous repartions en
suivant les yeux fermés les recettes patronales
les plus éculées. Christophe Ena/AP/SIPA

Challenges (12/04/2020) : Quand le président du Medef Geoffroy Roux de Bézieux se caricature tout seul

Maurice Szafran et Nicolas Domenach

Le chef de l’Etat l’a dit avec clarté: "Rien ne sera plus comme avant". Geoffroy Roux de Bézieux n’a-t-il ni écouté ni entendu Emmanuel Macron? Pas plus qu’il n’a prêté l’oreille aux manifestations de reconnaissance populaires envers les "combattants du front"?

Rêvons un instant… Geoffroy Roux de Bézieux, le président du Medef, conscient de la gravité de la crise que le pays traverse, donne une grande interview au Figaro -le quotidien de la droite bourgeoise et du monde des affaires- où il en appelle à "sortir au plus vite du confinement grâce à un Grenelle social dans l'intérêt même du pays". On imagine le choc provoqué, on n'ose dire l'enthousiasme mobilisateur des commentateurs les plus éclairés: "Enfin le patronat montre qu'il a compris l'impérieuse nécessité de sortir de son prêt-à-penser libéral". Ou encore "Geoffroy Roux de Bézieux n'a pas que les yeux bleus, il a des idées justes et il a vu que les fractures profondes de la France s'étaient aggravées encore avec cette pandémie mortifère". En suivant ce nouveau "patron des patrons", les chefs d'entreprise montrent qu'ils sont de véritables "chefs de cordée", qu'ils vont enfin tirer la Nation vers plus de justice pour lui éviter de sombrer". Las… Ce ne fut pas un rêve, mais une sorte de cauchemar.

Si le patron des patrons a bien accordé une interview au Figaro, s'il en a appelé solennellement à un plan de relance, "à une reprise maintenant", il s'est lui-même caricaturé. Comme s'il n'avait rien entendu, rien vu, exigeant que nous repartions tous en suivant les yeux fermés les recettes patronales les plus éculées: "soutien de l'Etat aux investissements des entreprises, baisse des impôts de production, augmentation du temps de travail, réduction des congés". Et le président du Medef de conclure, business as usual: "L'urgence, c'est de revenir à une activité normale"! Conclusion absurde: l'épreuve que nous subissons collectivement n'impliquerait pas de revisiter les "fondamentaux" et, notamment, la place symbolique (et donc salariale) de tous ceux qui permettent à la société de tenir le choc, à commencer par ces innombrables "premiers de corvée" que la société ne pourra plus (mal)traiter tant les Français désormais les applaudissent.

Une France fracturée

Le chef de l'Etat l'a dit pourtant avec clarté: "Rien ne sera plus comme avant". Et de privilégier -courageusement pour un président qu'une grande partie de l'opinion publique tient à tort ou à raison pour celui des "riches"- la santé sur l'économie, l'homme plutôt que le marché. Geoffroy Roux de Bézieux n'aurait-il ni écouté ni entendu Emmanuel Macron? Pas plus qu'il n'a prêté l'oreille aux manifestations de reconnaissance populaires envers ces "combattants du front", les blouses blanches -médecins et infirmières- mais aussi aides-soignantes, personnels d'entretien, caissières, livreurs, routiers, ouvriers... particulièrement exposés. Sans négliger, bien sûr, les patrons de PME et de TPE qui font tout pour maintenir leurs entreprises à flots.

Depuis le choc du coronavirus, une fracture s'est encore creusée. D'un côté, des travailleurs anonymes, dont une partie fut gilets jaunes, qui assurent les activités indispensables à la collectivité et prennent ainsi des risques; de l'autre, en seconde ligne pourrait-on arguer, les "confinés", souvent des cadres qui contribuent eux aussi, depuis leur domicile et en télétravail, à ce que l'économie ne sombre pas tout à fait. Mais ceux-là, admettons-le, sont plus "conforts", sinon plus tranquilles. A l'abri, contrairement à tous les exposés précités, sans oublier les démunis, reclus, eux, dans des conditions souvent éprouvantes. Deux France, voire trois, qu'on ne peut traiter comme si rien ne s'était passé.

Une note récente de la fondation Jean Jaurès(1) décrit avec force détails cette réalité économique et sociale. Les auteurs soulignent à juste titre que cette catastrophe a accentué (ou fait apparaître) des précarités ainsi que des oppositions nouvelles. Ces oppositions, en sortie de crise, pourraient tourner à l’affrontement si l’ensemble des responsables -responsables politiques et syndicaux en particulier- n’y prennent garde. Car, une fois encore, les plus précaires vont très probablement subir les chocs à venir, licenciements ou baisses de salaires, alors même qu’ils devraient être reconnus, récompensés, et pas seulement en monnaie sonnante, trébuchante.

"Grenelle en faveur des bas salaires"

Libéral tempéré, l’essayiste (et conseiller des grands patrons) Alain Minc le dit avec force, avec justesse, dans une interview accordée à L’Express: "On a réinventé un clivage de classe entre les gens qui exercent un travail physique et ceux qui peuvent télétravailler." Parmi ces derniers, ce n’est pas par définition tout beau tout rose; des difficultés et des questionnements inédits se posent déjà parmi ceux qui télétravaillent: les limites entre privé et professionnel, la rétribution du matériel ou les remboursements des espaces "personnels" occupés à titre professionnel, et ainsi de suite. Et ce n’est pas exclusif d’autres interrogations: comment encadrer des salariés qui sont "au front" quant ceux qui télétravaillent pourraient apparaître "planqués"?

Oui, il y a bien deux France aujourd’hui, et peut-être même trois, pour peu qu’on veuille bien y adjoindre celle des sans-emploi, sans-toit, sans futur. Écoutons donc Minc, qui n’est pas un boutefeu, loin de là: "c’est un Grenelle en faveur des bas salaires qui s’impose". Pour le moins! Car ce n’est pas une prime ou quelques menues gratifications qui suffiront à apaiser l’ulcération sociale, à satisfaire la quête de reconnaissance de travaux mésestimés et, par définition, mal payés. Ceux qui, jusqu’ici, marchaient à l’ombre ont de facto renversé la hiérarchie des valeurs consacrées. Comment dire aujourd’hui sans toute honte bue que ceux qui "prennent des risques", ce sont les financiers? Et le président du Medef voudrait les faire travailler davantage, ces forçats du coronavirus? Au moment précis où il devrait répondre à une autre question, essentielle celle-là: comment les faire travailler mieux, et avec quelles reconnaissances?

Baisse de rémunération du capital au profit du travail

Sans doute cette réponse n’appartient-elle pas qu’au seul patronat. Ce sera aussi au pouvoir politique d’inventer une réponse "disruptive" puisqu’il n’a pas hésité à utiliser des mots et des concepts forts depuis le déclenchement de cette catastrophe. Ne serait-ce que s’il veut, pourquoi en douter d’ailleurs, renforcer la paix sociale et faire refluer la progression jusque-là inexorable de l’extrême droite parmi les délaissés, les oubliés, de la mondialisation. Il est plus que temps de leur offrir des perspectives, de leur manifester des gestes cohérents, forts, de considération. Sans s’arrêter aux éternelles protestations de ces dirigeants patronaux –pas tous!- qui argueront "que nous allons perdre en compétitivité si nous augmentons les rémunérations".

"Foutaises, réplique Alain Minc, pourtant point inscrit à la CGT. Les mêmes problèmes se posent dans tous les pays, et tout le monde passera par cette revalorisation des bas salaires." Mais gare! Comme on le voit avec le patron du Medef et tous ses relais dans les médias, nous sommes sur le point de retrouver la logique mortifère qui avait fini par s’imposer à Nicolas Sarkozy après la crise financière de 2009: sous prétexte de relancer la machine plus efficacement, il faudrait repartir comme avant, mieux -ou pire- donner plus de latitude et de largesses au... "capital". Pourtant il faudra bien que ce fameux "capital" en passe par une baisse de ses rémunérations au profit du travail. Autrement dit, si Emmanuel Macron entend que "ça reparte vraiment", et pourquoi répétons-le ne le voudrait-il pas, il lui faudra à l’exemple du général De Gaulle, faire plier le patronat. L’archéo-patronat…

Challenges va finir par être une lecture pour centristes convenus exprimant le désarroi qui peut être celui de tout le monde devant la mentalité décérébrée de d'idiots inutiles, de récipiendaires de mandats devenus cons avec le pouvoir de missions qu'ils ne comprennent pas.

Roux de Bézieux est une sorte de crétin qui a été utile, il y a un temps, pour prendre le relai à la tête du Medef, mais on savait d'avance qu'il n'était pas accessible au contrat social. Il a pris au fil des années une réputation de brute mentale, nourrie à une sportivité réelle, mais qui visiblement n'oxygène pas assez la partie haute du personnage.

Venir souffler sur les braises encore chaudes des incinérateurs qui ne désemplissent pas est une faute ... humaine, il n'y a pas de raison de lui convenir un petit périmètre. Roux de Bézieux est grand, immense dans sa manière de croire candidement que pour cultiver notre jardin il est nécessaire de remettre l'esclavage à l'heure de notre temps.

Qu'il aille se faire foutre, et jusqu'à ce qu'il comprenne qu'il n'est pas bienvenu même dans son pays avec cet éclairage de son esprit, il faudrait au moins l'ignorer, au mieux lui faire sentir qu'il ne peut commander au temps qui le dépasse. Ce qui instaure, pour moi, un boycott ferme et définitif de tout ce qui peut rejoindre ses propres intérêts à lui personnellement.

Donc c'était l'article hors sujet par rapport à la pandémie ... ben non en fait. C'est en plein dans le cadre de la pandémie. Il y a des gens qui profitent de la pandémie pour se dire que ça vaut peut-être le coup de tirer les marrons du feu, pendant que le plus grand nombre souffre, il y a peut-être moyen d'aller vider les troncs dans les églises.

Je ne crois pas d'une manière générale à l'existence de salauds de pauvres, pas plus qu'à celle de salauds de riches, mais des salauds ça existe. Le Medef serait bien inspiré de prendre un dirigeant à la hauteur.



GRECO (09/01/2020) : Cinquième cycle d'évaluation : Prévention de la corruption et promotion de l’intégrité au sein des gouvernements centraux (hautes fonctions de l’exécutif) et des services répressifs

Le document est à consulter sur le site directement, en cliquant sur le titre lien.

Voici un document intéressant à plus d'un titre. C'est un peu "consistant", mais il y a des chapitres particulièrement intructifs.

Le GRECO ... c'est une structure émanant de la Communauté Européenne : Groupe d'Etats contre la corruption. Cet organisme est désormais chargé de couvrir un observatoire sur la corruption et les conflits d'intérêts dans le cadre de l'administration des Etats pour 50 pays membres. Dont, et particulièrement, les Etats membres du Conseil de l'Europe qui l'a institué.

Le document mentionné ici est le cahier adopté concernant le seul chapitre des hautes instances de la gouvernance, de la présidence et des institutions françaises. Autant dire qu'il s'agit pour le GRECO de dire, avec bienveillance, quand il faut apprendre au petit enfant à se moucher le nez.

Pour prendre un certain plaisir à lire ce document, il faut le parcourir comme un documentaire, avec des thèmes qui se lisent plutôt rapidement, et une petite conclusion ... des recommandations à la fin de chaque thème. Et puis tout à la fin une liste de recommandations pour faire la synthèse de l'audit, car il s'agit bien d'un audit.

Je fais pas de commentaire, ici, mais il y a de vraies pépites dans ce roman, pardon ce travail. Où la France montre qu'elle a du poil aux pattes en matière de corruption et de conflits d'intérêts, avec des risques qui couvrent à peu près tout, depuis les fonctionnaires de la sécurité et de l'ordre public, jusqu'au sommet de l'Etat. Bien entedu, il n'est pas question dans le rapport de stigmatiser des personnes, mais plutôt d'expliquer ce qui ne va pas bien dans l'organisation. Charge aux intéressés ... nous les françaises et les français, de vérifier l'année suivante qu'on fait des progrès en haut lieu ou pas.

Oui, parce que les intéressés du travail du GRECO, c'est avant tout les employeurs des dirigeants de l'Etat, des hauts-fonctionnaires et de tout l'appareil d'Etat qui fait que la France est un pays. C'est à dire nous ! Nous sommes les bénéficiaires de ce qui nous appartient et nous devons, de temps en temps, passer un coup de chiffon pour enlever la poussière.

Donc, à temps choisi, lisez le rapport du GRECO pour la France, et vous serez éventuellement mieux armés pour questionner vos élus.

Ah, ben voilà un article qui est hors sujet avec la pandémie.

Non ? Ah ben oui. Non. Effectivement, ce rapport du GRECO, c'est passionnant, parce que les auditeurs, je connais bien le principe et la manière procéder dans les audits, ces auditeurs ont mis en place une grille de lecture qui est redoutable. Elle permet d'évaluer les travers possibles face à la bonne gestion des affaires de l'Etat.

Et il se trouve que la méthode qui permet de penser la bonne gestion implique que tous les pouvoirs disposent de moyens de vérification et de contre-pouvoirs conduisant à éviter la gestion arbitraire.

Et il se trouve que les situations normales de gestion des affaires doivent, devraient appliquer des procédures qui activent les vérifications et les contre-pouvoirs. Et c'est étonnant comme en ce moment nous vivons sous le régime d'un état anormal, psuique nous sommes en état d'urgence, en gestion de crise, avec une maximisation des décisions prises sans contrôle.

Qu'une telle situation perdure un tant soit peu, les risques liés à la corruption et à la survenance de conflits d'intérêts, dont on nous avait habitués à détecter l'évidence en temps normal, ces risques deviennent très importants. Cela peut relever de choses mineures bien sûr. Gère-t-on les stocks de masques selon les meilleures pratiques et les usages en matière d'appels d'offre ? Chaque commande relève t-elle d'un circuit de décision arbitré ? Et chaque commande est-elle acheminée et consommée selon l'exacte destination prévue à son origine ?

J'ai la réponse, et comme je ne veux blesser personne, je vais la garder pour moi.

Les masques c'est une chose. Il y a aussi les affectations budgétaires décidées en urgence, et pour lesquelles on s'apercevra à postériori que peu de cas a été fait d'en former les amendements budgétaires et d'en respecter les termes. Le budget de l'Etat est actuellement modifié en continu, quotidiennement, et la version utilisée un jour est obsolète le lendemain, gestion de crise oblige.

Sauf que les circuits d'évaulation et de validation n'existent plus. Tout simplement. Pour une partie devenue très significative du budget de l'Etat, on pourra utilement interroger son député, si il est présent ou disponible à distance, je vous fiche mon billet qu'il ne saura pas vous dire où on est sur tel ou tel poste budgétaire, parce que le peuple français pas plus que les députés qui le représente ne sont informés en détail des "emplois" budgétaires.

A terme les difficultés à juger de la sincérité des comptes publics, et accessoirement les possibles "arrangements" faits avec la légalité des dépenses ne manqueront pas d'exister. Et le GRECO nous servira peut-être une notice sévère dans un an ou deux.


Coronavirus au États-Unis
Trump aurait-il pu agir dès janvier ?
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NORTH AMERICA / Getty Images via AFP

Les États-Unis, devenu le pays qui compte le plus de morts du Covid-19, sont agités par une polémique concernant une réaction jugée pas assez rapide des autorités fédérales face à la pandémie de coronavirus. Car malgré les mensonges de la Chine, les agences de renseignement américaines ont alerté le président dès la première semaine de janvier.

À deux reprises en janvier le ministre de la Santé a tenté d’en faire de même auprès de Donald Trump , mais ce dernier s’était agacé de voir son ministre si alarmiste. Dès la fin janvier, son principal conseiller économique concluait dans une note que si rien n’était fait, un demi-million d’Américains allaient mourir, et ça coûterait des milliers de milliards à l’économie.

Donald Trump avait alors restreint les voyages avec la Chine, mais jusqu’au 10 mars il a minimisé la crise pour apaiser les marchés financiers. Des animateurs de Fox News répétaient avec sarcasme que les inquiétudes de l’opposition et de la presse n’étaient qu’une tentative pour empêcher le président d’être réélu.

Le docteur Anthony Fauci, qui dirige l’Institut national des maladies infectieuses vient d’admettre de son côté que si des mesures avaient été prises plus tôt, beaucoup de vies auraient été sauvées. Donald Trump en est furieux, et vient de retweeter un message appelant à virer le scientifique devenu une célébrité ces dernières semaines.

Un petit coup d'oeil rapide sur nos amis d'en face ... la situation est vraiment pesante. Les décisions foireuses d'un président conduisent le pays dans un chaos vraiment considérable.

Désormais, les américains constatent que les populations les plus pauvres sont les premières les plus atteintes, par la maladie, et les décès en nombre dans des quartiers où vivent les gens soumis à l'exigence impérative du travail pour manger au quotidien. Le chômage atteint toute la population ouvrière des Etats-Unis.

Trump a fini par demander les services d'Anthony Fauci pour servir de faire-valoir sur la covid-19. Le docteur Fauci semble être à la fois compétent, diplomate avec le président, et capable de tenir tête pour obtenir des décisions un peu moins catastrophiques.

Mais voilà Trump se sent moins inondé par la lumière, vu qu'il a un contradicteur sur le sujet du moment. Donc Trump veut gérer la pandémie en virant son conseiller pandémie. Comme ça la pandémie peut disparaître de son smartphone et les gens peuvent retourner travailler.

On a beau dire, Trump est un gros salaud, une vérole, et il n'y a rien à excuser dans tout ce qui concerne sa personne. C'est un cas pathétique, un grand malade, genre pervers narcissique qui décime à la sulfateuse, bref, passons.

Nous on a pas le modèle américain. C'est plus fin, presque délicat, l'empoisonneur façon Renaissance, méthode petites burettes. Sont pas fatigués de jouer aux grands ces gens-là ?



Pâtes, farine et papier toilette occupent le premier rang des préoccupations de bien des ménages durant le confinement nécessaire à l'enrayement de la pandémie de coronavirus. Mais bon nombre d'Américains, fidèles à leur triste réputation, se sont aussi rués sur les armes à feu. Alyssa Milano s'en est publiquement émue... et s'est fait tacler par un confrère.

En prenant position publiquement sur la question des armes à feu, révoltée que ses compatriotes se soient massivement empressés de faire le plein de flingues et de munitions face à la menace du coronavirus (qui ne craint pourtant pas les balles...), Alyssa Milano devait s'attendre à subir la riposte des partisans - et ils sont nombreux - du fameux 2e amendement de la Consitution. Elle n'a pas tardé...

Tout à son confinement, l'actrice de 47 ans a constaté avec dépit que les Américains ont acheté en mars 2020 plus de 2 millions d'armes à feu, soit le double par rapport à l'année passée à la même période. "Il faut que nous garantissions la sécurité de tous par la distanciation sociale et en nous lavant les mains, pas en ramenant des armes dangereuses dans nos foyers", a objecté l'ex-sorcière de la série Charmed, publiant sur Twitter une vidéo accompagnée des hashtags #StopTheCoronavirusGunSurge #NoRA ("Stop à l'essor des armes à feu du coronavirus " et "Non à la National Rifle Association" - NRA -, l'influent lobby des armes aux Etats-Unis).

Activiste sur tous les fronts (auprès de la PETA, pour l'accès aux soins médicaux, pour la cause féminine...), Alyssa Milano, qui fut l'une des personnalités à l'initiative du mouvement MeToo, a enregistré un message filmé qu'elle a partagé sur les réseaux sociaux : "Je sais que nous sommes tous inquiets et stressés en ces temps troublés, dit celle qui est mère de deux enfants avec son mari David Bugliari. Mais c'est précisément pour cette raison que le fait de faire des stocks d'armes à feu pourrait avoir des conséquence désastreuses, pour notre propre sécurité et pour celle de notre entourage. Vous savez, les armes que les gens achètent aujourd'hui risquent d'être utilisées demain dans des maisons, des écoles, des églises, des bars et dans nos rues. Il faut que nous prenions soin les uns des autres. Alors s'il vous plaît, par pitié, partagez cette vidéo pour faire cesser l'essor des armes à feu lié au coronavirus. Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre des vies à cause des armes pendant cette pandémie ni quand elle sera finie."

James Woods en sniper sur Twitter

Des paroles a priori pleines de bons sens, alors que les armes à feu et fusillades sauvages sont responsables de milliers de morts par an aux Etats-Unis. Elles ont pourtant réveillé la fureur de tous ceux pour qui attaquer le sacro-saint droit constitutionnel à assurer sa propre protection en se dotant d'armes est un crime, à commencer par un célèbre acteur, notoirement pro-NRA : James Woods.

Presque aussi connu pour ses positions politiques conservatrices et complotistes que pour ses rôles à l'écran (de Virgin Suicides à la série Shark), l'acteur américain de 72 ans a répondu au tweet d'Alyssa Milano avec sarcasme : "Merci pour l'info. Quand les pillages commenceront, il faudra être prêts. Faites le plein de munitions !", a-t-il répliqué avec cynisme, ajoutant son nom à la longue salves des réponses hostiles qu'a reçues l'actrice. Dont, parmi celles-ci, certaines épinglant son opportunisme en lui rappelant qu'elle-même possède des armes à feu : "Oui, nous avons deux armes chez nous, avait-elle ainsi admis dans de précédentes déclarations. Ce n'est pas un scoop. J'adhère au 2e amendement. Je suis aussi d'accord avec 90% des Américains qui veulent des lois plus strictes en matière d'armes à feu. Et je crois qu'il devrait être impossible pour certaines personnes d'avoir certaines armes entre les mains."

En 2018, elle avait toutefois défilé avec son fils Milo dans les rues de Los Angeles lors d'une manifestation contre les armes à feu.
https://twitter.com/RealJamesWoods/status/1248373070437347329?ref_src=twsrc%5Etfw%7Ctwcamp%5Etweetembed%7Ctwterm%5E1248373070437347329&ref_url=https%3A%2F%2Fwww.purepeople.com%2Farticle%2Falyssa-milano-s-agace-des-provisions-d-armes-a-feu-james-woods-la-flingue_a383858%2F1
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Si vous connaissez pas James Wood, vous êtes pas obligés de changer d'habitude, et si vous tombez sur quelque chose qui peut lui être bénéfique choisissez autre chose. Boycott définitf chez moi.

James Wood est d'ailleurs un cas intéressant de converti. Il était démocrate, il est devenu républicain. A la suite, explique t-il de l'affaire Lewinski. Je suis d'accord pour dire que l'affaire Levinski n'honore pas Bill Clinton, mais virer républiain faut avoir la vocation. James Wood est simplement devenu un vieux con. Il faut dire les choses telles qu'elles sont. Et Alyssa Milano mérite qu'on la soutienne dans la lutte contre la NRA.

Deux millions d'armes vendues en un seul mois ! Ce sont des milliers de personnes en plus qui seront victimes d'armes à feu dans les mois qui viennent. La NRA, les armes à feu, à ce jour tuent autant que SARS-Cov2 sur une année aux USA. Le virus est en train de prendre de l'avance.

Mais au retour de temps plus calmes ... James Wood explique "quand commenceront les pillages" ... tout un état d'esprit. La gestion du pays sous le mandat Trump se résume donc, pour les américains, à covid vs NRA ?

Impressionnant.


Donald Trump lors de son point presse quotidien à la
Maison Blanche le 10 avril 2020. REUTERS/Yuri Gripas
RFI (11/04/2020) : Coronavirus: les points presse de Trump inquiètent de plus en plus ses conseillers

Avec Anne Corpet

Ce vendredi, le président américain a une nouvelle fois réitéré son souhait de voir l’économie repartir, sans toutefois donner de date précise pour une levée éventuelle des mesures de précaution. Les experts s’inquiètent d’une telle perspective qui risquerait de relancer la pandémie, déjà loin d’être jugulée aux Etats-Unis.

Donald Trump se félicite de la réussite de la politique de confinement menée par les Etats américains. Chaque jour, le président affiche sa confiance et son optimisme lors de son point de presse, et ses déclarations commencent à inquiéter jusqu'à son entourage.

Le président tient quotidiennement des points presse pour tenir les Américains informés de l’avancée de la pandémie, mais ce rendez-vous peut durer plus de deux heures, car privé de meetings électoraux, il profite de cette tribune pour conspuer les démocrates, blâmer les médias, et parfois contredire les analyses des experts sur le coronavirus.

Donald Trump a ainsi déclaré ce vendredi souhaiter un redémarrage rapide de l’économie tandis qu’à la même tribune, le docteur Anthony Fauci ne cesse d’expliquer qu’il faut absolument maintenir les mesures de confinement.

Des performances contre-productives

Dans un éditorial cette semaine, le Wall Street Journal, pourtant jugé peu hostile au président, a suggéré que Donald Trump limite ses apparitions publiques. Selon le New York Times, l’entourage du président à la Maison Blanche et quelques-uns de ses plus proches alliés républicains jugent aussi ses performances quotidiennes contre-productives.

« Le message du président est noyé », s’est inquiété le sénateur Lindsey Graham, l'un des plus fidèle allié du milliardaire, qui préconise une conférence de presse hebdomadaire plutôt qu’un point quotidien. Mais Donald Trump, lui, se vante sur Twitter des audiences réalisées lors de ces points presse. Même si certaines chaînes de télévision interrompent régulièrement leur diffusion.

Trump fait des points presse de deux plombes tous les jours, les medias font passer de la pub en plein milieu. Le bateau coule pendant que la maison brûle ! C'est "Titanic amer" en fait.


Equateur: A Nigeria, quartier de Guayaquil, la faim
effraie plus que virus © AFP / Jose Sanchez LINDAO
Le Point (14/04/2020) : Equateur: A Nigeria, quartier de Guayaquil, la faim effraie plus que virus

Chaque jour, au moment du couvre-feu, s'engage une course-poursuite entre policiers et habitants, réticents à s'entasser dans leurs masures. Personne à Nigeria, bidonville de Guayaquil, épicentre de la pandémie en Equateur, n'applique les recommandations pour se protéger du covid-19.

Dans ce quartier misérable, où le confinement est synonyme de plus de pauvreté, donc de faim, la contagion semble un mal mineur.

"Les autorités disent aux gens +restez chez vous+, mais ne voient pas plus loin. Nous étions dans le besoin avant, et maintenant c'est pire !", déplore Washington Angulo, 48 ans, leader de cette communauté d'Afro-Equatoriens qui vit là depuis les années 80.

La tension est à son comble à 14h, début du couvre-feu de 15 heures décrété par le gouvernement pour freiner la pandémie. Commence alors un terrible jeu de chat et souris.

"Les policiers sont intervenus à coups de matraque, poursuivant les gens, cognant, entrant dans les maisons. Mais comment peut-on dire à un pauvre de rester chez lui quand il n'a pas de quoi manger ?", dénonce Carlos Valencia, 35 ans.

Les plaintes contre des abus des forces de l'ordre se sont multipliées sur les réseaux sociaux. Mais cet enseignant admet qu'à peine la police a-t-elle tourné le dos, les habitants ressortent dans les rues. Puis courent se réfugier chez eux dès qu'elle réapparaît.

Sans protection

Nigeria, où vivent 8.000 familles, borde l'estuaire du Mogollon, un des bras de mer du port de Guayaquil, capitale économique de l'Equateur sur la côte Pacifique et une des villes d'Amérique latine les plus affectées par la pandémie.

Le pays compte plus de 7.500 cas confirmés du nouveau coronavirus, dont au moins 355 morts depuis le 29 février. La province de Guayas, dont Guayaquil est le chef-lieu, concentre 72 % des cas, selon les autorités.

Mais les habitants du bidonville, où aucune contamination n'a été répertoriée, sont à peine au courant de la tragédie affectant de nombreux habitants, contraints de garder leurs morts pendant des jours, du fait de l'effondrement du secteur hospitalier et des services funéraires.

Les hommes discutent aux coins des rues ou disputent un match de foot dans les ruelles. Les femmes se promènent au bord de l'eau. Des enfants jouent aux billes.

Personne ne porte de masque. La distanciation sociale n'existe pas et les gens se serrent encore la main pour se saluer, a observé une équipe de l'AFP.

Plusieurs familles se partagent de précaires logements aux toits de tôle. La chaleur flirte avec les 32 degrés. Pas de ventilateur, encore moins d'air conditionné. Juste une télévision pour combattre l'ennui du désoeuvrement.

Réfrigérateurs vides

Ces afro-descendants, originaires de la province d'Esmeraldas (nord), ont échoué à Nigeria trompés par des trafiquants de terrains.

Vendeurs ambulants, recycleurs de déchets, cuisiniers... la pandémie a laissé la majorité d'entre eux sans travail.

Les autorités tentent de pallier l'urgence en distribuant des sacs de nourriture, grâce aux dons d'entreprises privées.

"Du thon, des pâtes, ça ne suffit pas. Il n'y a même pas un peu de viande ou de fromage. La nourriture fraîche n'arrive pas jusqu'ici. C'est dur", ajoute M. Angulo.

D'autres n'ont rien reçu. Marcial Vernaza, 61 ans, sort furieux sur le pas de sa porte: "Ouvrez le frigo, il n'y a que de la glace. Je n'ai rien". Même le riz aux oeufs frits, plat habituel à Nigeria, n'a plus cours, le prix des oeufs ayant plus que doublé, selon ce père de famille, sans travail depuis un an.

Face à la paralysie économique causée par la pandémie, le gouvernement verse 60 dollars d'allocation aux familles les plus pauvres.

Fulton Ordoñez, rendu boiteux par une poliomyélite lorsqu'il était enfant et qui survit dans une cabane de planches, l'attend encore.

"J'ai peur qu'on m'expulse", dit cet homme de 52 ans. Le virus ne fait pas partie de ses préoccupations.

La situation en Equateur est particulièrement dramatique. L'hécatombe est ici la pire qu'on ait pu voir depuis le début de l'année. A Guayaquil on a ramassé les cadavres dans les rues. A la pandémie s'ajoute la désorganisation complète de toute l'économie du quotidien. A la pauvreté s'ajoute l'impossibilité de sortir du périmètre de certains quartiers, simplement parce que les quartiers voisins sont aussi démunis, face à la crise.

Cet article, qui parle du quartie Nigeria, est le reflet d'une situation extrême, dans un pays assez lointain pour ne rien pouvoir y faire. A Guayaquil on sait qu'il y a au moins cinq, six mile cas, peut-être plus, aucune donnée validée n'est parvenue à remonter vers l'OMS sur le nombre de morts.

Il est vrai que pour certains pays les choses sont bien plus rudes qu'ailleurs.

La situation de l'Equateur est attristante. On en retire une information qui s'ajoute aux autres. Le virus ne craint pas spécialement la chaleur. Ce qui peut laisser penser que la venue de l'été dans l'hémisphère nord n'est pas forcément une barrière avantageuse. C'est une question qui était posée compte tenu de la similarité de SARS-Cov2 avec les virus grippaux, ces derniers étant notoirement saisonniers.



Herodote (10/04/2020) : Covid-19 : la mélancolie de Donald Trump

Gabriel Martinez-Gros

« Ce pays n’a pas été construit pour être fermé…Vous pouvez tuer une société avec ça », disait Donald Trump il y a quelques jours. La vague monstrueuse de chômage qui s’abat sur le monde, et dont il faudra sans doute des années pour réparer les dommages, donne un sens concret à ces propos. Mais il y a plus, on le sent bien. L’Amérique a été construite pour travailler, bâtir, aller de l’avant, créer du progrès et de la richesse, chercher le bonheur.

En 240 ans, de 1780 à 2020, la population du pays a été multipliée par 75 – il n’existe évidemment aucun exemple comparable dans l’histoire, aucun autre sur quelque continent que ce soit, et sans doute n’en verra-t-on plus jamais l’équivalent. La Révolution industrielle, agricole, sanitaire et médicale a doublé le nombre des hommes au XIXe siècle, presque quadruplé au XXe siècle…

Mais la croissance démographique mondiale ne devrait pas même atteindre 40% entre 2020 et 2100. Entre 2050 et 2100, elle se limitera en moyenne à 0,2% par an, nettement moins que la France d’aujourd’hui. Et surtout, la quasi-totalité de l’augmentation du nombre des humains (87%) reviendra aux « seniors » (de plus de 60 ans). En pourcentage de la population mondiale, ils sont aujourd’hui trois fois moins nombreux que les ‘jeunes’ (de moins de 25 ans) : 13,5% contre 41%. En 2100, les deux groupes s’équilibreront : 29,5% pour les jeunes, 28,2% pour les seniors. En bref, la croissance démographique culminera vraiment vers 2050. Dans la deuxième moitié de ce siècle, c’est le vieillissement qui prolongera pour un temps sa courbe. Au-delà de 2100, la population mondiale commencera à diminuer.

L’économie épouse ce mouvement déclinant. Au moment où la crise du coronavirus nous a frappés, le taux de croissance était sur le point de passer en dessous de 1% en zone euro, de 2,5% aux USA, de 6% en Chine. L’Inde, l’Asie du sud et l’Afrique restent les dernières grandes régions dont on puisse attendre, pour quelques dizaines d’années, une économie en net essor. Mais globalement, les « Deux-Cents Glorieuses », entre les débuts de la modernité, voici deux siècles, et nos jours, sont terminées.

Donald Trump a déclaré mercredi 26 février que les Etats-Unis étaient les mieux préparés à la gestion d’une épidémie, et donc à celle du coronavirus actuellement. DR.

Le Covid-19, qui emporte des dizaines de milliers de nos anciens, remue le couteau dans notre plaie : l’humanité vieillit, et nous menons contre la mort un combat que nous ne pouvons pas gagner à terme, à mesure que l’âge de nos populations s’élève – et il s’élèvera inéluctablement. On comprend l’incrédulité, la détresse même, des dirigeants de « pays neufs », comme le Brésil et les Etats-Unis, dont l’histoire tient toute entière dans ces Deux-Cents Glorieuses, et qui n’ont rien connu de la stagnation démographique et économique de l’essentiel des temps historiques. Les temps de repli qui s’ouvrent infligent un démenti douloureux à ces identités conquérantes. Ce n’est pas le Coronavirus que Trump et Bolsonaro nient ; c’est la vieillesse.

À l’autre extrémité de l’éventail politique, chez les plus attentifs aux problèmes écologiques, Jared Diamond et Nathan Wolfe demandent au gouvernement chinois de mettre fin au commerce des animaux sauvages ; et Ibrahim Thiaw demande le respect de la biodiversité, pour éviter le désastre. L’une et l’autre tribune ne plaident pas, comme le faisait jusqu’ici l’écologisme conquérant, pour la biodiversité, mais pour que l’homme se garde de la biodiversité. Des centaines de milliers d’espèces de virus encore inconnues, plusieurs millions d’espèces de bactéries peut-être, dont 10 000 à peine sont reconnues, débordent nos capacités de prévision et de prévention. Il nous faut reculer devant la vie, abandonner le terrain, construire des murs de défense, élever et contrôler tout ce que nous mangerons ou fréquenterons. La forêt amazonienne doit rester vierge, parce qu’elle est dangereuse.

C’est le début de la fin d’un monde, ce n’est pas la fin du monde. Mais il est vrai que ce rabougrissement nous place à la croisée des chemins politiques. La première voie est celle de l’empire, telle qu’on peut la déduire de la lecture d’Ibn Khaldûn (1332-1406), historien et penseur du temps de la peste des XIVe-XVe siècles, mais dont le raisonnement s’étend à toutes les sociétés étatisées depuis la formation des premiers empires. Il prend acte de la difficulté de mobiliser la richesse et de la faire croître dans des sociétés agraires de très faible expansion. Il faut donc provoquer artificiellement la concentration première du capital par un coup de force, l’impôt, qui est la tâche principale de l’État. Cette mobilisation forcée de la ressource ouvre la voie à des gains de productivité et à une spirale ascendante de prospérité. Mais la contrepartie en est le désarmement des populations, l’interdiction des solidarités et des résistances qui mettraient en cause la levée de l’impôt. Désarmement et réduction à l’individualisme des producteurs impliquent que l’État fasse appel à d’autres pour assurer les fonctions de violence qu’il interdit à ses sujets. Elles sont assurées par des tribus des marges de l’empire, les Germains par exemple dans l’empire romain finissant dont la « peste antonine » de 165 de notre ère (peut-être la première pandémie de variole) a brisé la lente croissante.

Cette solution a l’avantage d’étendre à l’envi la taille des entités politiques et économiques, puisque le consentement des populations n’est pas requis. Elle permet donc d’amortir les effets d’un appauvrissement global par des économies d’échelle, l’intensité des échanges et des synergies. Les libéraux et « mondialistes » d’aujourd’hui soulignent à juste titre ces avantages. Ils n’insistent guère en revanche sur l’indifférence de ce schéma politique à « ce que pensent les gens ». L’agacement devant la « montée des populismes », inexorable malgré tous les avertissements dont le bon peuple est pourtant nourri tous les jours, est le premier signe d’un questionnement profond sur la pertinence de la démocratie chez nos élites. Ajoutons qu’à terme, le système impérial est profondément anxiogène. La domination d’une soldatesque tribale et les constants besoins d’argent de l’État y généralisent les confiscations et découragent l’initiative. Les plus brillants vizirs abbassides finissent sous la torture, volés de ce qu’ils ont volé aux contribuables.

L’autre voie revient au contraire à privilégier l’approbation des peuples, quitte à accepter de moindres bénéfices de l’économie, à un moment pourtant où elle donne déjà des signes de faiblesse. Ce schéma privilégie les solidarités. Mais il implique des unités politiques beaucoup plus réduites que l’empire. Car les solidarités réelles, nous le voyons bien dans la crise du Covid-19, ont une extension limitée. La crise regroupe les familles, réveille les méfiances régionales, les oppositions nationales en Europe, entre le nord, l’est et le sud. En Espagne, durement touchée, les « Autonomies » préservent soigneusement leurs ressources au détriment de leurs voisines. En France, spontanément, Emmanuel Macron fait appel au sentiment national. Il est clair que c’est encore une de nos forces, et qu’il y aurait beaucoup de légèreté à la sacrifier à l’abstraction d’une « circulation universelle ».

Un bel article. Inspirant pour nourrir le débat sur la question du jour d'après.


Sciences et vie (11/04/2020) : Nous ne sommes pas à l'abri d'un 'hiver quantique' #C'est dit !

Mathilde Fontez

Chaque mois, de nouvelles annonces clament l'accélération de la course à l'ordinateur quantique. En septembre 2019, Google vantait son "calcul quantique suprême" inaccessible aux ordinateurs actuels ; en janvier, le gouvernement français promettait un "plan quantique" qui pourrait être doté de 1,4 milliard d'euros… L'enjeu est jugé, à juste titre, stratégique : le premier qui concevra un ordinateur quantique fonctionnel pourra décrypter n'importe quel code secret, inventer des matériaux sur mesure ou encore prévoir les effets de nouveaux médicaments sans les tester. Celui qui maîtrisera la téléportation quantique régnera sur les télécommunications… Oui, des technologies nouvelles et révolutionnaires sortiront sans doute, un jour, des labos. Mais à quel horizon ? Peut-être dans 5, 10, 30 ans…

À vrai dire, personne ne sait quand une telle machine pourra vraiment fonctionner. Or les "bulles spéculatives", si elles ne sont pas suivies d'applications, finissent toujours par éclater. Les signes sont peut-être déjà là. L'année 2018 a vu pour la première fois une baisse des investissements privés sur les technos quantiques, et en particulier l'ordinateur : d'après une étude réalisée en octobre, 173 millions de dollars ont été investis (Chine exclue, faute de données), contre 278 en 2017. Le rapport de l'Académie nationale des sciences américaine, paru fin 2018, a prévenu : la quantique pourrait connaître, comme l'IA dans les années 1980, une traversée du désert. Un "hiver quantique" qui risque de voir les financements s'assécher, et les talents se détourner… Avant, peut-être, un printemps.

Pris au hasard. La recherche scientifique est un domaine vaste, aux ramifications nombreuses. Elle est rarement bien dôtée sur le plan budgétaire. La recherche a toujours été une variable d'ajustement budgétaire.

La pandémie est un domaine étroit et lourdement doté sur le plan budgétaire. Et la raison qui conduit à faire de la pandémie un chapitre budgétaire est peu discutable, il est mieux de canaliser la pandémie pour éviter de devoir s'affranchir de tout le reste.

Ici, le plan quantique est victime de SARS-Co2. Il n'y a pas que les humains qui peuvent prendre froid. Le plan quantique c'est un peu comme les masques, quand on pense ne pas en avoir besoin on ne vérifie pas s'il en reste dans les armoires. Et après, forcément il y a une facture qui devient plus élevée le jour ou ça devient urgent.

Juste une chose, tout de même, ne pas s'investir suffisamment sur des travaux de recherche qui peuvent déboucher sur une amélioration phénoménale de notre capacité de calcul, de traitement informatique, c'est peut-être aussi se priver de pouvoir répondre beaucoup plus facilement et rapidement à des situations de crises majeures. Qu'on se le dise.


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Au café du commerce, il n'y a que les godets pleins qui rapportent sans ficelle

Pour deux francs et pas un saoul ... - Je regarde cette putain de carte avec ses points rouges. Elle a la chtouille. On a beau dire, ...