22 avril 2020

Ma santé et nous, ta santé et moi n°2


Fragment d'une fractale longuement calculée sur mon petit zinzouin d'ordinateur, bête à m'aider à penser
"... la science qui traite de la connaissance de moi-même, et qui m’instruise à bien mourir et à bien vivre ... " (Montaigne)

Ma santé et nous, ta santé et moi - n°2 - Documentation.

Il n’y a pas ou peu de références indiquées ici, mais tout ce qui est mentionné en matière de faits est référençable. C'est pas parce qu'on est Vent debout qu'on sait pas ancrer notre travail sur des fondations sérieuses.

Rédaction : François Weil, Christian Bernezet, François Marandet, Vent Debout

Rappel des faits et analyse :

Il y a quelques années, un certain temps, presque une éternité

En 2008, dans un document préalable à publication pour usage spécifique : "Prospective géostratégique à l'horizon des trente prochaines années", le Ministère de la Défense partageait dans le cadre d'une mission PP30 à destination de la Direction des Affaires Stratégiques le propos suivant :



L’apparition de pandémies sera probable, favorisée notamment par la multiplication des voyages internationaux et le réchauffement climatique (déplacement et extension géographique des aires de répartition des maladies vectorielles comme le paludisme). L’épidémie de sida est appelée à s’étendre dans les pays en développement, et devrait stagner dans les pays développés.

Le focus qui était mis sur l'épidémie de sida, n'occulte pas, dans cette vision prospective, l'apparition de pandémies nouvelles ... favorisée par la densification des flux migratoires de tous ordres et le réchauffement climatique.

Cette analyse n'est pas spécialement novatrice, elle est alors, il y a plus de dix ans, déjà largement partagée chez les personnes concernées par les problématiques de gestion de crises, d'une part, et un grand nombre de professionnels de santé d'autre part.

H1N1

La France, comme l'ensemble des pays du Monde, a connu un épisode pandémique particulier, sur la période 2009-2010, avec la souche virale H1N1, sous-type du virus de la grippe A, le premier sous-type étant celui de la "grippe espagnole" de 1918.

Cette grippe diffère sur plusieurs points des grippes dites saisonnières, en raison de caractéristiques particulières du virus, qui font de celui-ci un pathogène face auquel les humains ont une immunité faible ou inexistante.

L'anticipation des services de l’État, en France, comme dans d'autres pays du Monde, a permis de construire une réponse globale en termes de santé publique, qui a consisté à prévoir et mettre en œuvre une approche vaccinale pour l'ensemble de la population. En effet, il avait été possible de construire une offre vaccinale avant l'entrée en phase épidémique dans le cas de cette grippe H1N1. La période pandémique court alors sur 2009 et 2010, précisément et selon les analyses de l'OMS du 11 juin 2009 au mois d'août 2010.

Les études, analyses prospectives et décisions qui ont été prises pour H1N1 ont conduit à l'engagement contractuel auprès de laboratoires, pour la fabrication de lots de vaccins suffisants pour une vaccination de la population générale selon un programme à deux doses.

Le plan d'action qui a été engagé a été estimé, à postériori, surdimensionné au regard de la contagiosité de H1N1 d'une part, et de la virulence de celui-ci d'autre part.

Améliorer la sécurité nationale face à la menace

Cet épisode a provoqué, en France, de nombreux débats à tous les niveaux de la société, mais plus particulièrement un travail d'analyse et de synthèse entre la Cour des Comptes et les institutions gouvernementales et parlementaires.

Ce travail a permis d'enrichir et de développer une stratégie, dans le cadre de la santé publique, correspondant à la gestion des risques exceptionnels jusque dans les établissements de prise en charge médicale. A partir de 2014 on parle des plans regroupés dans le plan Orsan (Organisation de la réponse du système de santé en situations sanitaires exceptionnelles), qui surclasse les plans blancs proposés pour les cinq volets retenus :

  • ORSAN AMAVI : accueil massif de victimes non contaminées
  • ORSAN CLIM : prise en charge de nombreux patients à la suite d'un phénomène climatique
  • ORSAN EPI-VAC : gestion d’une épidémie ou d’une pandémie sur le territoire national, pouvant comprendre l’organisation d’une campagne de vaccination exceptionnelle par le système de santé
  • ORSAN BIO : prise en charge d’un risque biologique connu ou émergent
  • ORSAN NRC : prise en charge d’un risque nucléaire, radiologique ou chimique.

Le lien entre l'administration centrale et les établissements se fait par le biais de la Haute Autorité de Santé, qui pilote les Agences Régionales de Santé.

Le plan blanc ORSAN EPI-VAC contient l'essentiel des procédures, méthodes et actes relevant de la gestion des crises sanitaires de type épidémique ou pandémique. Il modifie, à partir de 2014, la réponse sanitaire qui partait des établissements de soin, pour en faire une politique globale pilotée au niveau national, puis régional et enfin appliquée par les établissements. Il peut être complété par d'autres plans selon la configuration de la crise.

Cette approche descendante permet la plus grande coordination des opérations en période de crise à partir d'une centralisation des ressources et informations.

Le dispositif ORSAN a été utilisé à différentes occasions et mis à jour chaque année. Il prévoit la constitution de stocks de fournitures et consommables, de produits médicaux, de toutes sortes de moyens et ressources visant à faire en sorte que les plans de continuité et de reprise d'activité, respectivement PCA et PRA, soient parfaitement identifiés, connus, et opérationnels.

Les crises sanitaires Ebola, ou SRAS ont été l'objet d'une activation ORSAN. On peut à cet effet mentionner le fait qu'il s'agissait de crises sanitaires pour lesquelles la mise en alerte était justifiée, mais dont les effets concrets sur la vie du pays n'ont pas été de nature à affecter ou interrompre l'activité.

Le plan pandémie

Un plan pandémie a d'autre part été mis au point dès 2009, permettant d'encadrer le PCA et PRA, intitulé "Plan de prévention et de lutte "Pandémie grippale" ", mis à jour par le plan du même nom daté 2011, et décrivant la stratégie de l’État et les déclinaisons applicables pour toute organisation publique et privée, donne un guide décisionnel complet en relation avec le travail réalisé par l'OMS et adresse l'ensemble des décisionnaires dans le pays. Ce plan s'appuie ultérieurement sur le plan ORSAN.

Pour différentes raisons relevant de la gestion économique, les dispositifs ORSAN et Plan pandémie grippale n'ont pas été l'objet d'un suivi adapté ces dernières années, suivi qui aurait imposé la mise en œuvre de moyens devenus obsolètes, ou la mise à niveau d'équipements hospitaliers devenus inadaptés en raison de restructurations en cours, inachevées, ou inadéquates. Les ressources humaines et les moyens matériels ont été affectés en qualité et en quantité par des décisions de gestion courante et une logique budgétaire qui a provoqué un écart devenu important entre les exigences de santé courante, et de santé de crise. Et particulièrement sur ce dernier point, on note entre autres, la maintenance de stocks stratégiques de fournitures et consommables, avec le chapitre des masques antiprojections et filtrants.

Face aux réalités du moment

A partir de la fin d'année 2019, une crise sanitaire se dessine, dont la phase de déclenchement se situe, pour ce que l'on en connaît, entre novembre et décembre 2019. Le foyer primaire largement reconnu est situé dans l'agglomération de Wuhan, province de Hubei, en Chine continentale. Le premier cas de pneumopathie rapporté dans le cadre de ce qui n'est pas encore identifié comme une nouvelle pathologie, remonte au 17/11/2019. Au 15 décembre les autorités sanitaires de Wuhan relèvent 27 cas, et au 20 décembre 60. La contamination interhumaine n'est pas envisagée à ce stade. Au 31/12/2019 une alerte est remontée vers l'OMS, concernant une pneumopathie d'origine inconnue. Le SARS-Cov2 est isolé le 07/01/2020. Le 06/01/2020 les CDC américaines communiquent sur un risque élevé d'épidémie, l'OMS confirme ce risque le 09/01/2020.

Wuhan

A propos de Wuhan : il s'agit de la septième ville la plus peuplée de la Chine continentale, et la seconde zone urbaine de l'intérieur du pays après Chongqing. 9 millions d'habitants pour la ville et 11 millions pour la zone urbaine en font un complexe urbain aussi important que l'Ile de France.

Il s'agit d'un carrefour majeur pour les communications en Chine et avec une ouverture internationale importante. Le secteur de Wuhan a connu un important développement économique grâce à des investissements suivis qui en ont fait une capitale pour l'industrie lourde en Chine.

Wuhan possède un grand centre universitaire et plusieurs centres de recherche d'importance nationale en Chine. L'aéroport modernisé a vu 24 millions de passagers en 2018, dont une partie à l'international, la compagnie Air France par exemple assurant depuis plusieurs années 3 rotations par semaine avec l'aéroport Charles de Gaulle.

Wuhan étant un ancien comptoir français, les liens culturels et économiques entre la France et cette métropole chinoise sont nombreux. Les liens régionaux les plus marqués sont avec l'Université de Lorraine, l'Université Lille-II, l'Université Blaise-Pascal et l'ENSA Paris-Val de Seine, ainsi qu'avec le groupe industriel PSA. L'esprit francophile s'y est développé, et a été symbolisé par un buste d'Alain Peyrefitte, sinophile patenté, et auteur de nombreux ouvrages sur la Chine. Cet esprit francophile a induit un intérêt marqué pour les jeunes chinois qui souhaitent étudier dans un univers francophile, et même francophone, certains enseignements étant proposés en français directement. L'une des perspectives des étudiants chinois peut être de se former pour travailler dans le monde de la francophonie, en particulier sur les marchés commerciaux et industriels africains. Il existe également un jumelage entre Wuhan et Bordeaux en France.

Les premiers moments d’un séisme

Le 21/01/2020, l'OMS émet son premier rapport journalier sur ce qui va devenir une pandémie. Le 23/01/2020, l'OMS confirme la transmission interhumaine. Le 24/01/2020, l'OMS indique que les modes de transmission de la maladie sont très probablement les mêmes que ceux des autres coronavirus : gouttelettes éjectées (par postillons, lors de toux ou d'éternuements), contacts directs ou via des objets contaminés.

Le 26/01/2020, la Commission nationale de la Santé de Chine (CNS), indique que ce nouveau virus a une période d’incubation pouvant aller jusqu’à deux semaines, et surtout que la contagion est possible durant la période d’incubation11. De ce fait, s'il ne fait pas l'objet d'une politique de détection systématique et précoce, il est susceptible de se répandre avec une croissance exponentielle.

Le 30/01/2020, l'OMS déclare que cette épidémie constitue une urgence de santé publique de portée internationale (USPPI). On évoque alors à certains endroits la « maladie X », faisant référence à une maladie susceptible de causer un danger international et définie en théorie par l'OMS. Le premier avis USPPI, a été évoqué le 23/01/2020, mais l'OMS a subi des pressions de plusieurs pays membres pour différer la décision de classement USPPI de telle sorte que ces pays membres s'organisent pour le rapatriement de populations résidentes en Chine.

Le 11/02/2020, le directeur général de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, annonce que la maladie est désormais officiellement nommée « maladie à coronavirus 2019 (Covid-19) », Covid-19 étant l'acronyme anglais de coronavirus disease 2019. Le virus est officiellement nommé « coronavirus 2 du syndrome respiratoire aigu sévère (SARS-CoV-2) ».

Le 27/02/2020, l'OMS publie un guide sur les mesures préventives destinées à freiner l'épidémie.

Le 11/03/2020, le directeur général de l'OMS annonce qu'il s'agit d'une pandémie. C'est la première fois qu'une pandémie est causée par un coronavirus.

L'OMS a choisi de qualifier l'épidémie en pandémie à partir du moment où 100 pays ont été atteints dans toutes les régions du Monde. S'agissant d'une maladie inconnue antérieurement, quelle que soit la contagiosité de celle-ci et sa virulence, elle peut occasionner un nombre important de cas graves et de victimes.

L'OMS n'ayant aucun moyen particulier pour imposer des politiques sanitaires, les recommandations qu'elle donne aux autorités sanitaires de tous les pays consistent à prendre des mesures de protection essentielles pour prévenir la saturation des services de soins intensifs et renforcer l'hygiène préventive : mesures de distanciation, mesures barrières, mesure de confinement de l'ensemble des populations, et d'isolation des personnes contaminées.

La mise en place des réponses nationales aux recommandations de l'OMS se fait en ordre dispersé. Les rapatriements de ressortissants étrangers à la Chine ont été faits dans des conditions parfois surprenantes, avec des avions affrétés spécialement et transportant indistinctement parfois des personnes contaminées et non-contaminées.

Un tsunami traverse les continents

L'Italie a été le premier pays hors zone asiatique à déclarer un état d'urgence après la découverte de deux cas covid-19.

Progressivement les frontières se sont fermées pendant tout le mois de février et jusqu'en mars, dans tous les pays, ces fermetures se faisant de manière sélective. Les États-Unis n'ont définitivement fermé leurs frontières que le 14/03/2020, la Belgique le 20/03/2020.

Selon les pays, les mesures recommandées par l'OMS ont été prises ou non. Deux approches se sont opposées entre confinement et immunité de groupe.

Si l'immunité de groupe a été choisie dans un certain nombre de pays à l'origine, aucun n'a pu maintenir cette option depuis. Le Royaume-Uni, qui n'avait aucune mesure particulière de confinement a finalement basculé sur cette option mi-mars. Singapour, qui avait maintenu une activité humaine sans confinement mais avec toutes les mesures barrières et un test systématique de toute suspicion de covid-19, a finalement instauré un confinement pour un mois depuis le 06/04/2020.

Les estimations de létalité sur la base d'une seule immunité de groupe pour la France donnait des projections de 300 à 400.000 décès possibles pour ce seul pays.

Contagiosité et virulence du virus SARS-Cov2 se conjuguent pour en faire une maladie particulièrement nocive. En date du 17/04/2020 et selon les données fournies par les services de santé publique des principaux pays, covid-19 a été diagnostiquée formellement pour plus de 2.100.000 cas, ayant entraîné le décès de plus de 140.000 personnes.

A ce stade la létalité de covid-19 reste très en deçà de celle d'une grippe saisonnière, la fourchette du nombre de décès étant reconnue par l'OMS pour être située entre 250.000 et 650.000 pour la grippe saisonnière.

Il est évident que la gravité des symptômes de covid-19 et le fort taux de décès observé au regard du nombre de patients détectés (nombre de cas) en font une maladie qui peut occasionner des scores finalement plus dramatiques qu'une simple grippe saisonnière.

La nature se rebelle ? 

A propos de la pression humaine exercée sur l'écosystème et les risques associés 

reforestaction (30/03/2020) : La dégradation des écosystèmes favorise le développement de nouvelles maladies 

Depuis le début de la pandémie de COVID-19, de nombreux experts alertent sur la nécessité de réduire la pression exercée par les activités humaines sur la biodiversité, qui serait à l’origine de l’apparition de nombreuses maladies.

Depuis des décennies, l’homme déploie ses activités sur tous les continents, grignotant progressivement les espaces naturels et détruisant au passage une grande partie de la biodiversité qui s’y trouve. Or la dégradation des écosystèmes, et en particulier des forêts, a notamment pour conséquence d’augmenter la fréquence des contacts entre les hommes et les animaux sauvages. Les virus et maladies portés par ces animaux, qui se trouvaient confinés dans des territoires reculés, trouvent alors auprès des populations humaines de nouvelles victimes potentielles. Le dérèglement climatique est également un facteur aggravant, car il incite de nombreuses espèces animales à migrer pour trouver de quoi survivre alors que leurs habitats naturels ont été modifiés par le climat.

La faune sauvage est un vecteur de transmission

Dans un article paru récemment dans le journal anglais The Guardian, Inger Andersen, directrice de l’ONU Environnement, estime que « 75% des maladies infectieuses émergentes proviennent de la faune sauvage ». L’article dresse la liste des épidémies survenues ces dernières années ayant pour origine une transmission par les animaux : Ebola, grippe aviaire, syndrome respiratoire du Moyen-Orient (Mers), HIV, fièvre de la vallée du Rift, syndrome respiratoire aigu sévère (Sars), virus du Nil occidental, Zika…

Le COVID-19 fait lui aussi partie de la longue liste des virus transmis par la faune sauvage. Les coronavirus sont assez communs chez certains animaux sauvages, en particulier chez les chauves-souris, mais aussi chez les oiseaux. Un article publié en mars 2020 dans la revue Nature décrit les résultats d’une étude du génome du COVID-19 par une équipe de chercheurs : leurs conclusions montrent que des formes très proches de ce virus existent dans le monde animal, notamment chez certaines espèces de chauves-souris et de pangolin, ce qui renforce la piste d’une transmission à l’homme par ces animaux, même si le mode précis de contamination de l’un à l’autre n’est pas encore tout à fait clair.

Certains en déduisent qu’il suffirait d’éliminer tous les animaux porteurs de virus pour mettre l’humanité à l’abri de ce genre de phénomène. C’est une option non seulement radicale, mais surtout inadaptée : c’est bien la diversité des espèces et le maintien de l’équilibre dynamique des écosystèmes qui offrent les meilleures chances de limiter les pandémies. Nous ne connaissons à ce jour qu’une petite partie des espèces vivantes sur terre, et parmi les espèces encore à découvrir se trouvent peut-être celles qui nous fourniront les remèdes à de nombreuses maladies ! Plusieurs études ont d’ailleurs montré que la biodiversité est le meilleur rempart contre la diffusion de nouvelles maladies. Il est donc essentiel de préserver la diversité génétique dans la nature si on veut éviter la multiplication des pandémies.

La déforestation en ligne de mire

Parmi les écosystèmes particulièrement sensibles, les forêts arrivent en tête de liste. Philippe Grandcolas, directeur de recherche au CNRS, et Jean-Lou Justine, professeur au Museum National d’Histoire Naturelle, écrivaient récemment dans un article paru dans The Conversation : « Nous détruisons les milieux naturels à un rythme accéléré : 100 millions d’hectares de forêt tropicale coupés entre 1980 et 2000 ; plus de 85 % des zones humides supprimées depuis le début de l’époque industrielle. Ce faisant, nous mettons en contact des populations humaines, souvent en état de santé précaire, avec de nouveaux agents pathogènes. Les réservoirs de ces pathogènes sont des animaux sauvages habituellement cantonnés aux milieux dans lesquels l’espèce humaine est quasiment absente ou en petites populations isolées. Du fait de la destruction des forêts, les villageois installés en lisière de déboisement chassent et envoient de la viande contaminée vers des grandes villes. »

Le virus Nipah, l’un des plus dangereux virus connus, est un exemple de transmission à l’homme par des animaux, suite à une série d’évènements vraisemblablement liés à la déforestation. Ce virus est apparu en Malaisie à la fin des années 90, dans une région victime d’une déforestation intense pour permettre le développement de l’élevage de porcs. Les chauves-souris frugivores qui vivaient dans la forêt ont été contraintes de trouver d’autres sources d’alimentation, et sont donc venues se nourrir dans les vergers des exploitations agricoles les plus proches. Leur salive et leur urine ont contaminé les fruits, qui ont ensuite été consommés par des porcs d’élevage, qui ont à leur tour contaminé près de 300 personnes au sein des populations locales.

En détruisant les écosystèmes forestiers, la déforestation crée des déséquilibres qui favorisent l’émergence de nouvelles maladies infectieuses. Ce phénomène a notamment été démontré en 2016 dans une étude internationale conduite par des chercheurs de l’Institut de Recherche pour le Développement, de l’Inserm et de l’Université de Bournemouth. Si l’on continue à détruire ces écosystèmes, les épidémies risquent fort de devenir de plus en plus fréquentes. Préserver nos forêts partout dans le monde, ce n’est donc pas seulement protéger la biodiversité, c’est aussi préserver notre santé !

Prendre des mesures adaptées

A ce stade, les différentes hypothèses sur la pandémie actuelle de COVID-19 demandent encore à être vérifiées, mais certaines mesures peuvent être prises dès maintenant pour réduire les risques de transmissions entre la faune sauvage et l’homme. Parmi elles, il y a bien sûr l’arrêt du commerce d’animaux sauvages. La Chine a d’ores et déjà fait un premier pas en annonçant fin février l’interdiction de tout commerce et consommation d’animaux sauvages.

Plus globalement, c’est le renforcement du niveau de protection des aires protégées et la diminution de la pression exercée par les activités humaines sur la biodiversité, en particulier en réduisant la déforestation, qui semblent prioritaires.

Nous avons tous un rôle à jouer dans ce domaine : en tant que citoyens, en questionnant nos modes de vie et de consommation, et en incitant nos gouvernants à mettre en place des modes de développement plus respectueux de l’environnement ; et en tant qu’entreprises, en mesurant précisément l’empreinte de nos activités sur la biodiversité et en déployant des stratégies adaptées.

Il n'est pas possible de mesurer rigoureusement les chose et d'en faire la part, compte tenu de l'état actuel des connaissances humaines. Compte tenu également de la bonne volonté éventuelle, ou pas, des personnes ou des organisations qui veulent bien mesurer les interactions entre les humains et leur milieu. Il en va de la biodivertsité comme du réchauffement climatique, il peut exister des raisons valables, pour certains, de considérer que le réchauffement climatique est naturel et que de ce fait il ne faut pas tenter d'y remédier ... 

A défaut de trouver une démonstration parfaite, il est raisonnable de considérer que la diversité naturelle multiplie les formes de vie, qu'elle diminue de ce fait la pression exercée par une espèce sur toutes les autres, et que la nature dans son ensemble permet de trouver des niches, des refuges ayant pour intérêt de permettre à la diversité de prospérer.

Pas de démonstration ... pas de possibilité d'affirmer comme vérité démontrée qu'une pandémie comme covid-19 est devenue possible en raison de la pression de l'espèce humaine sur son environnement. Le bon sens conduit pourtant à observer que d'un foyer premier d'infection, la transformation en épidémie puis en pandémie n'est possible que par la densité plus ou moins élevée d'êtres humains interagissant entre eux, puisque nous avons affaire à une épidémie interhumaine.

Les risques associés aux activités humaines sont étudiés depuis un certain nombre d'années, et le risque pandémique, particulièrement celui basé sur un virus ayant vocation à exposer dramatiquement les humains au niveau pulmonaire, est un risque doculenté depuis des années et pour lequel il n'a pas été développé que de la littérature, mais aussi des plans de sécurité au niveau de chaque pays. Le sujet était donc depuis de nombreuses années pris au sérieux.

De ce qui précède, on peut retenir les points suivants :

  • la croissance globale de la population mondiale conjuguée aux mobilités grandissantes représentent l'un des facteurs clefs qui induisent le risque pandémique.
  • la pression démographique humaine sur les bio-ressources peuvent faire éclater des foyers de contamination là où sont concentrées de nombreuses populations sur des périmètres vidés de leurs barrières naturelles.

Des origines plus précises de la pandémie

L'exposition humaine à un virus provenant d'animaux sauvages est l'hypothèse avancée dans le cas de la pandémie covid-19. C'est une hypothèse sérieuse, dans laquelle il est possible qu'un coronavirus habituellement hébergé par des chauve-souris ait connu une série de modifications susceptibles de l'amener à choisir des pangolins comme hôte. Ces derniers étant consommés, mais les chauves-souris le sont également, comme nourriture proposée sur le marché central de Wuhan, des personnes auraient été contaminées de la sorte.

On ne sait pas estimer le scenario précis et exact de l'arrivée de SARS-Cov2 sur un hôte humain, et ce virus possède des caractéristiques qui rendent le traçage de son entrée dans le monde des humains fort difficile.

L'une de caractéristiques de ce virus est sa contagiosité précoce lorsqu'il infecte un patient. Il est contagieux tôt, très tôt, avant même que des symptômes légers n'apparaissent. Et il incube pendant une durée variable allant classiquement de 2 à 5 ou 6 jours.

Il est dès lors susceptible d'infecter une personne "patient zéro", qui développera des symptômes après que des cibles induites en développent elles-mêmes. On peut tout à fait trouver un patient contaminé après un autre, qui sera détecté covid+ et aura des symptômes visibles avant le patient qui l'a contaminé. Il est même possible que le contaminant ne montre aucun symptôme, puisque le virus peut provoquer des symptômes visibles chez seulement une partie des personnes contaminées.

On pense, actuellement, que 80% des personnes contaminées développent peu ou pas de symptômes, et bien qu'on ne l'ai pas mesuré précisément, il est probable que ces 80% de personnes deviennent résistants au virus par leur immunité propre. Les cas de covid-19 traités dans les hôpitaux représenteraient alors peut être qu'une personne sur cinq parmi toutes celles qui ont été infectées.

Les modes de propagation d'une épidémie ont fait, et font encore, l'objet d'études théoriques et pratiques pour tenter d'anticiper l'évolution d'une épidémie en fonction de la nature des populations touchées et de la contagiosité d'un pathogène. Les approches théoriques peuvent être confrontées aux mesures statistiques réalisées sur le terrain.

Cette discipline est un outil de premier choix pour canaliser les énergies mises en oeuvre pour faire face à une épidémie, et pour aider à la décision dans les mises à disposition de moyens et les choix de stratégie de défense face à l'agression.

On trouvera un exemple de travail soigné de présentation d'hypothèses et de modèles mathématiques dans : Modéliser la propagation d’une épidémie (Hugo Falconet et Antoine Jego sous la direction d’Amandine Veber et Vincent Calvez - Juin 2015)


La pandémie, on ne connaît pas ?

Les travaux récents ne doivent pas occulter le fait que la prédiction d'éventuelles nouvelles maladies n'est pas une découverte et la modélisation de la portée d'une pandémie ne fait appel qu'à des mathématiques très conventionnelles.

Force est donc de constater que d'une part la prédiction d'une éventuelle pandémie établie sur un coronavirus de type grippal ou proche d'un virus de la grippe, de la typologie nouvelle de ce virus pour l'être humain, et des risques concrets de contagion généralisée en raison de la pression migratoire humaine et de l'érosion de la diversité biologique des espèces représente un cocktail de facteurs qui, combinés entre eux ne laissent aucun doute sur la possible survenance d'une pandémie difficilement contrôlable à priori.

L'OMS en était parfaitement consciente et a parfaitement joué son rôle à chaque étape du cycle de développement de covid-19. Les pays ont été invités à utiliser les procédés et méthodes prévus en de telles circonstances. Et les pays qui ont appliqué le plus strictement possible les mesures prévues ont majoritairement obtenu des résultats répondant au mieux aux valeurs portées par un PCA, ou dans le pire des cas à un PRA.

Les pays qui ont notablement souffert plus que d'autres de la pandémie, et bien que celle-ci n'en soit qu'à sa première phase, on été mis en défaut sur des points méthodologiques qui peuvent sembler difficiles à comprendre.

En Italie, pays lourdement affecté alors même que l'Italie avait mis en place un plan d'urgence dès la fin du mois de janvier, on peut avoir du mal à comprendre les raisons qui conduisent à une mortalité nettement plus forte. C'est le cas en Espagne également, et inversement on voit pour d'autres pays des taux de mortalité très nettement inférieurs sans que des mesures particulièrement fortes aient été prises, ce qui conduit à envisager que les nombres de cas et de décès peuvent être conditionnés par des facteurs environnementaux et des facteurs liés aux équipements et ressources mis en œuvre. En tout état de cause les seules mesures barrières, de distanciation, et même de confinement ou d'isolation ont du mal à refléter les performances des politiques de lutte contre la pandémie.

Comment mesurer ce qui nous arrive ?

L'une des premières difficultés qui apparaît en analyse consiste à observer que les données statistiques fournies par les services de santé publique des États ont parfois du mal à être comparable tout simplement parce que données retenues par ces services de santé publique ne comptent pas exactement les mêmes choses de la même manière. On note par exemple que les patients décédés peuvent être comptés alors qu'ils ne sont pas testés, à la seule vue de symptômes laissant entendre qu'ils étaient contaminés par le virus, tandis que dans d'autres pays, un patient décédé dans le cadre d'une comorbidité peut ne pas être compté comme covid+. Il y a des disparités et elles peuvent être notables.

D'autre part la plupart des pays ne comptent que les décès de personnes reconnues covid+ mortes à l'hôpital. Là encore on peut trouver des écarts significatifs dans la méthode de comptage d'un pays à l'autre.

Les retours statistiques que l'on obtient sont donc largement suspects et ne peuvent pas renvoyer à des conclusions d'une grande fiabilité.

Au titre de la consistance du travail réalisé par l'OMS, on ne trouve pas de faille dans les niveaux d'alerte et les consignes et recommandations proposées aux pays membres. Les éventuels délais de prise de décision qui peuvent être observés sont limités et sont aussi le reflet du manque de qualité de réponse des pays interrogés par l'OMS lorsque cette dernière demande des compléments d'information. Il en va ainsi du délai pris pour prononcer l'USPPI qui était envisagée dès le 21/01/2020 et qui n'a été validée que le 30/01/2020. Une intervention de l'OMS en Chine a eu lieu entre temps pour observer sur le terrain les opérations sur secteur à Wuhan, et qui a fait l'objet de demandes aux autorités de santé chinoises pour bien analyser la situation. Sans parler de réticence, l'OMS a été amenée à faire le constat d'une coopération lente entre les autorités de santé et les experts de l'OMS. Et les informations, rassurantes sur la maîtrise de la situation, fournies par les autorités chinoises ont pu ralentir le processus de déclenchement USPPI.

On constate que l'OMS n'a pas toujours l'écoute suffisante des autorités de santé des pays membres pour que les expertises et les décisions soient transformées en actes efficaces.

L’arrivée de covid en Italie du Nord

L'un des exemples les plus marquants, qui fera date, est la gestion de crise qui a été menée en Italie du Nord.

C'est à partir du 21/02/2020 que fut détecté le premier cas de covid à Codogno. La ville fut fermée lorsque 50 cas furent comptés et la zone déclarée rouge selon la procédure sanitaire italienne.

La vallée du Serio n'a pas été gérée selon les mêmes règles, à la demande pressante des industriels locaux. Du 23/02/2020 où y fut trouvé le premier cas au 28/02/2020, on comptait déjà 110 cas.

Sont nées les campagnes de communication #YesWeWork et Bergamo non si ferma. Le 08/03/2020 à Bergame on comptait 997 cas, contre 220 une semaine plus tôt. La zone était maintenue au niveau orange, représentant une continuité normale des activités humaines. Seules les entrées et sorties de la ville étaient limitées.

Alors même que l'ensemble de l'Italie connaissait une mise en confinement strict, la vallée du Serio et la zone bergamasque étaient maintenues au niveau orange.

Entre Lombardie et Piémont, les conditions de mise en sécurité des populations n'ont pas été appliquées uniformément comme dans le reste de l'Italie, et un mois après le premier cas officiel covid en Italie, soit le 21/03/2020 on atteignait le niveau de 800 morts en une journée.

Craignant la perte d'activité à hauteur de 100 milliards d'euros par mois, la région représentant la plus grande partie du nord industriel du pays a poursuivi son activité commerçante et industrielle, faisant l'objet d'une apre négociation entre syndicats et patronat local.

Le 30/03/2020, alors que le décret de fermeture de toutes les activités non essentielles avait été validé, il y avait encore 1800 usines qui tournaient, au moment même où 8670 cas de contamination étaient comptés sur la zone depuis le début de l'épidémie.

C'est ainsi que la ville de Bergame a compté 553 morts pendant le mois de mars 2020, alors que le même mois en 2019 en a porté que 125. Soit un ratio de 1 à 4. On ne sait plus dénombrer précisément à cette période le nombre de contaminations, la Protection Civile Italienne indiquant que les données publiées devraient être multipliées par 10. Plus aucun test n'est alors réalisé sur les personnes vivantes, pas plus que sur les personnes décédées.

La gestion de crise, qui a été très inégalement menée en Italie, montre l'incidence particulièrement lourde de la non application des recommandations de l'OMS, en particulier dans les zones industrielles du nord. Et la statistique au 16/04/2020 de 172.434 cas et 22.745 décès n'apparaît que comme une indication très optimiste de la situation.

La Lombardie représente à elle seule 62.153 cas et 11.608 décès, et le Piémont 18.229 cas et 2.094 décès. Ces deux régions représentent un peu moins d'un quart de la population italienne, plus de 45% des cas, et plus de 60% des décès.

Le cas des régions de Lombardie et du Piémont sont particulièrement représentatifs du non-respect des recommandations habituelles de l'OMS en matière de pandémie. Ce n'est pas la seule zone dans ce cas.

A l’assaut du Nouveau Monde

Les conditions de la gestion de crise aux États-Unis est tout aussi surprenante, dans la mesure où le premier cas de covid dans ce pays remonte au 25 janvier, et que des mesures de mise en étanchéité au niveau migratoire avaient été prises. La fermeture des frontières américaines a été accompagné d'un retour urgent d'un nombre important de ressortissants américains qui se sont retrouvés dans des aéroports saturés en raison de la mise en place de règles d'entrée sur le territoire visant à séparer les personnes montrant des symptômes évidents (température, déclarations volontaires, ...). Le retour des populations expatriées a été un premier moment remarquable.

Le carnaval de La Nouvelle-Orléans a fourni un second épisode dramatique. Les autorités de l'état de Louisiane ont affirmé ne pas avoir reçu d'alerte d'aucune nature relativement à l'épidémie, et ont maintenu ce carnaval qui a eu lieu le 25/02/2020.

Le 09/03/2020 on constate un premier cas, le 16/03/2020 une centaine, le 20/03/2020, 300 cas sont dénombrés, et environ 1.000 cas le 25/03/2020.

La Nouvelle-Orléans et ses 400.000 habitants sera mise en confinement le 20/03/2020, et l'état de Louisiane, 4,6 millions d'habitants le 24/03/2020.

Au 16/04/2020 la Louisiane compte 22.532 cas et 1.156 décès.

La politique retenue aux USA n'a pas mis en application de règles de confinement uniformément sur l'ensemble du territoire fédéral. La reconnaissance de l'épidémie a été fortement retardée. L'arrivée de l'épidémie sur l'état de New-York a provoqué une poussée

Il n’y aura plus de village d’irréductibles gaulois

Outre les premiers cas importés, de personnes qui revenaient de Chine entre le 20 janvier et début février, la première alerte française importante est donnée à partir du cas de plusieurs personnes, 4 adultes et un enfant, détectés covid+ le 09/02/2020. Ces personnes séjournaient dans un chalet aux Contamines-Montjoie en Haute-Savoie. Ils avaient été en contact avec un compatriote britannique qui revenait de Singapour.

Outre ces cinq nouveaux malades, six autres personnes qui résidaient dans ce chalet de la station au même moment, ou ayant été en contact proche avec ce « cas initial » rentré le 28 janvier en Angleterre après quatre jours sur place, ont également été hospitalisées par précaution. Depuis, des tests ont révélé qu’elles étaient hors de danger.

Six autres personnes qui séjournaient dans le même chalet ont été testées et considérée non contaminées. Un programme de tests portant sur l'ensemble des personnes présentes dans le village des Contamines a été réalisé.

A ce stade, les autorités sanitaires considéraient qu'il n'y avait pas d'épidémie en France. Ce cluster, parfaitement identifié, a fait l'objet d'une alerte immédiate et circonstanciée de la part de l'ARS. La situation a été maîtrisée par la technique de la mise en isolement. L'expérimentation de la remontée, depuis les cas primaires vers les cas contacts a permis de valider un certain nombre de points dans la gestion de crise ponctuelle et localisée.

Pour la France les cas de Creil et Mulhouse sont symptomatiques d'une gestion de crise plus approximative.

Creil est la base de l'Airbus A340 qui a rapatrié 193 ressortissants français asymptomatiques venant de la région de Wuhan. Les personnels de vol, équipés de FPP2, n'ont pas posé le pied à terre en Chine. L'opération menée le 31/01/2020 est clôturée par la mise en quatorzaine de l'équipage à Creil. Il aura fallu un mois pour comprendre qu'un des aviateurs a été contaminé, que 18 passagers ont été détectés contaminés fin février, et la traçabilité complète de la mission au niveau des personnels et des personnes transportées est devenue approximative.

Deux autres transports de rapatriement, civils, ont été organisés les 02/02/2020 et 09/02/2020.

L'OMS, dans le cas des rapatriements français, ou américains, avait émis un avis négatif sur de tels mouvements qui étaient considérés à haut risque. La dispersion de covid en France sur la base des entrées liées aux rapatriements est à ce jour encore mal mesurée.

Le cas de Mulhouse est mieux identifié. Le 17/02/2020 débute un rassemblement évangélique de 4 jours, réunissant 2.500 personnes venant de toute la France. Pendant ces 4 jours, les participants vont passer des heures enfermées dans un lieu clos. Ils auront même des moments de pause pendant lesquels ils vont prendre l'air dans les environs du lieu de rassemblement. Une première estimation a été donnée à chaud sur le nombre de personnes contaminées pendant l'évènement, de 1.000 cas.

Le médecin qui participait à cet évènement a réhaussé cette estimation ensuite à 2.000 cas. Les participants ont eu le temps de repartir à travers l'ensemble du territoire français, comprenant la Corse et l'Outre-Mer, avant que les services hospitaliers et de santé publique ne comprennent la situation. La presse relève l'étonnante séquence du président de la République française, qui est en visite le 18/02/2020 à Mulhouse, et auquel les fidèles du rassemblement évangélique rendent visite en venant à sa rencontre alors qu'il se trouve à quelques centaines de mètres du lieu de rassemblement. Le président se plie au jeu des selfies avec une foule heureuse de partager un moment avec lui. Le trajet dure alors une heure et quarante minutes pour cent mètres parcourus tant il y a de gens massés autour de lui.

Les premiers symptômes ont été signalés le 19/02/2020 par quelques personnes, toux, fièvre. Des tests positifs sont trouvés avant la fin de l'évènement et le retour des participants chez eux.

En Corse des personnes signalent des symptômes dès le 24/02/2020 mais ne seront testées positives que le 05/03/2020.

Le 07/03/2020 on compte 11 cas à Ajaccio, 12 nouveaux cas le 08/03/2020 et encore 10 nouveaux cas le 09/03/2020. La traçabilité des personnes a été fortement cherchée et retrouvée dans le cadre du rassemblement de Mulhouse.

Le lien effectif entre tous les cas de personnes qui signalent, après la fin du rassemblement de Mulhouse, des symptômes pouvant faire penser à covid, ne sera fait par l'ARS Grand-Est que le 02/03/2020. Bien trop tard pour maîtriser la situation. La région est sous l'emprise épidémique, mais l'ensemble du territoire français également.

Aucune alerte particulière n'a été levée entre le 20/02/2020 et le 02/03/2020 malgré le nombre de personnes ayant signalé des symptômes grippaux sévères. La première alerte est venue d'un contact avec l'ARS Occitanie qui avait découvert un patient ayant les symptômes covid, qui avait été testé positif, et dont le parcours passait par le rassemblement de Mulhouse, avec un voyage retour sans possibilité d'avoir contracté la maladie à aucun autre endroit.

Le système d'information des ARS n'est donc pas d'un niveau de préparation suffisant pour aborder le basculement épidémique d'une région.

En France, un évènement exceptionnel a pu être un amplificateur significatif dans la propagation de la pandémie. Le 15 mars a eu lieu le premier tour d'élections municipales, qui a été maintenu après de longs échanges entre dirigeants politiques. La controverse portait sur le maintien ou l'ajournement de ce scrutin populaire. Le pays est à cette date parfaitement informé de la pandémie en cours, les épisodes de Creil et de Mulhouse se situant plus de deux semaines auparavant.

La décision du maintien du scrutin a vu la mise en place des bureaux de vote, par dizaines de milliers, pour accueillir les électeurs devant choisir les 500.000 conseillers municipaux de 35.000 communes. Ce scrutin, malgré un faible taux de participation, verra 20 millions de personnes se présenter pour voter dans les bureaux, tout au long de la journée. La journée terminée, ce sont plusieurs centaines de milliers de personnes qui vont assurer le dépouillement des votes. Parmi eux de nombreux candidats, représentants ou sympathisants politiques et personnes volontaires pour aider au dépouillement.

La polémique concernant le maintien de ce scrutin dans les conditions exceptionnelles d'une pandémie naissante n'est pas close à ce jour. Le nombre personnes contaminées dans le cadre du scrutin est totalement inconnu, nulle trace d'étude sérieuse n'existant à ce sujet. Mais il a été toutefois reporté par voie de presse des cas de décès remarqués parmi les candidats à l'élection, ou même parmi des élus lors du scrutin. Aucune statistique précise n'était disponible au moment de la rédaction de la présente analyse, mais on compte quelques dizaines au moins de candidats qui ont été porteurs de SARS-Cov2, et quelques cas de décès identifiés.

Rapporté à la population qui a été mise en contact lors de cette journée de scrutin, et bien que des mesures barrières et de distanciation aient été proposées, le seul passage de millions de personnes dans des locaux pouvait poser problème, et plus certainement les opérations de dépouillement, qui se font dans des locaux souvent plus restreints, avec manipulations répétées des matériels de scrutin et qui mettent en contact prolongé et rapproché les personnes réalisant les comptages et les vérifications ne peuvent pas ne pas avoir induit des contaminations répétées. Ce sont très probablement des milliers de personnes au moins qui ont été contaminées ce jour-là.

Anticiper la crise

Au total, et pendant cette première phase pandémique, tous les pays ont dû mettre à contribution leur système de santé. Que celui-ci soit public ou privé, la nature de la maladie, la force contagieuse ont fait que le nombre de patients ayant des symptômes sévères est devenu rapidement élevé.

L'éventualité d'une pandémie de nature virale pouvant correspondre à la pandémie covid-19 n'était pas quelque chose d'inconnu. Depuis un certain nombre d'années une telle hypothèse a été évoquée, analysée, documentée, et a fait l'objet d'une intégration dans les procédures courantes de gestion de crise tant pour l'OMS que pour les administrations centrales en charge de la santé dans tous les pays membres de l'ONU, et de ce fait adhérant à l'OMS.

La France est dotée de plans de crise dont le plan ORSAN et le plan pandémie grippale sont les outils les plus pertinents face à la pandémie covid-19. De tels dispositifs existent dans la plupart des pays, à minima pour savoir lire et interpréter les informations données par l'OMS. Pour les pays les mieux dotés en moyens et ressources, la mobilisation rapide de ceux-ci est décrite dans les plans associés à la gestion de crise sanitaire de type pandémique.

Bien avant la déclaration USPPI, tous les pays adhérents à l'ONU et à l'OMS disposent des informations, et ont pu le cas échéant mettre en place les moyens prévus pour faire face à une crise, qui était clairement prévisible, et donc connue dans sa forme. Au moment où les signaux deviennent évidents qu'une crise sanitaire majeure est en cours, soit au plus tard le 30/01/2020, nul ne peut ignorer la situation.

Et nul ne peut ignorer les recommandations pressantes de l'OMS, qui, à minima, rappelle les dispositions à prendre en matière de distanciation, confinement et isolement, et toutes mesures barrières utiles permettant de ralentir la progression de la pandémie. Ces dispositions n'ont pas vocation à faire disparaître la maladie qui se développe au sein des populations, mais d'en retarder la propagation le plus possible, dans deux buts simples : limiter la mise à contribution des ressources de santé, personnels, hôpitaux, et gagner suffisamment de temps pour tenter de trouver de nouvelles parades. Ces mesures ont en outre un réel effet bénéfique sur la santé des populations qui, moins exposées, sont mieux protégées contre les symptômes aggravés.

Gérer ou ne pas gérer la crise, telle est la question.

Devant la progression de l'épidémie, aux États-Unis, et au rythme de celle-ci, les mesures fortes de distanciation et de confinement semblent être les seules valables à court terme pour permettre d'organiser la maîtrise et les ripostes face à la menace vitale.

L'état de New-York, et la ville plus particulièrement subissent des pertes en vies humaines qui se sont accélérées à l'instar de ce qui est observé partout, et particulièrement au regard d'une densité de population très élevée en zone urbaine.

On constate que la progression du nombre de cas détectés est comparable à la progression du nombre de décès, sans que rien ne vienne modifier les courbes relativement aux moyens et ressources hospitaliers mis en œuvre. Seules les mesures de confinement et de distanciation strictes, imposées par une réglementation, ou adoptées par la population, font fléchir la courbe des cas et décès. On l'observe particulièrement bien en affichant les courbes sur une échelle logarithmique associée aux dispositions prises sur le plan sanitaire selon le calendrier des évènements.

Rompre à court terme les mesures prises, si on observe le stock de cas actifs, ne peut que condamner des populations démunies de toute possibilité d'échapper aux symptômes aggravés à se voir exposées à des décès toujours plus nombreux.

Malgré la précision très aléatoire des données disponibles, comparer les courbes des cas, des "actifs", des "guéris" et des décès permet de manière très précise d'obtenir une estimation prospective des décès à venir. Et cet exercice simple montre des projections dramatiques sur les semaines qui viennent en termes de décès.

Dans le cas des Etats-Unis, on ne peut qu'être stupéfait de la politique conduite au niveau fédéral et qui ne prend pas en compte l'intérêt général des populations, y compris en contestant les mesures protectrices prises au niveau des états qui conservent une latitude de décision.

On peut mentionner le cas du Brésil, pays qui a connu une prise de décisions aléatoire et retardant la prise en compte des recommandations de l'OMS. Le Brésil montre à ce jour une progression forte des cas, une progression moins marquée des décès, et compte tenu de la nature même de la démographie brésilienne, avec des foyers denses de populations ayant difficilement accès à un niveau de développement humain élevé, le réajustement des décès par rapport aux cas sera durement ressenti dans les semaines à venir.

Il apparaît clairement, à l'analyse des données, que les populations les plus démunies se retrouvent plus fortement exposées à la contamination.

Il n'est pas évident que les personnes contaminées soient plus ou moins exposées à des décès à terme selon le niveau socio-économique. Sauf éventuellement sur un point, les foyers épidémiques importants peuvent connaître une surmortalité élevée mais qui n'apparaît pas dans les données spécifiquement fournies dans le cadre de la pandémie. Il faut croiser d'autres informations permettant d'estimer la surmortalité, toutes causes confondues.

C'est un des aspects qui devrait être impérativement mis en relief par l'ensemble des autorités de santé dans le monde, bien que ceci représente un exercice qui peut soulever des considérations politiques. On ne tient pas assez compte du risque d'exposition accru de populations spécifiques à covid-19, en raison de la densité de population, et du niveau de développement socio-économique.

L'évidence montre la fragilité des personnes plus âgées, ou exposées à des comorbidité particulières, telles que l'obésité, le diabète, les difficultés respiratoires ou cardiaques, par exemple, le statut socio-économique est particulièrement écarté, et il semble pourtant bien représenter un facteur d'exposition différenciée.

Mais la difficulté première et majeure dans la compréhension de la pandémie et de ses effets sur les populations est le manque de précision ou de sincérité des données statistiques fournies par les systèmes nationaux de santé. Et cette carence est funeste dans ce sens que l'information aux populations est une des clefs essentielles de maîtrise sur la menace.

C'est aussi et d'autre part une clef fondamentale pour focaliser les efforts de mise au point de protocoles de soins et de recherche de nouveaux remèdes. Connaître mieux les nombres de cas et de décès réels sur des périmètres géographiques permet d'envisager des plans de mesures protectrices, de déployer préventivement des équipements et des ressources permettant d'éviter des erreurs simples.

Des réservoirs explosifs pour le virus 

Le cas de la surmortalité importante constatée dans les établissements de soins aux personnes dépendantes en France est un enseignement particulièrement intéressant de ce point de vue.

Si l'ensemble des pays n'ont pas su, et ne savent toujours pas être extrêmement précis sur la mesure de l'épidémie, sur l'inventaire des patients atteints, guéris, sur les décès, on ne peut pas situer l'approche française parmi les pires. La mesure statistique est faite depuis le début de l'épidémie au niveau des centres hospitaliers habilités à traiter des patients covid. C'est une approche efficace pour s'assurer la meilleure visibilité et prise en charge de la maladie.

Mais, il se trouve que covid-19 est une maladie confusante sur son installation et son développement au niveau de chaque patient. La contagiosité est précoce, souvent plus précoce que les premiers symptômes, et le développement de symptômes aggravés peut se faire sur un cycle court chez les personnes surexposées. Il n'a pas été anticipé de surveillance particulière dans les Ehpad français, majoritairement gérés par des organisations privées (56% privé lucratif et non lucratif, 44% public) qui ont fait le choix pour une part d'entre eux d'une optimisation sévère des moyens et ressources affectés aux patients. La gestion des établissements sociaux et médico-sociaux (ESMS) plus généralement n'a pas été prise en compte de manière suffisante.

Les ESMS ont été dès lors exposés à une pénétration brutale de covid, et un dénuement des personnels mis à disposition pour faire face à une situation qui a rapidement dégénéré. La surmortalité qui en a résulté au niveau des patients hébergés est une chose, et la mesure des décès en ESMS est devenue une donnée lourde dans le bilan. On compte au 17/04/2020 approximativement 60% de décès en centres hospitaliers, toutes prises en charge confondues, et 40% en ESMS. Il s'agit bien des niveaux obtenus sur l'ensemble des décès comptés. Dans la mesure où la France décompte les décès covid sur la base de tests confirmés du vivant ou post-mortem, il s'agit à priori de résultats sincères, mais toutefois il semble que les tests post-mortem pour les populations ESMS ne soient pas exhaustifs. Le bilan est dans tous les cas particulièrement sévères si on admet que les patients décédés en ESMS sont des patients qui n'ont tout simplement pas pu être acheminés vers les services d'urgence en raison de l'encombrement du système hospitalier.

Comment bien suivre l’avancée d’une pandémie

Le cas de l'Espagne est de ce point de vue comparable à celui de la France, avec un système hospitalier moins bien équipé pour l'Espagne, qui a connu un basculement fort de l'hospitalisation vers le privé ces dernières années. Une donnée indicative bien précise est une aide à la compréhension de l'évolution de l'épidémie d'un pays à l'autre. Il s'agit du nombre de "lits de réanimation", comprenant en principe des dispositifs de type respirateurs.

Il n'est pas démontré avec la plus grande précision que le ratio du nombre de places disponibles en réanimation par rapport à une population ait un impact toujours à proportion d'un pays à l'autre, mais il y a une tendance qui s'exprime. Cette tendance est difficile à évaluer en raison du fait que les protocoles d'assistance respiratoire sont également mis en cause dans l'issue fatale du traitement de patients ayant développé des symptômes aggravés. Le travail d'analyse des soignants, partout dans le monde, est en cours pour tenter de mettre au clair les meilleures pratiques en matière de protocoles de soin pour les patients pris en charge par un établissement hospitalier, avec ou sans intégration en service de réanimation.

Ce qui semble évident est que la partie la plus active des stratégies connues de réponse à la pandémie est la meilleure connaissance possible des situations de contamination au cas par cas, et l'isolement des personnes contaminées en vue d'être hospitalisées en derniers recours lors d'épisodes de symptômes aggravés ou au mieux d'un confinement renforcé jusqu'à décroissance des symptômes et disparition d'une charge virale contaminante.

Cette pratique est celle qui est appliquée de diverses manières dans quelques pays qui ont maîtrisé le plus tôt possible les mesures les plus élémentaires de distanciation ou de confinement permettant ainsi de cloisonner les risques de contagion accélérée.

Faute de disposer dans un premier temps de meilleurs moyens de protection, la mise à disposition de masques antiprojection, ou mieux de masques filtrants a été, et reste le premier rempart efficace contre l'épidémie.

Les traitements en cours d'évaluation qui auraient pour propriété de réduire la charge virale des personnes, et de ce fait d'en écarter les risques de symptômes aggravés, semblent être une approche séduisante, mais dont le résultat tangible est à ce jour non démontré explicitement.

La réponse immunitaire des personnes à l'exposition au virus SARS-Cov2 est désormais en voie de meilleure compréhension, et il semble malheureusement que l'apparition d'anticorps efficaces soit constatée en très faible proportion au sein de populations contaminées, avec un recul désormais de plusieurs semaines.

Ce point laisse imaginer qu'une stratégie vaccinale est pour l'instant lointaine, et que les résultats d'un vaccin qui serait proposé avec de bons résultats cliniques devraient être confirmés seulement sur le long terme. Il est également désormais évident que les stratégies d'immunité collectives sont à écarter, la mortalité constatée au sein des populations étant sans commune mesure avec une immunité individuelle au développement incertain.

Des résultats encore mal évalués de recontamination de patients ayant déjà été "guéris" contredisent les chances d'immunité individuelle pour les patients déjà contaminés.

Il existe d'autre part peu de données fiables renvoyant le niveau de contamination et d'exposition à des symptômes légers, forts ou aggravés, basées sur des tests exhaustifs de populations générales. Mais les quelques études significatives, qui s'ajoutent aux mesures ponctuelles de tests réalisés de par le monde permettent de constater des ordres de grandeur à affiner : une personne sur cinq parmi une population générale est susceptible de développer des symptômes significatifs. On ne connaît pas le statut d'immunité des personnes n'ayant pas développé de symptôme. Parmi les personnes ayant développé des symptômes significatifs, et qui ont consulté un médecin, de ville ou hospitalier, une personne sur dix est susceptible de développer dans un délai de quelques jours à quelques semaines des symptômes aggravés, majoritairement liés à des comorbidités, et exposant ces personnes à une issue fatale, y compris et fortement pour les personnes ayant été admises en services de réanimation avec respirateur.

Ce point peut sembler contredire l'idée qu'il y a une corrélation forte entre le nombre de lits de réanimation et la "performance" d'un système de santé à soigner les personnes atteintes. Il y a donc lieu d'affiner les observations et les conclusions à en retirer. Mais cela semble montrer que les personnes à risques doivent impérativement être protégées le plus efficacement possible contre les risques d'infection. Et la protection la plus évidente est portée par les mesures barrières et de distanciation.

Le confinement ça fonctionne ou pas ?

Les différences de performances entre systèmes de santé nationaux font ressortir également que le confinement strict au foyer est une disposition de second choix, apparaissant comme un dernier rempart lorsque les possibilités moins contraignantes ont été épuisées.

La problématique du confinement au foyer est simple. Soit elle consiste en un confinement strict et sans contact avec le milieu extérieur et l'efficacité de ce confinement est rationnelle, soit le confinement est modérément strict et permet toutefois aux personnes de circuler pour un motif autorisé, approvisionnement, déplacement professionnel, ...  et l'efficacité d'un confinement perméable est explicitement faible. En effet si le confinement permet d'éviter la sortie de personnes contaminées dans le milieu extérieur, la perméabilité, même modérée de ce confinement n'évite pas, bien entendu, le risque d'entrée du virus dans un foyer.

Le confinement au foyer est d'autre part une méthode qui cloisonne les personnes en nombre restreint, mais il alimente considérablement le risque de contamination de l'ensemble d'un foyer si l'un de ses membres est porteur du virus. Le confinement au foyer est donc un second choix puisqu'il ne prétend pas protéger de la contagion présente, mais seulement de cloisonner partiellement la propagation. Et le confinement au foyer est un risque de voir augmenter les cas et les décès par risque de contagion forte à l'intérieur des foyers. C'est ce qui est observé, en France, par exemple, avec les ESMS, à une échelle intermédiaire. La problématique des ESMS est devenue visible en raison de la population moyenne de ceux-ci, mais elle existe avec une granularité plus fine dans le cadre du confinement au foyer.

Le confinement strict, quoi qu'il en soit, s’il a été choisi pour tenter de maîtriser la situation, pose un problème particulier supplémentaire, qui est le déconfinement. On ne peut pas envisager l'hypothèse de voir l'épidémie disparaître. Il est possible qu'après une période de confinement l'épidémie devienne dormante, on ne doit pas pour autant croire à l'éventualité d'une disparition totale du virus. On sait par expérience que les pathogènes les plus virulents peuvent être réduits à néant uniquement dans le cadre de politiques vaccinales durables, et il est même apparu que l'arrêt d'une politique vaccinale pouvait montrer que le pathogène n'était que dormant.

Et le déconfinement c’est comment ?

Le déconfinement est donc un moment clef d'une stratégie de défense face à la menace épidémique. En effet, le déconfinement expose toute la population à une contagion temporairement dormante. Et il ne doit être pensé, de ce fait que comme un cycle nouveau de risques d'exposition.

Un déconfinement devrait donc reprendre la liste des possibilités proposées pour lutter contre la pandémie : si possible isoler les personnes infectées, utiliser systématiquement les mesures barrières et de distanciation, confiner les périmètres de population trop exposées.

Pour gérer correctement la mise en surveillance, et en alerte éventuel du système de santé, le déconfinement devrait se faire par périmètres restreints pour éviter la saturation du système de soins.

Nous ne disposons actuellement que de peu d'exemples de première phase aboutie de lutte contre la pandémie et de déclenchement de politiques de phase 2. La Chine nous propose un tel exemple, avec une complexité qui rend le parcours du pays peu lisible. D'une part la Chine est un pays immense et d'autre part les données chinoises sont incomplètes.

Nous pouvons également regarder la situation de la Corée du Sud qui semble maîtriser l'épidémie, avec une prise en charge, en phase 1, d'un niveau de tests, de mise en isolement, en confinement, et l'application sévère de mesures barrières et de distanciation, qui permet à ce pays d'avoir évité un arrêt majeur d'activité, et un passage en phase 2 qui se fait sans contraste notable. La Corée Sud a peu interrompu l'activité des populations, rouvert des activités mises au ralenti, et ne connaît pour l'instant pas de rebond significatif en termes de cas et de décès.

Singapour est un autre exemple, comparable à la Corée du Sud au niveau de la gestion de l'épidémie, mais on y a rencontré récemment un pic inattendu de nouveaux cas. L'hypothèse d'un pic de seconde vague est bien entendu retenue, avec toutefois une explication qui pourrait être liée à un confinement insuffisamment strict en particulier pour permettre à l'activité économique de se poursuivre. Singapour compte une forte communauté immigrante pour soutenir l'activité économique, et le relâchement de la première phase de confinement aurait induit un retour notable de personnes sur le territoire potentiellement covid+. Ce point reste à vérifier.

L'Allemagne, dont la gestion de crise a été fortement basée sur des tests autant systématisés que possible et des pratiques d'isolation, a évité un confinement sévère et un arrêt drastique d'activité. La mise au ralenti de l'économie et des activités y a été cependant très marqué. Ce pays connaît aujourd'hui un nombre de cas élevé, un nombre de décès plus faible que la moyenne des pays dans le monde, cette dernière donnée étant sujette à débat en ce qui concerne la sincérité de comptage. L'Allemagne ne décompte pas les décès covid de manière comparable à d'autres pays, elle n'est pas la seule dans ce cas, en ce que les décès ne font jamais l'objet de test pour les cas non préalablement associés à covid. De ce fait, on sait que le nombre de décès covid en Allemagne n'est pas qualifié de la même manière qu'en France par exemple.

Par contre, et indépendamment de la qualité des données en continu, on observe que la signature des courbes cas / décès pour l'Allemagne renvoie à une stabilisation marquée de la contagion. Ce pays est en voie d'instaurer un déconfinement, mais semble faire partie déjà du cortège des pays en phase 2 sans rebond apparent à ce jour. Toutefois, il est possible que la qualité des données soit la bonne explication et que de ce fait les courbes cas / décès ne représentent pas l'exacte réalité de terrain. Dans ce cas, l'Allemagne se trouverait encore strictement en phase 1 avec un risque majeur de rebond sévère en cas de déconfinement significatif.

Alors on en est où ?

Nous faisons face à une pandémie, ceci est une réalité. Nous savons, collectivement, dans les milieux experts avec une grande acuité, au sein du public avec confusion parfois, mais nul ne peut douter de la réalité de la pandémie, nous savons ce que peut représenter une pandémie en termes de risques.

Nous avons, au moins dans un certain nombre de pays, développé des réflexions et des stratégies de sécurité qui reposent sur des plans de continuité et des plans de reprise d'activité. Ces termes, techniques, signifient que l'on prend en compte l'ensemble des aspects humains, économiques, sur les plans sanitaires et aussi relativement aux activités. Activités du quotidien, productives et essentielles.

Ces plans existent. Ils sont aussi bien des guides méthodologiques et servent à l'explication utile visant à aider professionnels et non professionnels à connaître les meilleures pratiques à adopter pour permettre de poursuivre une activité globale, en totalité, partiellement, ou encore à interrompre des pans entiers de l'activité pour se donner les moyens de mieux réussir à dépasser la crise.

Le plan pandémie français prévoyait de manière précise un certain nombre de mesures, des moyens stratégiques, des fournitures, consommables, réquisitions de moyens et ressources visant à organiser une réaction de l'ensemble de la société pour faire face à la menace.

Un tel plan existe également dans tous les pays, soit développé spécifiquement, soit dupliqué à partir du travail réalisé par d'autres pays, ou centralisé par l'OMS.

A ce jour, peu de pays ont appliqué l'ensemble des dispositions notées dans ce type de plan. Ceux qui l'ont fait ont obtenu des résultats probants. Ceux qui ne l'ont pas fait de manière suivie ont obtenu des résultats plus aléatoires.

Les résultats en termes de protection des populations et des économies sont aujourd'hui complexes à bien mesurer, en particulier en raison de l'exactitude moyenne à très modérée des données utilisables pour aider aux décisions impératives qu'impliquent la menace pandémique.

La pandémie covid-19 est une pandémie originale dans ce sens qu'elle met en jeu un virus nouveau, dont la dangerosité est particulièrement élevée.

On ne parvient pas à ce jour à historiser avec une précision suffisante l'origine de la pandémie, pas plus que son évolution, en raison de données insuffisamment qualifiées.

Mais alors c’est quoi qui fait que c’est compliqué à comprendre tout ça ?

De ce point de vue, les questions qui se posent relativement à la sincérité des autorités chinoises sont légitimes. Les données brutes les plus élémentaires, nombre de cas détectés, nombre de décès, sont suspectes pour la simple et évidente raison que l'épidémie de la province de Hubei, où est située la métropole de Wuhan, ne reflètent aucunement une évolution réaliste de la pandémie.

Le point de départ même de l'épidémie est un sujet de confusion. Le marché traditionnel de Wuhan qui a été mis en avant comme source première ne fait pas trop illusion sur l'idée que les premières contaminations, datées de décembre 2019, ne fixent pas de patient zéro.

Un manque de précision dans le système de santé du Wuhan est possible, un manque de sincérité représente une autre éventualité. La proximité d'un laboratoire P4 à quelques centaines de mètres seulement de ce marché laisse libre cours à l'opinion publique, ou à la presse, sur des interprétations hasardeuses.

L'hypothèse d'une origine artificielle de SARS-Cov2 est une de ces dérives d'interprétation, hypothèse qui peut être rejetée sans ménagement, les manipulations génétiques possibles par séquençage d'ADN/ARN ne proposant pas de solution à priori, qui permettrait de passer d'un virus à ARN connu à SARS-Cov2, selon nombre de spécialistes de l'étude ou de la recherche sur les manipulations génétiques. Par contre, la culture d'un pathogène dans un laboratoire P4 est une chose courante, et l'éventualité d'une erreur ou d'un accident qui aurait propagé un tel pathogène en cours d'étude peut être interrogée. Les acteurs travaillant dans ce laboratoire de Wuhan sont principalement chinois, mais il a également été développé des partenariats de recherche, antérieurement avec la France, qui était coopérant à la construction et la mise en œuvre du laboratoire, coopération qui a été mise en retrait ces derniers temps, et avec les États-Unis. Il n'y a pas eu plus d'investigations faites concernant l'alerte escaladée par les autorités chinoises sur la possible interaction de chercheurs américains sur l'émergence épidémique. La "querelle" sino-américaine a de quoi surprendre dans la mesure où des intervenants américains rentraient de Wuhan vers les États-Unis au mois de novembre 2019. Ils étaient donc probablement assez bien informés des activités qui se pratiquaient dans le laboratoire P4, juste avant les prémisses de la pandémie.

Par contre les questions posées relativement aux bonnes pratiques menées dans le laboratoire P4, posées aussi bien par l'OMS, que par des spécialistes de diverses origines, semblent ne pas recevoir de réponses bien précises de la part des autorités chinoises compétentes.

L'origine naturelle ou artificielle de SARS-Cov2 est donc un point sur lequel il faudra apporter une réponse. Et rien ne dit que le laboratoire P4 soit directement acteur dans l'émergence du virus, il est possible que ce dernier soit apparu au sein de la population de Wuhan par accident.

Quelques témoignages de médecins, américains d'une part, et italiens d'autre part, ont fait été de cas de patient qui auraient montré des pathologies de type pneumonie sévères, dès le mois de novembre peut-être tant aux États-Unis que dans le Piémont ou en Lombardie pour l'Italie. La traçabilité des cas correspondants semble être impossible, s'agissant de cas qui n'ont pas été perçus comme relevant des obligations spéciales de traçabilité de maladies classifiées.

Il se peut que dans le futur de meilleures informations infirment, ou confirment de tels cas qui expliqueraient une origine différente de la pandémie.

Toutefois, il semble qu'une information solide explique bien le point de départ, ou le premier épicentre de la pandémie, situé à Wuhan, et indépendamment de l'explication sur son origine première. Un banquet géant aurait réuni 40.000 personnes, ou familles, l'information est à préciser, pour célébrer le PCC et son président, le 18/01/2020. Ce banquet est documenté par voie de presse le lendemain. Il semble, selon la source presse locale que lors de ces festivités des personnes déjà malades aient été vues, on mentionne des artistes présents pour animer la fête qui ont assuré le spectacle malgré des symptômes de toux et des masques portés.

L'ordre de confinement a été donné à Wuhan le 23/01/2020. Entre le repas géant et la décision de confinement se sont écoulés 5 jours. Au moment où l'ordre de confinement est annoncé, il reste quelques heures de battement avant le blocage effectif. Il est rapporté que Wuhan se serait vidée de cinq millions d'habitants pendant ces quelques heures La métropole au grand complet représente entre onze et douze millions d'habitants.

Un point particulier qui est reproché à la Chine par la communauté internationale est que la gestion de l'épidémie y a manqué à tout le moins de transparence. Des observateurs mentionnent à la mi-janvier qu'il pourrait se trouver déjà plusieurs dizaines de milliers de personnes contaminées (sources hongkongaises). Il est évoqué à l'époque le manque de volonté de transparence de l’État chinois, le manque de professionnalisme ou l'intention politique du PCC local, ou encore plus simplement une bureaucratie inadaptée du système de santé qui ne comptabilise pas les malades en raison d'un système de prise en charge imparfait ou élitiste.

Il est remarquable que la mention d'un nombre déjà élevé de cas soit faite à la mi-janvier, jusqu'à 40 ou 50.000 cas évoqués, alors que le pays reconnaît quelques milliers seulement. Et il est remarquable doublement que le banquet de Wuhan viendra modifier considérablement les choses quelques jours après.

Aucune donnée épidémique précise ne permet de situer l'ampleur de la dispersion épidémique pendant cet épisode, mais l'épidémie en Chine a connu son premier foyer majeur à Wuhan, avec une dissémination probable sur l'ensemble du pays ensuite. D'un évènement qui aurait réuni plusieurs dizaines de milliers de personnes, et à la vitesse que l'on connaît de de propagation interpersonnelle du virus, on peut imaginer que le nombre de cas au bout de 5 jours et pour la Chine entière est nécessairement sans rapport avec les données brutes annoncées. La Chine expose en effet des données plates, avec un nombre de cas de l'ordre de 80.000 depuis plusieurs semaines, et un nombre de décès un peu supérieur à 3.000. Une correction toute récente fait monter les cas vers 88.000 et les décès à près de 4.600. Ces données ne sont pas réalistes puisqu'elles ne reflètent pas les ratios observés à d'autres endroits, et qu'elles ne font état d'aucune variation habituellement observable de jour en jour.

Par analogie avec le cas de Mulhouse, ou 2.500 personnes sont restées des heures durant et pendant quatre jours dans un périmètre fermé, et où on a dénombré approximativement 2.000 cas dans les jours qui ont suivi, le banquet de Wuhan doit probablement être à l'origine de plusieurs milliers cas. La propagation sur 5 jours aura développé au moins dix fois plus de cas, qui se sont disséminés dans toute la Chine, et ceci sans compter le fait que de nombreux résidents étrangers ont progressivement quitté Wuhan, le Hubei, et la Chine dans les semaines qui ont suivi.

Sans connaître mieux la source première de la pandémie, on peut expliquer sa progression dans le monde entier à partir de ce seul épicentre initial et qui a pu induire des foyers aussi dramatiques que ceux de l'Italie du Nord, ou du Grand-Est français avec les suites que l'on connait.

Les politiques de santé publique face à la pandémie vues à la loupe

La solidité des politiques de sécurité pandémie d'un pays à l'autre expliquent aussi, et parfaitement bien les résultats obtenus localement dans chaque pays.

On citera particulièrement la capacité d'accueil du système hospitalier en fonction des infrastructures et moyens techniques disponibles en temps réel d'une part, et la disponibilité en pratique des mesures, consommables et fournitures permettant d'assurer les barrières et la distanciation, les tests de premier choix pour la répartition des populations contaminées ou non d'autre part.

Le cas de l'Italie est éloquent de ce point de vue avec une contamination majeure sur la région Lombardie, intermédiaire en Piémont, alors que d'autres régions économiquement actives ont été nettement moins touchées.

L'équation allemande semble montrer une meilleure réponse et sur la disponibilité d'un système de santé, système hospitalier avec un nombre de lits disponibles plus important, un réseau de laboratoires rapidement mobilisés pour effectuer des tests de plus en plus nombreux, et une disponibilité de masques, gels ... la mise en place d'une première riposte en Allemagne a montré une efficacité suffisante pour limiter la baisse d'activité à son strict minimum.

L'équation française est sensiblement la même que l'équation allemande à l'origine. Populations comparables, système de santé performant, système d'information national et local satisfaisant.

Deux différences se dégagent entre France et Allemagne. La première porte sur l'exact niveau de performance du système de santé. La France dispose d'un système public de santé important, et d'un système privé tout aussi développé. Le système public est supervisé par les agences régionales de santé. L'Allemagne s'appuie plus sur un système privé, et géré localement au niveau des Länder.

En Allemagne il existe un ministère fédéral de la santé et des ministères régionaux de la santé. En France il existe un ministère de la santé, et des agences régionales de santé (ARS). De ce point de vue le maillage est semblable.

Sur la responsabilité opérationnelle des instances régionales, il semble que le système allemand ne connaisse pas de défaillance particulière.

Pour la France il existe deux niveaux de difficultés à ce titre : la part publique du système de santé qui ne représente pas la totalité des moyens hospitaliers est la seule gérable par les ARS. Et la proposition des établissement privés de santé de s'intégrer aux réquisitions dans le cadre de la pandémie sont restées lettre morte pendant plusieurs semaines, conduisant les hôpitaux publics à totale saturation.

La gestion du parc ESMS ne relève pas, à ce jour, d'un contrôle et d'une supervision consistante de la part des ARS. Dans le cadre d'un fonctionnement en alerte pandémie, le système de santé français s'est montré particulièrement défaillant en termes de gestion de moyens. Il a été nécessaire d'avancer sur plusieurs semaines de montée en charge pendant la crise pour obtenir des résultats probants sur le plan de la surveillance, et sur celui de la répartition de moyens. Cette latence est probablement due à un manquement dans la bonne organisation des deux niveaux national et régional. Il reste à analyser plus finement les choses de ce point de vue, mais il y a un point qui ressort dès maintenant, et qui différencie aussi l'organisation des systèmes de santé entre France et Allemagne. En Allemagne, il n'y a eu besoin d'aucune intervention d'un niveau politique pour que les systèmes de santé régionaux soient activés en mode alerte pandémie. Chaque périmètre connaissait les règles, les objectifs et les moyens disponibles.

Sur le second faisceau d'éléments différenciants entre France et Allemagne, on notera l'incapacité du système français à démontrer le bon niveau de préparation du plan pandémie, sur le plan des fournitures et consommables en particulier. C'est la problématique des masques dont les stocks stratégiques n'ont pas été maintenus, et de toutes sortes de fournitures nécessaires aux plateformes de soins, ou aux populations. Il est singulier de constater que la question des masques anti-projection, simples à fabriquer, il est à ce jour toujours impossible de dater une prochaine distribution aux populations.

Ces points différenciants entre Allemagne et France expliquent bien les écarts relevés sur les données cas / décès, pour une crise sanitaire importée dans les deux pays avec un décalage faible.

Mais la rapport décès / cas, c'est à dire la mortalité au regard des cas déclarés ne donne pas des résultats suffisamment congrus pour être crédibles en comparaison. Un taux de 3,1 % de mortalité relativement au nombre total de cas "confirmés" en Allemagne est mis en face d'un taux de 17,3% en France, ce qui, même si l'on tient compte de disparités de relevés des nombres de cas / décès covid, ne peut pas être considéré comme fiable. Et l'évidence permet de supposer que les données françaises ne majorent pas le nombre de cas déclarés et le nombre de décès. Donc le nombre fourni de décès en Allemagne est inexact, ce qui est confirmé par l'information indiquant qu'aucun test post-mortem n'est réalisé, et que la seule suspicion de symptômes covid ne créé jamais l'existence d'un cas déclaré. A noter que la France ne réalise, tardivement, des tests post-mortem systématiques, la pratique ayant été abandonnée à la fois pour des raisons liées au manque de temps, et au manque de tests.

Mais, il est évident qu'une meilleure assimilation des mesures préalables au déclenchement d'un plan pandémie prévaut en Allemagne, qui a disposé de meilleures réponses en termes de santé publique, de stocks stratégiques, et à partir du déclenchement du plan pandémie, le respect strict des mesures barrières, de distanciation et d'isolement des personnes contaminées ont fonctionné à plein côté allemand.

Il conviendra de rentrer plus en détail dans les protocoles de soins en milieu hospitalier pour démontrer éventuellement des différences de résultat comparés entre les pratiques allemandes et françaises, mais on observera probablement assez peu de divergence explicables autrement que par le seul jeu du comptage administratif des décès covid qualifiés uniquement sur la base de tests effectifs en Allemagne réalisés à l'entrée, tandis que les hôpitaux français réalisent des tests pendant l'hospitalisation ou post-mortem.

Pour un aperçu des détails on pourra s'intéresser à la politique de soins en Allemagne qui a développé, par exemple, un réseau important d'assistance à la ventilation à domicile, basé sur des respirateurs non invasifs, l'intubation ayant été précocement repoussée comme moyen de dernier recours. L'un des symptômes sévères de covid étant la défaillance respiratoire. Or on sait par l'expérience actuellement développée que l'intubation devient une source de pronostic vital engagé pour des patients très fragilisés.

De ce point de vue les pratiques adoptées en France ont intégré l'intubation plus nettement en début de période pandémique pour rapidement tenter d'en retarder la mise en œuvre pour les patients pouvant tenir bon avec des moyens non invasifs.

Dans une première approche comparée des protocoles de soins hospitaliers tels qu'ils sont pratiqués sur les patients hospitalisés ou en soins à domicile en Allemagne, Espagne, France et Italie, on constate une grande uniformité des protocoles qui se rejoignent rapidement au fur et à mesure que les semaines passent, et qui montrent des résultats comparables en termes de mortalité comparée aux admissions en services de réanimation.

Les services de réanimation disposent de deux axes pour intervenir, des lits de réanimation équipés de respirateurs, ou ECMO, par exemple, avec possibilité d'intuber, cette éventualité étant de plus en plus une décision de dernier recours, et d'autre part des programmes médicamenteux basés sur les antiviraux disponibles mais dont l'efficacité est peu identifiée et jamais mesurée, forcément, sur covid, et des prescriptions complémentaires qui sont à peu près uniformément et systématiquement utilisées, tels que l'hydroxychloroquine associée à l'azithromycine. Il existe des variantes, mais globalement on retrouve les mêmes prescriptions avec des systèmes de santé qui ont accordé si besoin dérogation pour utiliser des produits hors autorisations régulières de prescription. Aucun résultat d'ampleur ne permet à ce jour de reconnaître un type de prescription qui serait plus bénéfique qu'un autre, et on constate que les services de soins sont seuls décisionnaires devant l'inconnu.

Les durées d'hospitalisation pour les patients admis en réanimation varient, avec des durées qui peuvent aller de deux à trois voire quatre semaines, et une tendance à l'allongement pour obtenir de meilleures rémissions. Beaucoup de patients traités aux urgences comme en réanimation repartent chez eux avec des symptômes qui ont disparu, pas ou peu de séquelles, mais tous les patients ayant subi une intubation ont des séquelles marquées.

Il est observé d'autre part des cas, non rares, de personnes ayant été infectées, hospitalisées, renvoyées chez elles après guérison, et qui consultent de nouveau avec un test positif alors qu'elles étaient testées négatives lors de leur sortie d'hôpital.

Les tests sont un point particulièrement délicat puisque pour les tests effectués en premier diagnostic, tests PCR, la fiabilité n'est pas au rendez-vous, et il est fréquent de constater des patients positifs après deux ou trois tests négatifs. L'un des points importants de la meilleure gestion de crise qui a été faite en Allemagne repose sur la multiplication des tests, de ce point de vue, suivie d'une isolation quasi-systématique des patients détectés positifs. L'efficacité médiocre des tests imposent de les renouveler aussi souvent que les patients l'estiment nécessaire en Allemagne.

Pour la même raison conjuguée à d'autres aspect lié à la performance hospitalière en Espagne, la gestion de crise espagnole a été rendue pendant un certain assez compliquée. Sur les zones de Barcelone et Madrid, de nombreuses personnes contaminées ont pu être renvoyées dans leurs foyers alors que les mesures de confinement n'étaient pas les plus strictes. C'est un point qui peut expliquer l'explosion épidémique, tardive, mais redoutable en Espagne.

Pour les quatre pays qui sont un peu plus observés ici, Allemagne, Espagne, France et Italie, il est à noter un point intéressant et d'ordre général, il n'a pas été observé en Espagne et en Allemagne de foyer épidémique dramatique comme cela a été le cas en France et en Italie. C'est un heureux hasard en quelque sorte, qui sert la meilleure gestion de crise en Allemagne, mais qui n'a pas le même effet bénéfique en Espagne. La comparaison des systèmes de santé entre ces deux pays est de ce fait très explicite sur les bénéfices d'une organisation plus solide en Allemagne, face à un système de santé moins disponible et peu organisé en Espagne.

Et que conclure à cette étape de la pandémie ?

De l’expérience que l’on peut d’ores et déjà retirer des premiers mois de la pandémie covid-19, il apparaît que les pays dont le système global de santé est fortement structuré par une administration centrale ayant un rôle de surveillance et des administrations régionales au pouvoir de mise en exécution associé à des moyens réels et des circuits de décision propres sont plus armés dans la réponse qui est faite face à la menace. Une meilleure préparation rend possible une bonne gestion, conforme aux modèles retenus pour les plans pandémie nationaux, qui sont très conformes aux recommandations de l’OMS. L’OMS n’est pas force créatrice de plans, mais de manière plus réaliste l’outil commun de partage de compétence et d’information au bénéfice des pays membres.

Sans qu’il ne soit exclus que des facteurs particuliers, tels que climatiques, puissent agir sur la pression exercée par la pandémie au niveau des populations de chaque pays, il semble qu’il existe une cohérence des politiques de santé publique qui permettent à des pays comme l’Allemagne, le Danemark, le bloc scandinave, d’obtenir des résultats plus satisfaisants que la partie Italie, France, Espagne par exemple. On peut également mentionner les résultats intéressants de pays comme le Portugal ou la Grèce, et on devra analyser plus finement chaque situation pour tenter de faire ressortir les points de bénéfice pour ces territoires.

On note pour le cas des États-Unis de grandes disparités de résultats, mais aussi et surtout des disparités fondées sur la démographie, et l’ampleur régulière de flux migratoires de tous ordres. Le fait que les états de New-York, New Jersey, Pennsylvanie et Massachusetts soient particulièrement touchés, ils représentent plus de la moitié des cas répertoriés aux États-Unis et nettement plus de la moitié des décès s’explique bien par le volet démographique de cette zone. C’est l’ensemble de la zone Boston-Washington qui subit l’arrivée de covid sur le territoire américain, et qui porte aujourd’hui le plus grand nombre de cas déclarés.

Il semble toutefois que sur le territoire des États-Unis l’évaluation précise des données statistiques ne soient pas au rendez-vous d’une grande qualité.

L’état de Californie qui recense environ 29.000 cas et 1.000 décès au 17/04/2020 pour un total de 740.000 cas et 39.000 décès pour l’ensemble de la fédération, est en train de réaliser une étude poussée pour gérer au mieux la crise. La population californienne est en effet un état qui regroupe environ 40 millions d’habitants, soit le double de l’état de New-York, et dont le potentiel de montée en charge de l’épidémie est très important. Les niveaux de cas détectés et de décès enregistrés avec un lien direct avec covid semblent ne pas refléter des résultats cohérents. Le système de santé californien est plutôt performant en matière de santé publique. Mais les États-Unis ont une approche particulièrement décentralisée concernant la santé. Les autorités californiennes craignent aujourd’hui de devoir faire face à une obligation de réajustement de la politique de santé qui ne prend pas bien en charge la population générale.

Un testing systématique a été réalisé sur un périmètre de la Silicon Valley, dans la zone de la Baie de San Francisco, et montre un nombre de personnes contaminées proche de 3% de la population étudiée sur le Comté de Santa Clara, population de 3.300 personnes volontaires appelées à participer au test par annonce auprès de la population générale. Ce premier test est peut-être biaisé, mais portant sur une population déjà un peu significative, on peut estimer la comparaison au taux donné par les statistiques officielles de contamination comme sérieuse. Le nombre de cas de personnes contaminées serait 50 à 100 fois supérieur à celui indiqué par les données officielles.  Cette information renvoie d’autre part au taux de mortalité sur la population générale, les décès étant bien mesurés en Californie, elle serait d’un ordre de grandeur de 0,2% de la population, à ce stade de la pandémie, sur la population générale.

Le territoire américain sera un centre d’intérêt à suivre de près dans les jours et semaines qui viennent, dans la mesure où les États-Unis ont eu une politique particulièrement disparate en matière de mesures prises pour la protection des populations. Et la discordance forte entre le pouvoir central et les administrations des états peut provoquer des résultats particulièrement mouvementés.

Dans le cas du Canada, il n’y avait jusqu’à présent pas de situation très remarquable, le virus y a fait son apparition courant février, en même temps qu’aux États-Unis. Une mesure de fermeture de la frontière entre les deux pays a permis d’assurer une certaine étanchéité pour l’ensemble du Canada.

On observe toutefois depuis quelques jours un nouveau phénomène, remarqué au Québec, de surmortalité dans les centres de soins équivalents aux Ehpad français. Ce phénomène n’est pas absent des États-Unis qui ont également des centres de soins décimés.

La mortalité qui apparaît dans ces centres, pour de nombreux pays, semble prendre un poids de plus en plus lourd dans le bilan covid. On peut trouver des ratios de 40 à 60% des décès qui ont lieu dans des centres de soins pour personnes dépendante, centres pour lesquels dans la plupart des pays concernés les politiques de santé ont confié méthodes et ressources à des opérateurs privés et laissés sans contrôle opéré par l’administration publique de santé.

D’autres informations fraiches

Sur la solidité des systèmes de santé : Avant 2008, l’Espagne consacrait près de 7 % de son PIB au secteur santé. Cette part était descendue à environ 6 % avant la pandémie actuelle, soit 7,6 milliards d’euros de coupes budgétaires. Aujourd’hui, tandis que l’État espagnol dépense 3.300 euros par habitant pour la santé, la France en dépense 4.900 (49 % de plus) et l’Allemagne près de 6.000 (81 % de plus que l’Espagne). Au détriment de l’hôpital public, au cours des dix dernières années, les dépenses en soins privés ont, elles, notablement augmenté, passant de 24,6 % du total des dépenses de santé à 29,2 %

Comprendre la situation au Portugal : Le Portugal présente une population cinq fois moins élevée que l’Espagne, avec un nombre de victimes dix fois moindre. Au 21/04/2020 on compte 21.379 cas, 19.700 malades actifs, 917 guérisons recensées et 762 décès.

Le ratio lits de soins intensifs par million d’habitants est un des plus bas d’Europe. Pourtant le nombre de patient hospitalisés y a baissé bien avant que le système hospitalier n’arrive à saturation. On relève un point qui peut avoir son importance dans la diffusion de covid : les deux grandes équipes de football, Benfica Lisbonne et FC Porto, ont été éliminées dès les huitièmes de finale des championnats de la Ligue des champions. En février, il n’y a donc pas eu de match réunissant plus de 50 000 personnes, comme à Milan et à Lyon, qui sont vite devenus d’importants foyers de contamination.

Deux premiers cas de covid ont été observés le 02/03/2020, les deux personnes entraient sur le territoire en provenance d’Espagne pour l’un et d’Italie pour l’autre. La fermeture des frontières a été immédiate. Le même jour le gouvernement fermait les écoles, trois jours avant la France dont le premier cas de covid remontait au 24/01/2020. Dans un pays qui a connu une régression importante des performances de son système de santé, les dépenses de santé par habitant y sont passées de 1.000 à 850 euros par an entre 2010 et 2013, et le plus grand hôpital du pays, Santa Maria à Lisbonne dispose de 30 lits de réanimation, pouvant être étendus à 120. Les mesures d’hygiène ont été immédiatement prises, le dépistage des personnels de santé rendu systématique.

Le Portugal entame un déconfinement à partir du 02/05/2020, en même temps que l’Allemagne mais ne rouvrira pas les écoles avant septembre. Le confinement y est observé de manière suivie jusque-là.

Le dépistage systématique de la population n’y est pas encore effectif, mais c’est l’orientation désormais voulue par une bonne partie de la classe politique.

Comprendre la situation en Grèce : la Grèce est un pays qui a connu une longue période de pression économique forte et dont le système de santé est délabré.

Au 21/04/2020 la Grèce recense 2.245 cas confirmés, 1.856 malades actifs, 269 guérisons et 120 décès.

La population de la Grèce est de 10,8 millions d’habitants, très comparable à celle du Portugal. La situation géographique et géopolitique du pays en fait un carrefour de migration. On trouve d’autre part en Grèce une population parmi les plus âgées d’Europe avec 22% de plus de 65 ans. L’obésité affecte 55% de la population.

Les dépenses de santé ont été divisées par deux en 8 ans, depuis 2009. Le nombre de lits d’hôpital y est de 4,2 par millier d’habitants (contre 4,9 en 2009), à comparer à 6 en France.

Compte tenu de la crise économique qui s’éternise, la Grèce a vu également le nombre des médecins fondre depuis 2009.

La Grèce a trouvé fortuitement avantage à ne pas être un carrefour de la mondialisation, et n’a connu que peu de passage de voyageurs internationaux, ce type de migration étant réservé aux périodes les plus touristiques.

Les mesures d’hygiène sociale ont été mises en place dès fin février, le 11/03/2020 les écoles et universités ont été fermées, et le 23/03/2020 le confinement strict mis en place.

Des mesures d’isolement complet de foyers potentiels ont été assurées. Avec 567 lits de soins intensifs pour l’ensemble du pays, le système hospitalier n’a jamais été mis en saturation.
Un programme de prescription de chloroquine dans un premier temps, puis hydroxychloroquine associée à l’azithromycine a été systématiquement proposé dès les premiers symptômes. La Grèce a assumé de nouveau une production locale, abandonnée auparavant, de produits dérivées de la chloroquine dès le mois de mars.

A l’heure qu’il est les statistiques fournies par la Grèce restent très éloignées des courbes exponentielles observées dans d’autres pays.

A propos des stocks et de la fabrication de masques en France

Il n’échappe à personne que la question des masques, anti-projection ou filtrants reste un point de discorde concernant l’efficacité de l’action de l’État, puisqu’un plan stratégique prévoyait la maintenance d’un stock disponible d’un milliard de masques dont il a été tardivement constaté qu’il n’était plus maintenu.

La communication gouvernementale, qui a entretenu l’idée que ce stock stratégique était bien opérationnel jusqu’au mois de mars a finalement changé de message, précisant que les masques n’étaient pas un élément utile en matière de prophylaxie. Ce message a bien entendu été contredit depuis.

En période de crise mondiale, l’approvisionnement en masques étant problématique, il a été constaté que la France ne disposait d’aucune capacité réelle à produire des masques.

Depuis le mois de mars et jusqu’au terme du mois d’avril, la production de masques reste exotique, et les quantités les plus significatives qui vont être produites le seront par des unités de production financées par des intérêts privés étrangers (chinois par exemple). Il est d’autre part constaté que des lignes de production qui existaient et produisaient encore il y a deux ans, ont été arrêtées et non démantelées depuis, et n’ont pas reçu de réquisition ni d’aide particulière pour être relancée, bien que ces lignes soient disponibles, que les propriétaires de l’outil de production soient demandeurs pour relancer les lignes, et que le personnel soit, bien entendu disponible pour y travailler.

La production en 2018 d’une usine bretonne était par exemple capable de soutenir 200 millions d’unités par an. Elle n’est pas redémarrée malgré la demande instante des représentants et élus locaux, la secrétaire d’État Agnès Pannier-Runacher ayant expliqué à l’Assemblée Nationale qu’il existait des alternatives proposées par d’autres opérateurs économiques. Citant Faurecia, Kolmi, Plastic Omnium, Michelin ou Brocéliande, qui ne sont pas fabricants naturels de ce type de produits, les décisionnaires gouvernementaux apportent une réponse surprenante à une urgence absolue de fabrication de masques qui font défaut en raison même des carences de l’État.

Le besoin en masques pour l’ensemble de la population, tous types confondus, peut se compter en dizaines de millions par jour. Plus précisément, si les professionnels ayant besoin d’être protégés à longueur de temps, et les particuliers, utilisent des masques conformément aux pratiques recommandées, il peut être nécessaire de consommer jusqu’à 150 à 200 millions de masques par jour. En respectant modérément les temps recommandés de port d’un masque, qui devrait être changé au bout de deux, trois ou quatre heures selon l’activité, par exemple, on imagine que le nombre de masques nécessaires est susceptible de consommer le stock stratégique initialement prévu en quelques jours.

Pour un confinement prévu jusqu’au 15/05/2020, et un déconfinement progressif pouvant s’étaler sur plusieurs semaines avec des mesures d’hygiène collective à reconduire éventuellement sur plusieurs mois, la stratégie de l’État français semble contraire à toute logique raisonnable. Une capacité immédiate de production de plusieurs dizaines de millions de masques était une urgence dès le début de la crise sanitaire, et aurait probablement pu limiter la sévérité du confinement mis en place. Cette sévérité implique la réduction drastique de l’activité économique.

L’impact d’une politique manquée sur le dossier des masques induit un confinement plus strict, qui a pour conséquence un arrêt plus brutal de l’économie française. Il en va de même en Italie, en Espagne, où la mise au pas de l’économie a été sévère. Les pays mieux préparés, ou moins touchés par l’inadéquation du système de santé au regard de la crise ont également mis en place une période de confinement, mais dont ils vont sortir plus tôt, et dans de meilleures conditions de reprise.

Des politiques de santé en général, et de celles qui ont échoué à maîtriser rapidement la pandémie

On ne peut pas attribuer les bons ou mauvais résultats de chaque pays à la seule capacité de réaction du système de santé. La menace est sanitaire, la réponse est à la fois sanitaire et organisationnelle.

Et la menace semble ne pas être uniforme d’un pays à l’autre, ce qui est un point observable en regardant simplement la carte mondiale de l’avancée de la pandémie jour après jour. L’hémisphère nord a bien plus souffert jusqu’ici de covid que l’hémisphère sud, ce qui peut en partie s’expliquer par le déséquilibre global des terres émergées et habitées, et les densités fortes de population dans une partie l’Asie et en Europe. Toutefois différentes observations laissent penser à une signature saisonnière probable de covid. Sans qu’on sache l’expliquer de manière plus précise et rationnelle, on constate que les zones de propagation forte sont situées dans les régions dont le climat est moins affecté par la période hivernale, ou la douceur intertropicale.

Des corrélations météorologiques ont été proposées également qui tendraient à montrer une aggravation de la contamination liée à une humidité plus élevée du climat local. Ce sont des points à revérifier avec un recul plus important.

On admet toutefois d’ores et déjà un risque élevé de développement dramatique de la pandémie dans des zones comme Sao Paulo ou Rio de Janeiro, au Brésil, lors du basculement saisonnier. Les pays d’Amérique du Sud sont particulièrement visés et observés avec attention.

Si les données et courbe australienne semblent être moins inquiétantes, le cas de l’Afrique du Sud reste préoccupant.

Les pays d’Afrique sont également l’objet d’une attention particulière. Moins affectés jusqu’ici par la pandémie, ils ont tous répondu au mieux aux recommandations de l’OMS, malgré des moyens souvent faibles. La réponse très uniforme des pays du continent africain a été de gérer, avec les moyens du bord, les décisions de fermeture des frontières, de mise en place des mesures convenues de distanciation, barrières, jusqu’au confinement qui est appliqué de manière plus ou moins suivie.

Chaque pays du continent africain, et d’autres pays associés, tel que Madagascar, a mis au point une stratégie qui conjugue les mesures prophylactiques et l’utilisation assez généralisée d’antiparasitaires souvent associés à un antibiotique.

A ce jour on ne connait pas de système de santé national débordé sur le continent africain.

A titre d’exemple, et au voisinage de l’Afrique, sur Madagascar, une crise rude était attendue, en raison du manque de moyens du pays. Au 21/04/2020 on dénombre 121 cas confirmés, 82 malades actifs, 39 guérisons et 0 décès. Résultat impressionnant pour un pays qui compte 26 millions d’habitants.

Les raisons évoquées pour ce résultat sont les dépistages nombreux, le traitement rapide des premiers cas, l'utilisation immédiate de l'hydroxichloroquine, le métabolisme des malgaches : pas de surpoids et très peu de personnes âgées et gravement malades comme dans les pays occidentaux.

Fermeture des frontières et confinement ont là encore été instaurés très tôt par rapport à l’arrivée de la pandémie, permettant de ne pas voir se développer de foyers primaires importants.

Madagascar propose désormais une prophylaxie à suivre, basée sur un cocktail de plantes proposées sous forme de boisson grand public. Les plantes choisies ont été sélectionnée sur la base d'une médecine traditionnelle en privilégiant les vertus identifiées de renfort du système immunitaire.


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Capture d'écran de l'application bing.com/covid (cliquer l'image pour aller sur bing) montrant la répartition des cas covid+ répertoriés depuis le début de l'épidémie jusqu'au 21/04/2020. La répartition géographique est particulièrement expressive.



Quelques informations très techniques sur les pistes de traitement de covid

Sur le mécanisme probable de covid pour infecter un être humain ?

Peu d'articles assez documentés et digestes sont accessibles, mais il est certain que cela va venir dans les jours prochains.

La piste la plus sérieuse de soins pour faire face à SARS-Cov2 est venue des tentatives de plus en plus nombreuses de comprendre pourquoi des traitements comme l'hydroxichloroquine associée à l'azithromycine, ou l'azithromycine associée à un apport en zinc, ce dernier servant d'amplificateur de l'antibiotique, pouvaient apporter un bénéfice, en faisant baisser la charge virale.

La baisse de la charge virale est le constat.

La chloroquine, ou sa forme dérivée, moins susceptibles d'effets secondaires en particulier cardiaques, est un antipaludéen. Découverte en 1934 et utilisée depuis la fin de la seconde guerre mondiale sous différentes formes, elle a fait ses preuves comme moyen de lutte contre le paludisme.

Ses effets actifs dans certaines affections virales ont été expliqués depuis au moins une vingtaine d'années, la chloroquine et ses dérivés ayant une action, simple mais efficace conduisant à empêcher la réplication virale lors de certaines infections. Les effets "antiviraux" de la chloroquine ont fait l'objet de recherches et de travaux avancés expliquant les mécanismes dont la médecine pouvait tirer parti avec la chloroquine dans le cadre de la pandémie de Sida.

Ces dernières semaines, et compte tenu de l'utilisation généralisée, dans le monde, de l'hydroxichloroquine selon la proposition faite par l'IHU de Marseille d’une part, des controverses qui ont pu être lancées sur ce sujet d’autre part, d'autres protocoles ont été élaborés, en tentant de trouver une solution donnant des résultats face à covid-19.

Un protocole, en particulier, a été tenté par plusieurs médecins qui ont pu annoncer des résultats similaires au protocole de l'IHU de Marseille, sans chloroquine. Ce protocole utilise l'azithromycine associée à un amplificateur : le zinc.

L'azithromycine est un antibiotique, de type macrolide, il ne s'agit pas d'une pénicilline. L'indication de cet antibiotique est fréquemment liée aux otites, angines en cas d'allergie à la pénicilline, dans un certain nombre d'IST, gonocoque, chlamydia ...

Un autre protocole est proposé par l'IHU de Marseille, et qui a été testé, mais sur lequel les résultats disponibles ne sont pas lisibles à ce stade, basé sur la doxicyline qui est une tétracycline.

Le coronavirus SARS-Cov2 est un virus à mécanisme d'infection intracellulaire, ce qui justifie l'uisage de macrolides ou de tetracyclines.

Les protocoles proposés ont donc permis d'observer une amélioration certaine de l'état de patients infectés par SARS-Cov2, mais n'ayant pas atteint les symptômes les plus graves, en particulier un stade de pneumonie sévère. Cette observation est toutefois mal documentée en matière de protocole établi par la preuve. Si les informations de terrain semblent montrer un bénéfice pour les patients en début d'infection, on ne mesure pas objectivement à court terme et dans l'urgence de la lutte contre la pandémie le bénéfice possible en médecine préventive, ou en curatif pour les patients ayant des symptômes limités.


Indication de vitamine C en intra-veineuse (Allemagne)

La vitamine C est normalement utilisée en apport complémentaire aux rations reçues par l'alimentation, mais elle est connue pour des indications bien spécifiques. En Allemagne elle est utilisée en intra-veineuse pour certains cas de cancer.

Une information venue de Chine au mois de mars a retenu l'attention de médecins allemands, précisant que des patients traités par vitamine C en intra-veineuse avaient connu une rémission de covid-19.

Des médecins chinois ont traité ainsi des patients en phase aigüe, dont le pronostic vital était engagé, et qui ont pu être ramené à un état stationnaire et gérable. La vitamine C à haute dose en intra-veineuse joue le rôle d'un antioxydant puissant en phase critique de l'infection.

Indication d'ozonothérapie (Allemagne)

L'utilisation par les médecins allemand est rapportée de l'ozonothérapie comme moyen de développer la performance du système immunitaire contre le virus SARS-Cov2.

Et que faut-il penser de tout ça en regard de la performance des systèmes de santé ?

Il devient maintenant plus évident de comprendre l’une des différences qui frappe l’opinion publique entre la performance du système de santé allemand, et celle du système de santé français.

Côté français le système reste performant, bien qu’il connaisse une dégradation croissante depuis un certain nombre d’années. Le rythme du désengagement de l’État dans le système de santé, en France, peut conduire assez rapidement à une situation qui ressemblerait à ce qui existe en Espagne. Un glissement continu de la compétence et de la capacité technique et logistique s’opérant du secteur public vers le secteur privé, le pays conserve une haute technicité, mais qui ne sert plus aussi bien l’ensemble de la population. Or une épidémie de masse, par définition n’a rien d’élitiste, elle concerne tout le monde.

Côté allemand le système de santé est assez proche du système français, moins articulé sur un secteur public qu’en France, mais un secteur privé qui est sous contrôle suivi des ministères régionaux de la santé, eux-mêmes pilotés par un ministère fédéral puissant.

Une différence, remarquable est mentionnée par des retours d’opinion provenant de nombreux médecins, tant en France qu’en Allemagne. Peu de professionnels comprennent comment les médecins français sont privés du droit d’exercer la médecine comme ils l’entendent, à l’inverse de l’Allemagne qui ne fait aucun contrôle des pratiques, des moyens utilisés. Il existe un ordre des médecins pour cela.

Pour la politique de santé publique, celle qui utilise procédures, outils, et qui instaure des mesures de santé publique au niveau local ou national, l’organisation allemande a établi les règles d’hygiène sociale puis de confinement qui ont été actées par l’exécutif.

En France il a été observé une totale déconnexion entre les autorités de santé, régionales, le ministère national, et l’exécutif. Des discordances ont été observées dès le mois de février, aboutissant à un discours gouvernemental devenu incapable de refléter la réalité des choses. L’utilité des masques remise en cause pour pallier à la carence des stocks stratégiques, l’incapacité à lancer un programme national de tests pour isoler les populations infectées, …

Les mesures de confinement, d’isolation, qui ont pu être adaptées en raison d’un programme de tests de plus en plus important a permis à l’Allemagne de creuser l’écart avec la France en matière de bonne gestion de la crise. Et une plus grande liberté d’action du corps médical a permis aux médecins de faire un travail considéré comme plus efficace puisqu’il aura permis d’aboutir à l’absence de saturation du système hospitalier allemand.

Cette liberté d’action du corps médical a permis aux médecins de disposer d’un plus grand nombre d’outils pour apprendre, très vite, à sauver des vies, y compris en dehors de l’hôpital, avec une politique de respirateurs en maison de retraite et à domicile.

Le cap de 100 décès est daté du 15/03/2020 en France, et du 23/03/2020 en Allemagne. Le cap de 1.000 morts date du 25/03/2020 en France et du 03/04/2020 en Allemagne. L’écart est passé de 8 jours à 10 jours entre ces deux stades. Il a atteint petit à petit deux semaines … il n’y aura jamais de moment où l’Allemagne aura un nombre de décès aussi élevé que la France.

Il y a autant de facteurs liés au système de santé, que de facteurs initiaux. La montée en puissance de l’épidémie en France repose sur des évènements qui n’ont pas eu lieu en Allemagne, Mulhouse, le premier tour des élections municipales … qui sont des circonstances accidentelles particulières. L’Allemagne a eu la chance de ne pas connaître ce type d’épisode. On parle également des derniers évènements sportifs ou culturels d’ampleur qui ont pu ajouter des foyers majeurs d’infection en France.

Il est probable que la vigilance n’a pas été à la hauteur, côté français, pour mesurer à la fois les carences de moyens vis-à-vis du plan pandémie et l’absence, par exemple, de réaction de l’ARS Grand-Est au lendemain du rassemblement de Mulhouse.

Ce sont des points sur lesquels des améliorations très sensibles devraient être portées.

Le carcan politique est un facteur déterminant, donc, en France, et qui explique en partie, de manière non fortuite, à la fois l’impréparation du pays en matière de santé publique, mais aussi plus explicitement identifié auparavant l’inadaptation du système hospitalier devenu variable d’ajustement budgétaire.

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Pour deux francs et pas un saoul ... - Je regarde cette putain de carte avec ses points rouges. Elle a la chtouille. On a beau dire, ...